Actualités > Économie > Logement : vers un gel des loyers?
Économie

Logement : vers un gel des loyers?

« Un geste prometteur, à condition qu’il y ait une réelle volonté »
Alexandre Cadieux, second à partir de la gauche, lors d’une manifestation dans la capitale nationale. (Photo: courtoisie)

La décision de Québec de mettre en branle une démarche visant à réviser les mécanismes et lois en rapport avec le marché locatif est porteuse d’espoir pour contrer la crise du logement, à condition que les intentions du gouvernement soient sincères.

C’est en ce sens que réagit le coordonnateur du Comité logement Rimouski-Neigette, Alexandre Cadieux, à une nouvelle très importante diffusée dans nos pages la semaine dernière, au sujet de la crise du logement.

Des solutions

Invitée précédemment à faire connaître sa réaction, mais cette fois à un reportage au sujet du désarroi des locataires, la députée-ministre de Rimouski, Maïté Blanchette Vézina, avait fait valoir que la CAQ prenait les choses en main.

« Mon gouvernement et moi sommes conscients des enjeux engendrés par la crise du logement. La ministre responsable de l’Habitation vient tout juste de confier à la députée de Labelle et adjointe parlementaire, Chantale Jeannotte, le mandat de rencontrer divers groupes et experts ayant un intérêt pour le marché locatif, afin d’effectuer un inventaire des recommandations qui permettront d’apporter des solutions novatrices aux enjeux du logement locatif », soulignait celle qui est ministre des Ressources naturelles et des Forêts et ministre responsable du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

Changement

On peut s’attendre à ce que le gouvernement soit prêt à enclencher des changements, selon ce que déclarait également madame Blanchette Vézina : « L’objectif de ce mandat est de nourrir la réflexion gouvernementale sur les mesures à mettre en place, notamment sur les plans législatif ou réglementaire, pour poursuivre l’action gouvernementale visant à répondre aux besoins des locataires. »

Sous le radar

« La nouvelle a passé un peu sou le radar, mais c’est une grosse nouvelle! Pour vous dire, tous les articles au sujet du logement ne sont pas partagés dans nos réseaux de contacts, parce qu’on en partagerait tous les jours ces temps-ci, mais celui-ci a été beaucoup partagé. On a été surpris de notre côté parce que la seule fois où j’ai rencontré madame Blanchette Vézina, c’était au début de la campagne électorale. »

Maïté Blanchette Vézina (Photo: Facebook-Maïté Blanchette Vézina députée)

Plus ouverte

« Elle s’était montrée plus ouverte à nos revendications par rapport au contrôle des loyers du marché privé qu’à nos revendications pour des réinvestissements dans le logement social. Déjà, j’avais l’impression qu’on aurait une oreille plus attentive de sa part, de ce côté-là. Mais depuis son élection, on n’a pas rencontré madame Blanchette Vézina. On ne l’a pas vue. J’ai rencontré son attachée politique une fois, qui est venue avec une approche disant « quels sont les problèmes? Que peut-on y faire? ». Nous n’avions pas eu de nouvelles depuis ce temps ni vu d’action, surtout », relate monsieur Cadieux.

Substantiel au lieur d’une réforme mineure

« J’ose espérer que si on n’en entend pas parler, c’est parce qu’on est actif dans les coulisses. Si c’est le cas, j’espère qu’il y aura quelque chose de substantiel. J’espère qu’on n’aura pas une réforme mineure, comme celle du Tribunal du logement en 2019. On a attendu longtemps des changements législatifs, puis dans le fond, on a changé trois quatre noms, trois quatre lignes de procédures, puis on a eu que des changements cosmétiques. J’espère que la chose dont on parle, ce sera quelque chose de plus solide et de plus sérieux », commente Alexandre Cadieux.

Un gel de loyers

Ce dernier exprime les principaux souhaits des organismes de défense des locataires comme le sien, précisant que dans le fond, les solutions sont déjà présentes et n’ont besoin que d’être appliquées plus rigoureusement.

« Au sein du regroupement des comités logement et des associations de locataires du Québec, on est d’accord pour un gel des loyers temporaire. Le temps de se donner le temps de réagir et de mettre en place un système de contrôle des loyers qui fonctionne mieux que celui qu’on a en ce moment. Parce que celui-là, on est en train de l’échapper « ben raide »! Le parc de logements qui restait passablement accessible dans certains coins du Québec comme le Bas-Saint-Laurent il y a quatre ans, on est en train de le perdre et on ne le reverra pas. »

Existent déjà

« Pour le plus long terme, c’est simple : il faut rendre obligatoires les mesures de contrôle de loyers qui existent déjà. Il y a plein de choses pour les améliorer. La première chose, ce serait qu’il existe des règles, il existe des taux qui sont publiés annuellement par le TAL. Il s’agit de les rendre obligatoires, ces taux. »

Ça pourrait être une combinaison de nouveau et de règles appliquées différemment?

« Bien sûr. Il existe plein de scénarios, mais le plus simple peut se faire à partir de ce qu’on a. Ce qui arrive présentement, c’est qu’en janvier, le TAL publie ses chiffres : les propriétaires devraient augmenter de tant ou de tant. Mais le Tribunal ne fait rien en réalité. Il ne fait que publier des chiffres sur son site Internet et il attend que les choses se passent. Les propriétaires déposent leur proposition. Ils peuvent se limiter à la proposition ou « s’essayer », juste pour voir ce que les locataires vont dire. »

Le fardeau

« Le problème est que le fardeau de la contestation est sur le dos des locataires parce que c’est à eux de dire non. Ce qui se produit alors est que le locataire qui s’oppose peut se faire harceler par son propriétaire, qui va forcément savoir. Les preuves qui vont être demandées vont être les comptes de taxes, les factures des travaux, du déneigeur, etc. Ce sont des documents qui sont dans les mains du propriétaire. S’il y a une faiblesse, c’est que sans contestation du locataire, il n’y a pas de contrôle », estime Alexandre Cadieux.

Inverser la « patente »

« Ce qu’on propose, c’est donc d’inverser la ‘’patente’’. On garde les mêmes taux et donc, légalement, les augmentations permises aux propriétaires ne baissent pas d’une cenne, mais avec un taux de base. Tous les propriétaires auraient droit à ce taux de base, mais il y aurait des situations où on prendrait des aspects particuliers en considération. Par exemple, si on habite dans un endroit où les taxes ont augmenté beaucoup ou si des travaux ont bien été réalisés, mais à la satisfaction de tous. Si la demande est en règle, la hausse est justifiée », assure-t-il.

Trop de hausses

« Il y a beaucoup de hausses de loyer trop importantes qui sont acceptées à Rimouski, tout simplement parce que les mesures ne sont pas obligatoires. Il y a des locataires qui les acceptent, parce que rien n’oblige à ne pas les accepter, soit par peur de représailles, soit par peur de harcèlement soit d’être fiché parce qu’on a déjà contesté une hausse de loyer. Il y a également des hausses abusives qui se faufilent entre deux locataires. Les contrôles ne sont pas obligatoires. C’est le premier mécanisme qu’on propose: de rendre les taux obligatoires », décrit monsieur Cadieux.

Un registre national

« Le second est un registre public des loyers, un document, une banque d’information à l’échelle nationale où on rentrerait en détail le nombre et le lieu des logements, leurs prix. Les propriétaires sont déjà obligés de rendre publiques certaines informations. C’est minime ce que ça demanderait comme effort et comme frais. Enfin, on demande encore et toujours le financement pour des logements publics, une nécessité. On demande au gouvernement d’avoir une vision politique et de financer un projet politique. Ce n’est pas si compliqué. Ce qu’on demande, c’est la base de la base », conclut cet intervenant communautaire.

Propriétaires

Du côté des propriétaires, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) a aussi émis ses commentaires sur le renouveau proposé par le gouvernement de François Legault.

«  La CORPIQ constate une volonté de ses membres de revoir la méthode de calcul et de fixation des loyers afin d’obtenir une meilleure assistance dans la rénovation du parc locatif vieillissant, et réduire les irritants tels que, la section G lors du départ d’un locataire et le dépôt de garantie pour réduire les risques lors du déménagement, tant pour le locataire que le locateur. »

« Le Québec doit impérativement revoir les règles du jeu pour maintenir l’intérêt à gérer un parc locatif et s’y investir à long terme », a indiqué Marc-André Plante, directeur, Affaires publiques et Relations gouvernementales de la CORPIQ.

Facebook Twitter Reddit