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Sortir ou ne pas sortir? Telle est la question!

(Photo: courtoisie SQ)

Une tempête de neige et de poudrerie comme celle de vendredi et samedi derniers suscite de l’appréhension chez tout un chacun. De nombreuses questions se posent, mais la plus importante est « rester ou ne pas rester à la maison? »

Ce ne sont pas les mises en garde qui manquent, notamment par la Sûreté du Québec. C’est une décision qui peut entraîner des conséquences parfois lourdes, parfois moins lourdes. Des usagers de la Société des transports de Rimouski (STR) l’ont appris à leurs dépens, en fin de journée, vendredi, selon une nouvelle diffusée par Radio-Canada ce matin.

La STR a alors avisé ses chauffeurs qu’elle interrompait brusquement le service en raison du mauvais temps et les trois ou quatre personnes qui avaient pris place dans le véhicule Citébus au terminal du centre-ville ont été invitées à en sortir lorsque le chauffeur leur a appris la décision.

Selon une femme citée par Radio-Canada, Nathalie Warren, la Société des transports aurait dû encadrer ses passagers en leur offrant un moyen autre de rentrer à la maison, un taxi, par exemple. Les personnes laissées en plan se sont trouvées un bon samaritain pour les reconduire.

Commentaires

Le journal le soir a contacté le président de la STR, Marc Saint-Laurent, pour obtenir des commentaires à ce sujet mais sans succès. Le maire de Rimouski, Marc Parent, a indiqué à Radio-Canada que la décision lui semblait normale dans les circonstances, car il aurait été encore plus imprudent de continuer à circuler en autobus.

Au Cégep

Par ailleurs, comment s’expliquer que pendant que l’UQAR et la Commission scolaire ont réagi rapidement pour annuler leurs cours, le Cégep est demeuré ouvert? Vous êtes-vous déjà posé la question? Un lecteur, enseignant et syndicaliste, Alain Dion nous fournit l’explication suivante dans une intervention sous forme de lettre ouverte.

Quand un règlement ministériel mène à des décisions périlleuses

« Rimouski, vendredi 7 février. Une tempête de neige s’abat sur le Bas-St-Laurent. Toutes les écoles de la grande région de Rimouski sont fermées. Toutes ? Non. Le Cégep de Rimouski demeure ouvert contre bourrasques et poudrerie. Les cours se donnent malgré l’état des routes et la visibilité réduite.

Par contre, dans un mémo, la Direction rappelle qu’« il appartient à chaque individu, membre du personnel ou étudiante et étudiant, de juger des conditions de circulation et de décider de se présenter ou non aux activités du collège. Personne n’est tenu de s’exposer à des risques sérieux pour participer à ses activités courantes ».

Braver ou pas ?

Alors, braver la tempête ou non ? Que faire quand on est enseignante ou enseignant ? Annuler le cours ? Demander à nos élèves de prendre la route malgré les risques ? Et quand on est étudiante ou étudiant ? Que se passe-t-il si je ne me présente pas et que l’examen a bel et bien lieu ? Si seulement les consignes étaient claires. Et si les conditions météorologiques sont assez mauvaises pour suspendre les cours dans les écoles primaires et secondaires, pourquoi pas au cégep ?

Les conditions routières sont aussi dangereuses pour un conducteur de 19 ans que pour un autobus rempli d’écoliers. Pourquoi ne pas fermer alors ?

La loi des 82 jours

La réponse est simple : le Règlement sur le régime des études collégiales (RRÉC). Un règlement ministériel encadrant de manière très stricte le calendrier scolaire du cégep. En effet, dans la section V, article 18 du RRÉC, il est stipulé que « le collège doit organiser, durant la période débutant le 1er juillet d’une année et se terminant le 30 juin de l’année suivante, au moins deux sessions comportant chacune un minimum de 82 jours consacrés aux cours et à l’évaluation ».

Or au fil des ans, l’élaboration des calendriers scolaires dans le réseau collégial est devenue un véritable casse-tête avec la multiplication des activités pédagogiques particulières, activités de promotion, visites des écoles secondaires, etc.

Le respect de ce fameux règlement est devenu si laborieux qu’il contraint certaines directions à prendre des décisions pour le moins inquiétantes, comme c’est le cas aujourd’hui… Que peut-on faire dans un calendrier extrêmement serré quand il y a une tempête ? Une grève ? Une levée de cours par les élèves qui manifestent contre le réchauffement climatique ? Jusqu’où peut-on étirer une session ? Nous terminons déjà tout près de Noël à l’automne et tard en mai au printemps. Ajouter des journées devient presque impossible.    

Dans leur tour d’ivoire

Au moment où j’écris ces quelques lignes, le Cégep de Rimouski annonce qu’il fermera ses portes pour l’après-midi et la soirée, compte tenu des conditions météorologiques. C’est également la même situation au Cégep de Matane et au Cégep de Rivière-du-Loup.

Et le plus beau dans tout ça, c’est que comme le collège n’aura pas été fermé toute la journée, le calendrier ne sera pas révisé. Voilà peut-être pourquoi la décision de fermer, ou pas, lors des tempêtes devient si stratégique pour les directions de cégep.

En matinée, plusieurs de nos collègues se sont retrouvés devant des classes où il manquait un grand nombre d’étudiantes et d’étudiants. Ils devront donc maintenant faire preuve de « créativité » afin de trouver une façon de rattraper les choses avec les élèves qui ne se sont pas exposés au danger de la route.

Absurdité

Et comme les cours ont été suspendus en après-midi, les autres enseignantes et enseignants auront eux aussi à trouver des solutions pédagogiques pour reprendre la matière manquée. Sans ajouter une seule journée au calendrier. Absurde, n’est-ce pas ? Que voulez-vous, c’est le règlement…

Il serait peut-être temps que nos penseurs de l’Enseignement supérieur descendent de leur tour d’ivoire à Québec et qu’ils se penchent sérieusement sur cette absurdité des 82 jours de calendrier. Non seulement ce règlement ne colle plus du tout à la réalité collégiale, mais il mène parfois les directions à prendre de périlleuses décisions.

-Alain Dion Enseignant et coordonnateur du Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep de Rimouski »

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