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Liberté d’expression et discrimination débattue ce lundi en Cour suprême avec l’histoire de Mike Ward et de Jérémy Gabriel

Jérémy Gabriel (Photo Facebook)

Devant la Cour suprême ce lundi, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a soutenu que Mike Ward n’a pas le droit de se réfugier derrière le prétexte de l’humour pour tenir des propos qui ont pour effet de dénigrer, d’humilier et de ridiculiser Jérémy Gabriel sur la base de son handicap ou du moyen de pallier son handicap.

Elle reconnaît que Jérémy Gabriel, en raison de sa notoriété, s’expose à la critique et à la satire, mais cela doit se faire dans le respect de ses droits fondamentaux. La Commission a donc demandé à la Cour suprême de maintenir les jugements précédents du Tribunal des droits de la personne (TDP) en 2016 et de la Cour d’appel en 2019 qui condamnaient Mike Ward à verser des dommages moraux et punitifs à Jérémy Gabriel.

« Il importe de rappeler ici certains principes essentiels : il n’existe pas d’hiérarchie entre les droits et libertés de la personne et aucun droit n’est absolu. C’est la première fois qu’est soulevée la question de la conciliation entre le droit à l’égalité et la liberté d’expression. C’est également la première fois que l’exercice d’une liberté ou d’un droit fondamental est invoqué comme exemption afin de justifier l’atteinte discriminatoire à un droit. La décision de la Cour suprême revêt donc une importance capitale pour notre société, » a déclaré Philippe-André Tessier, président de la Commission.

Mike Ward (Photo Facebook)

Exercice de conciliation des droits

Afin de déterminer si la discrimination subie par Jérémy Gabriel pouvait être justifiée par la liberté d’expression de Mike Ward, la Cour d’appel, à l’instar du TDP, a procédé à un exercice de conciliation des droits en cause. Son analyse est contextuelle, nuancée et motivée selon la Commission. La Cour d’appel est parvenue à la conclusion que la liberté d’expression ne permet pas de tenir n’importe quel propos, même sous le couvert de l’humour et qu’en l’espèce, M. Ward ne peut invoquer sa liberté d’expression pour justifier une atteinte discriminatoire aux droits de Jérémy.

La Commission rappelle également que l’intention n’a définitivement pas sa place en matière de discrimination et que ce sont plutôt les effets qui doivent être considérés. La Cour d’appel n’a pas fondé son analyse sur l’intention de Mike Ward en tenant ses propos controversés, mais sur l’effet nuisible de ses paroles et leur large diffusion publique sur la dignité et la réputation de Jérémy et sur ce lien entre cet effet et le handicap de l’adolescent.

Apparences d’une situation d’intimidation

Selon la Commission, un même scénario se déroulant dans une cour d’école aurait toutes les apparences d’une situation d’intimidation. Que la scène se transpose sur les planches d’une salle de spectacle à grand public ne lui procure pas pour autant de légitimité et surtout n’amoindrit pas, bien au contraire, l’effet préjudiciable sur l’adolescent qui en est l’objet. 

L’analyse nuancée que fait le TDP des circonstances a pour effet de ne limiter que minimalement la liberté d’expression de Mike Ward. En effet, seuls quelques « blagues » et extraits de numéros et capsules ont été identifiés comme étant discriminatoires et donnent ouverture à la réparation du préjudice causé. Comme le mentionne la Cour d’appel, « M. Ward pouvait très bien passer son message et même y inclure M. Gabriel sans que ses propos portent atteinte à sa dignité et à sa réputation ».

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