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Qui? moi?!

crédit photo: anonyme, libre de droits

Je prends la plume ce matin pour vous parler d’un tout autre sujet que celui de l’écoute. Pour ceux qui attendaient une suite à la liste de principes sur l’écoute, ne désespérez pas, j’y reviendrai très bientôt.

Donc, quel est ce sujet qui me tient tant à cœur, qui me prend au trippes et pour lequel je ne suis plus capable de m’abstenir de parler? C’est un sujet tabou et délicat qui met la plupart du temps en grand malaise les gens concernés – ou plutôt ceux qui se pensent concernés tout en s’en défendant. Un sujet pourtant pas si sorcier, qui ne fait pas mal, qui n’est pas immoral, ni anormal. Un sujet banal quoi! Sauf pour les gens concernés.

Allez! mais dis-le, me direz-vous.

Eeeeee, je vous fais encore languir un peu…

Quel est ce sujet si banal, mais qui garde prisonnier et isolé un petit pourcentage de la population? Quel est ce sujet, qui, dans notre société ouverte et plurielle, égalitaire et inclusive, gêne tant? Quel est ce sujet dont on parle de plus en plus et de mieux en mieux, mais encore trop rarement? Quel est ce sujet qui n’effleure même pas la pensée de plusieurs gens concernés, car on n’en parle encore trop peu et trop mal? Une image d’un sujet construit sur des préjugés, des jugements de valeurs, de fausses images et d’incomplètes définitions désuètes et obsolètes. Un sujet qui concerne autant les enfants que les adultes; des enfants qui deviennent des adultes… isolés, parfois, déboussolés, aussi. Des adultes qui se cherchent et ne se retrouvent pas si souvent dans le regard de leurs proches. Des adultes qui, ne sachant pas nommer leur réalité, se sentent décalés, dépréciés, vivent inutilement un mal être ou vont jusqu’à se penser anormaux ou atteints d’une maladie mentale.

Justement, la maladie mentale, un sujet, de moins en moins tabou, de plus en plus connu qui soulève des passions, des missions, des téléthons. Tant mieux! Voyez la différence autour de vous. Et pour ceux, nombreux, qui vivez avec cette réalité, quel soulagement que d’être de moins en moins isolés, jugés, ignorés ou ostracisés.  

Eh bien voici! Eh bien voilà, ce fameux sujet : la surdouance.

Oui, je l’ai dit et je le répète : la surdouance. Chez l’adulte.  

Incompréhension. Souffrance. (Pas toujours et chez tout le monde, faut nuancer!)

Vous tiquez. Vous vous dites : Ah! Ces bolles à lunettes, ces nerds sympathiques, qu’ont-ils à se plaindre d’avoir une intelligence hors norme?  Et surtout qu’ils s’en cachent, ici au Québec, ça ne se fait pas, on est tous égaux, on ne se vante pas, ce n’est pas bien, pas poli. L’humilité est la beauté de l’âme. On est né pour un petit pain et il ne faudrait surtout pas voler celui du voisin.

Eh bien voilà! On n’y est pas. C’est tout faux.

Le surdoué adulte a été un enfant surdoué, qu’on appelle souvent «enfant précoce». La plupart du temps, il ne le sait même pas. Vous qui lisez ces lignes, êtes peut-être concerné… Mais non, vous me direz, je ne suis même pas brillant, j’ai eu un parcours scolaire en dents de scie, on passait son temps à me dire de faire comme les autres, d’entrer dans le rang.  Vous êtes peut-être concerné. On vous dit (ou vous pensez) que vous êtes «trop». Trop émotif, trop sensible, trop susceptible, trop de pensées allant trop vite. Trop de mots dans la même phrase, trop d’idées dans le même discours. Trop de solutions et trop peu d’arguments pour les étayer.

Des perceptions aigues des sons, des odeurs. Une perception automatique des émotions de l’autre ou même d’un groupe de gens. Trop éponge. Vous vous sentez peut-être concerné… (ou peut-être votre dulcinée, votre collègue de bureau, votre voisin d’en haut).

Pour vous, tout est blanc ou noir. Tout est vrai ou faux. Peu de nuances. Tout le monde il est bon  il est gentil. Ça devrait être vrai, vous y croyez dur comme fer, mais pourtant vous souffrez souvent de vos contacts avec les autres qui ne vous comprennent pas et que vous ne comprenez pas non plus. L’empathie vous étouffe ou vous permet de vous ouvrir. Vous pouvez être hyper social, mais êtes fondamentalement solitaire car vous avez besoin de vous isoler pour calmer votre esprit et vos sens; méditer; bouger; réfléchir (ah non! pas encore penser!). La justice est tout en haut de la pile de vos valeurs, l’intégrité aussi (un peu naïf? ben…). Votre pensée part dans tous les sens à la fois et crée des liens sans fin.

La procrastination ça vous connait. La super efficacité aussi. Paradoxe. Vous êtes exigent, laissez peu de place à l’erreur, mais vous vous défendez d’être perfectionniste. Tout à la joie d’une réussite (sentiment perdurant à peine 15 secondes), vous vous interrogez sur tout ce que vous n’avez pas fait ou mal fait. La créativité, ça vous connait, si elle n’a pas été brimée.

Cela dit, en passant, plusieurs adultes surdoués vivent parfaitement heureux.  

La surdouance chez l’adulte est mal connue, mal vue. Oui, ce beau monde a – aussi, en majorité –  un Q.I. élevé (chut, faut pas le dire trop fort, l’humilité, la vanité…), mais comme on vient de le voir, ce n’est que la pointe de l’iceberg. On tente de nommer cette réalité de tous les noms question de faire passer la pilule tant chez les surdoués eux-mêmes (qui s’ignorent et se jugent complètement différemment) que chez les professionnels de tout acabit qui tentent de trouver un mot plus juste : zèbre, haut potentiel, haut potentiel émotionnel, surefficient, hyperfonctionnant, hypersensible, etc. Il y a des différences entre tout cela, il y a ceux qui ont le Q.I. élevé sans les autres caractéristiques, ceux qui sont hyperestésiques (5 sens hyper développés) sans avoir un Q.I. hors norme, etc. On y reviendra ultérieurement.

Pourquoi est-ce que je tenais à vous parler de ces gentils êtres zébrés? Parce que de se retrouver dans un minime pourcentage de la population (de 2% à 20% dépendamment des caractéristiques ciblées), c’est dérangeant. Pour soi, pour l’autre. Parce qu’il faut en parler pour que chacun se comprenne (eux, vous, les autres). Parce que de découvrir à l’âge adulte qu’on est «normal» et  qu’on est juste « pas dans la norme», ça peut changer une vie!

Dans mon bureau, à l’abri des oreilles, à l’abri des jugements, tout en douceur, je vois des adultes remplis de potentiel qui s’ignorent et qui se découvrent soudain, qui se comprennent enfin, qui se pardonnent aussi, qui choisissent de s’aimer et qui osent ouvrir leurs ailes.

La surdouance. Parlez-en, parlez-en plus, parlez-en bien.  

Parlez-m-en. Je vous invite à me poser vos questions, à me partager votre réalité. Ma page Facebook et mon courriel sont affichés au bas de mon profil (cliquez sur mon nom ci-haut). Je ne me targue pas d’être experte; je suis bien informée, mais surtout curieuse, sensibilisée. Je tenterai de trouver des réponses à «nos» interrogations. Ne restez pas seul. Informez-vous ou posez des questions à un neuropsychologue. Pour les parents qui reconnaitraient leur enfant, informez-vous aussi, cela peut faire LA différence.

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