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Le couvent qui brûla deux fois

À Rimouski, le mauvais sort s'est acharné sur les Soeurs de la Charité. Leur couvent a été rasé à deux reprises par le feu. La première fois en 1907 et la seconde en 1950.
Le couvent des Soeurs de la Charité détruit par un incendie le 31 décembre 1907. Photo collection Richard Saindon

Pour la communauté rimouskoise, l’année 1907 se termine bien mal. Le 31 décembre, vers 18h00, un incendie se déclare au couvent des Sœurs de la Charité situé rue St-Germain, à l’ouest de l’ancienne église qui abrite aujourd’hui le Musée régional de Rimouski.

Quelques minutes plus tard, à la cathédrale, on sonne le tocsin, une volée de cloches répétée et prolongée servant à donner l’alarme. Des centaines de personnes accourent mais les moyens de lutte contre les incendies sont fort limités. Les pompiers volontaires et les religieuses parviennent à sauver quelques meubles, des objets sacrés, des papiers et des vêtements. Le feu progresse rapidement et consume, en quelques heures, le vaste bâtiment de quatre étages entièrement construit en bois. Les pertes sont évaluées à 80 000 $ à l’époque ce qui représenterait aujourd’hui à une somme de plus de 1,7 M $. Le journaliste du Progrès du Golfe écrit : « Qui peut dépeindre l’horreur d’un incendie semblable à celui que nous enregistrons, allumé au milieu de l’obscurité de la nuit, sous un ciel chargé de neige et par un vent qui souffle en tempête. »

À 21h00 le clocher s’effondre, projetant des étincelles qui mettent le feu à une bâtisse voisine. Le couvent abritait, en plus des religieuses, un orphelinat, un hospice pour les femmes âgées, un pensionnat pour jeunes filles et un jardin d’enfance. En tout, 200 personnes se retrouvent à la rue.

Une longue histoire rimouskoise

L’ancienne maison de Louis-Jacques Lepage au centre de la photo a été utilisée comme premier couvent par les Soeurs de la Charité. Photo domaine public.

En mars 1871 une épidémie de fièvre typhoïde frappe la population de Rimouski. On dénombre quelques centaines de malades parmi lesquels un bon nombre d’étudiants du Séminaire. Devant cette situation, l’évêque de Rimouski, Mgr Jean Langevin, demande l’aide des Sœurs de la Charité de Québec. Quelques jours plus tard, les deux premières religieuses arrivent à Rimouski et se mettent à l’œuvre dans l’évêché transformé en hôpital. À la fin de septembre 1871, une fois l’épidémie résorbée, quatre religieuses des Sœurs de la Charité s’installent dans une maison mise à leur disposition par l’évêque. Il s’agit de l’ancienne demeure de Louis-Jacques Lepage située à l’arrière du magasin Talbot, rue des Avocats, aujourd’hui l’avenue de la Cathédrale.

La maison Chalifour fut le deuxième couvent des Soeurs de la Charité. Photo groupe Facebook Histoire de Rimouski, collection Robert Garon.

Au départ, elles visitent les pauvres et les malades à domicile. En août 1873, elles déménagent dans une maison voisine, soit l’ancienne demeure du shérif Simon-Joseph Chalifour. Elles ouvrent un noviciat à cet endroit. Le mois suivant six novices font leur entrée et un an plus tard, en août 1874, 17 autres religieuses arrivent de Québec. Cette même année, elles inaugurent leur hospice. En 1880, elles aménagent une maternelle que l’on appelait à l’époque, salle d’asile… Les enfants de 4 à 8 ans étaient admis et chacun apportait son lunch mais pour un cent par jour, ils avaient droit à une assiettée de soupe. Par ailleurs, en 1882, les Sœurs de la Charité acceptent de reprendre le pensionnat ainsi que les classes tenues jusque-là par les Sœurs de la Congrégation. Mais surtout, les Sœurs de la Charité seront reconnues par les habitants de Rimouski pour leur orphelinat qui accueillera notamment, à la fin du 19e siècle, plus de 110 jeunes orphelins d’Irlande et d’Angleterre.

Pendant ce temps, les bonnes sœurs mettent en chantier, rue St-Germain Ouest, une très grande bâtisse, qui sera agrandie à deux reprises. Elles en prennent possession en décembre 1883. C’est ce couvent qui est détruit en 1907.

Le quatrième couvent des Soeurs de la Charité construit en 1909. Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Rimouski. Fonds Gérard Lacombe 01R, B4,S3,SS3,D1,P16.

Après la tragédie, les religieuses obtiennent de l’argent du gouvernement du Québec et elles organisent plusieurs activités de financement. En 1909, les travaux de construction de leur nouvel hospice sont lancés. En 1930, une aile, pouvant loger 325 personnes, est ajoutée. Dans l’intervalle, les Sœurs de la Charité ont aussi pris en charge l’hôpital Saint-Joseph de Rimouski.

Cette photo prise de la rue Ste-Marie le 7 mai 1950 nous montre les ruines du couvent des Soeurs de la Charité. Bibliothèque et Archives nationales du Québec à Rimouski. Fonds du Séminaire, boîte 15-B4, dossier 23.

Mais en 1950, le malheur s’abat encore sur la communauté. Lors du grand feu de Rimouski, l’hospice et l’hôpital, sont la proie des flammes. Les revêtements de brique n’ont pas suffi à les protéger. À la suite de la destruction de l’hospice, un certain nombre de pensionnaires sont transportés à Matane pour être hébergés dans l’ancien hôtel Belle-Plage, converti temporairement en résidence pour personnes âgées.

Les Sœurs de la Charité vont encore une fois reconstruire… Elles érigent sur les ruines de leur couvent, un nouvel immeuble qui sera nommé Institut Mgr Courchesne. Par contre, elles ne conservent que les fonctions d’enseignement et d’orphelinat, abandonnant la partie hospice. Pendant huit ans, Rimouski se retrouve sans foyer pour les personnes âgées. C’est une autre communauté religieuse qui va s’en charger. Les Filles de Jésus vont ouvrir en décembre 1958, dans la localité voisine de Notre-Dame-du-Sacré-Cœur un vaste édifice qui prendra plus tard le nom de Foyer de Rimouski.

Quant à l’Institut Mgr Courchesne des Sœurs de la Charité, il sera acheté en septembre 1976 par le Cégep de Rimouski pour accueillir l’Institut maritime du Québec. 

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