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Nouvelle de 19 h

Visite à l’hôpital : ce qui va bien et … ce qui pourrait aller mieux !

Un bénéficiaire se dirigeant vers le département de radiographie. Notez bien qu’il s’agit d’une photo d’archives. (Photo: Pierre Michaud, archives)

Les soins semblent bien dispensés sur une base horaire et quotidienne dans les hôpitaux, malgré la pandémie, mais c’est l’organisation à moyen terme qui semble le plus poser de difficultés.

Ayant séjourné au centre hospitalier régional de Rimouski (chrr) dernièrement, pour une intervention mineure, l’auteur de ces lignes souhaite apporter un témoignage éclairant et honnête sur ce qui s’y passe dans cette période de pandémie. En voici notre résumé.

L’accueil est des plus efficaces. Les agents de sécurité et les responsables sur place voient à ce que les personnes qui entrent et qui sortent suivent les consignes : port du couvre-visage, lavage des mains, petit questionnaire à remplir à l’arrivée. Si vous passez tout droit (comme votre humble serviteur), on vous ramène à l’ordre poliment.

En cinq minutes

L’admission l’est aussi et peut-être à un point où on ne l’avait jamais vue! Pas besoin de prendre un « ticket ». Pas de temps d’attente. Réglé en cinq minutes avec la préposée.

Arrivé à la section pour les chirurgies d’un jour (CDJ), même accueil efficace et sans délai. Dans la salle d’attente, nous sommes tous séparés par des vitres de plastique.

Perfusion

Je remarque une dame d’environ 70 ans qui doit traîner sa « tour » de perfusion. Elle semble avoir des besoins plus importants que les autres personnes présentes.

J’entends une infirmière s’adresser à elle : « Nous allons maintenant prendre votre glycémie, madame une telle. » « Oups! Une femme diabétique. Ça ne doit pas être facile, pauvre madame », que je me dis.

Quelques instants plus tard, je suis déplacé dans « l’antichambre » de la chirurgie d’un jour, où on effectue certaines vérifications et où on nous place sur un brancard en attendant notre transfert vers une salle opératoire. C’est aussi un centre nerveux : les appels téléphoniques entrent et sortent et les infirmières organisent le travail.

Motel ou hôtellerie?

La dame que je présume diabétique est là. J’entends une des infirmières lui dire : « Madame X, je n’ai pas une bonne nouvelle. Nous allons devoir reporter votre chirurgie, car il n’y a plus de lits pour vous accueillir. Voulez-vous aller séjourner à l’Hôtellerie Omer-Brazeau en attendant? Si oui, il faut quelqu’un pour vous accompagner. »

On lui tend son téléphone cellulaire pour qu’elle puisse parler à son conjoint. Il en ressort qu’il ne peut pas être à Rimouski ce jour-là. La dame devra donc se contenter d’un motel… après avoir pris soin de se préparer à séjourner au chrr.

Questions

En étant témoin des événements, je me pose des questions :

A-t-elle des moyens financiers? A-t-elle de quoi se nourrir? Comment est sa mobilité? Dispose-t-elle d’un véhicule? Est-elle venue de loin?

Plus tard, dans la même « antichambre », j’ai entendu un patient dire à une infirmière que ça faisait trois fois que son intervention était remise. D’autres questions nous interpellent.

Réveil

Dans mon cas, tout va bien. Dans la salle de réveil, on surveille mes signes vitaux. Rien d’inquiétant. Les infirmières sont attentionnées.

Un événement vient toutefois briser le calme, tout en démontrant l’importance de la formation du personnel, sa compétence, et l’efficacité de l’organisation dans la salle de réveil.

Tout semble aller normalement pour un autre homme venant d’arriver dans la salle de réveil, pendant les premières secondes. Jusqu’à ce qu’il se mette à émettre des sons inquiétants, semblant éprouver des problèmes respiratoires graves.

L’hôpital régional de Rimouski. (Photo: archives, Pierre Michaud)

Comme à la télé

Réaction d’urgence immédiate de l’équipe sur place. Comme dans une dramatique à la télévision, une demi-douzaine de personnes entourent l’homme en un claquement de doigts; une d’elles passe la commande : « tel produit, tant de quantité, vite! » L’intermédiaire confirme le nom du médicament et la quantité, puis on l’injecte au patient en détresse sans attendre.

Les quelque 30 à 45 secondes ont l’air de journées, mais le monsieur revient à la normale. Toute une intervention. Un vrai ballet!

Bilan

Donc, dans la même journée, j’ai constaté la grande compétence du personnel -du brancardier jusqu’à l’anesthésiste-, sa bienveillance sur les patients. J’ai aussi constaté que l’application des mesures sanitaires semble bien orchestrée.

Je dis bravo!

Par contre, si l’organisation « à la minute » sur le terrain semble très à point pour de légères interventions comme des injections de cortisone (mon cas), il semble y avoir un problème majeur avec les interventions importantes qui nécessitent de la planification pour un séjour au chrr.

Réactions

Pour ajouter des informations pertinentes à ce compte-rendu, nous avons interpellé le Centre intégré de santé et de Services sociaux (CISSS) du Bas-Saint-Laurent et des intervenants syndicaux connus et respectés : Yanick Proulx (conseiller syndical, Syndicat canadien de la fonction publique, bureau du Bas-St-Laurent et secrétaire général pour le conseil régional de la FTQ) et Nancy Legendre (présidente, CSN, Conseil central du Bas-Saint-Laurent).

Situation sans précédent

« Notre organisation fait face à une situation sans précédent qui demande un très grand niveau d’agilité. La situation épidémiologique jumelée au manque de main d’œuvre, une situation à laquelle toutes les régions du Québec font face, nous demande effectivement de nous ajuster constamment. Nous sommes très sensibles à ce que vivent les usagers et nous tentons de diminuer au maximum les conséquences », déclare la conseillère-cadre aux communications stratégiques à la présidence-direction générale et relations avec les médias du CISSS du Bas-Saint-Laurent, Ariane Doucet-Michaud.

Première ligne

Yanick Proulx rappelle que les travailleurs de première ligne sont toujours fiables, mais qu’on se fie peut-être un peu trop à eux…

« Beau reportage. En effet, si tout le monde prenait les consignes plus à coeur dans la société en général, on n’aurait pas à reporter autant de chirurgies et à exposer autant de monde au risque. Encore une fois, c’est le personnel de la santé qui a la fâcheuse tâche d’annoncer les mauvaises nouvelles, comme les reports. Je lance un appel à tous : la meilleure façon d’être solidaire, c’est de respecter les consignes. »

Réseau déjà fragile

Madame Legendre va dans le même sens : « Les remerciements et l’appréciation ne viennent malheureusement pas très souvent, alors c’est un témoignage apprécié. Ce récit relate très bien ce que nous décrions depuis des années : les travailleuses et les travailleurs mènent le réseau à bout de bras; plusieurs font bien plus que leurs taches respectives, comme de s’assurer que les patients auront un plan  « B » pour coucher, comme la dame dont il est ici question. Pour ce qui est des chirurgies qui demandent une hospitalisation, en effet, tout est beaucoup plus difficile depuis la pandémie. Celle-ci est venue nous démontrer à quel point le réseau était déjà fragile. »

Et madame Legendre de conclure:

« Comme il est difficile d’évaluer quelle sera la demande d’hospitalisation et combien de personnes auront besoin de soins avec la pandémie, les administrateurs font le choix d’annuler des chirurgies pour tenter d’être en mesure de répondre aux éventuelles hospitalisations découlant de la COVID-19 (lits et personnel disponibles). Qui en paye malheureusement le prix? La population. Les employées tentent de faire de leur mieux, mais il devient urgent pour le gouvernement de régler les problèmes persistant depuis trop longtemps dans le réseau, afin de s’assurer de meilleurs services. »

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