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Les pendaisons à Rimouski

Entre 1882 et 1935, trois meurtriers ont été exécutés sur la potence qui était installée dans la cour de la prison au Palais de justice de Rimouski.
La potence qui se trouvait jadis dans la cour du Palais de justice de Rimouski. Collection Richard Saindon

François Moreau

Le premier cas nous amène à Saint-Anaclet à l’été 1881. Il s’agit d’une sordide histoire de violence conjugale. François Moreau, un agriculteur âgé de 36 ans, est un homme de petite stature au teint basané. Il a les yeux noirs et porte une barbe fournie. Plusieurs années auparavant, il avait épousé Démerise Roy dit Lauzon, une veuve âgée de dix ans de plus que lui et qui avait des enfants.

Dès le début, la relation est houleuse entre les époux et Moreau ne témoigne aucune affection aux enfants. À cause de fréquentes querelles, Démerise Roy quitte le foyer conjugal en 1879. Cependant, au mois de juin 1881, à la suite de reproches et de pressions exercées par ses parents, Démerise Roy revient habiter chez son mari avec la dernière de ses filles, Emma, âgée de 13 ans.

Les relations demeurent tendues et les voisins sont témoins de scènes disgracieuses. Le 16 septembre, Moreau demande à sa femme de venir l’aider à faucher sur la terre et à cueillir des noisettes. Lorsqu’ils sont seuls à l’extrémité du lot, Moreau tue sa femme en lui assénant des coups de hache à la tête.

De retour à la maison, Moreau demande à Emma si sa mère est revenue, en affirmant qu’elle l’avait quitté il y a déjà plusieurs heures. Moreau se rend ensuite chez des voisins pour demander si on avait vu son épouse. On organise des recherches avant la tombée de la nuit qui demeurent vaines. Le lendemain, une battue est organisée. C’est finalement quatre jours plus tard, le 20 septembre, que le corps ensanglanté de Démerise Roy est découvert, dissimulé en bordure d’un sentier.

Accusé du meurtre de sa femme, François Moreau subit son procès au Palais de justice de Rimouski devant le juge Richard Alleyn. La principale pièce à conviction est la hache de Moreau qui porte toujours des traces de sang malgré une tentative de nettoyage. Après trois jours de procès, Moreau est trouvé coupable. Condamné à mort, il a été pendu dans la cour du Palais de justice de Rimouski le 13 janvier 1882 en présence d’une quarantaine de personnes.

Ulric Germain

La deuxième exécution par pendaison à Rimouski fut celle d’Ulric Germain, le 10 juin 1927. Il s’agit d’un autre drame conjugal survenu cette fois à Mont-Joli. Le 5 mai 1925, l’épouse d’Ulric Germain, Marie-Louise Roy, âgée de 35 ans, meurt empoisonnée.

Le procès de Germain se déroule au Palais de justice de Rimouski en mars 1927. Il est présidé par le juge Adolphe Stein. L’accusé est défendu par les avocats Auguste Côté et James Jessop, tandis que le procureur de la couronne est Perreault Casgrain.

Après avoir entendu plusieurs témoins, ainsi que les plaidoiries, les jurés se retirent pour délibérer en fin d’après-midi le 25 mars. Il ne leur faudra que 45 minutes pour trouver Germain coupable du meurtre de son épouse. Une fois le verdict rendu, le greffier demande à Ulric Germain s’il souhaite s’exprimer. L’accusé lève alors le bras droit et déclare : « Jusqu’au bout, je soutiendrai que je ne suis pas coupable de ce dont on m’accuse ». Puis il ajoute : « Je pardonne à mes enfants pour les témoignages qu’ils ont rendus contre moi et qui sont de nature à m’envoyer, soit à l’échafaud, soit au fond de pénitenciers; je ne pardonnerai jamais à ceux qui ont conseillé à mes enfants de rendre semblables témoignages. Maintenant, je suis prêt à recevoir ma sentence ».

La nouvelle a fait la première page du Progrès du Golfe

Le juge Stein s’adresse alors au coupable : « Germain, vous avez été bien défendu, votre avocat a fait pour vous tout ce qu’il était possible de faire, mais vous avez été trouvé coupable parce que les preuves contre vous sont écrasantes et le crime, dont vous venez d’être convaincu est abominable. Le jugement de la Cour est que vous, Ulric Germain, soyez sans délai reconduit à la prison de Rimouski et être détenu jusqu’au 27 mai prochain, pour là, à l’heure habituelle, être pendu par le cou jusqu’à ce que mort s’en suive. » L’exécution a finalement été reportée au 10 juin pour permettre à la défense de soumettre le cas au ministre de la Justice, mais ce dernier a jugé qu’il n’y avait pas lieu d’intervenir.

Le vicaire de la cathédrale, l’abbé Léo Hudon, a accompagné le condamné sur l’échafaud. Avant qu’on lui passe la corde au cou, Germain a récité d’une voix forte l’Acte de Contrition.

Alexandre Savard dit Bergeron

Le 14 juin 1935, se déroulait la troisième et dernière exécution à Rimouski. Alexandre Savard dit Bergeron, un solide gaillard de 23 ans de Rimouski, montait sur l’échafaud pour le meurtre de sa fille Noëlla-Gisèle Savard, âgée de 9 jours seulement.

Le drame est survenu dans la nuit du 26 au 27 janvier 1935. L’autopsie a révélé que le bébé avait été asphyxié. L’examen a aussi relevé un grand nombre d’ecchymoses sur les deux poumons. Lors de l’enquête du coroner, Alexandre Savard dit Bergeron et sa conjointe, Yvonne Lebel, sont reconnus coupables de négligence et cités à procès qui s’ouvre le 22 mars 1935 au Palais de justice de Rimouski. Mais seulement Alexandre-Savard dit Bergeron a été condamné à mort. En rendant leur verdict de culpabilité, les jurés recommandaient la clémence, mais le juge Adolphe Stein a déclaré qu’il n’avait pas le choix.

Un extrait de la première page du Progrès du Golfe le 14 juin 1935.

Le matin de l’exécution, Savard dit Bergeron a assisté à la prison à une messe célébrée pour lui par Mgr Samuel Langis. Après la cérémonie, il a bu une tasse de thé et fumé une cigarette avant d’être dirigé vers la potence où l’attendait le bourreau Bradshaw, venu de l’Ontario. À 7 h 00 précises, la trappe s’ouvrait sous les pieds du condamné. Fait troublant, une trentaine d’enfants âgés de 8 à 12 ans, ont assisté à l’exécution en grimpant aux arbres se trouvant dans la cour du Séminaire.

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