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Anticosti achetée en une nuit, il y a 50 ans, en avril 1974

Une nuit historique où Robert Bourassa a changé le destin de l'île
L’ex-premier ministre du Canada, Pierre-Elliott Trudeau en compagnie de son homologue du Québec, Robert Bourassa. (Photo Facebook Musée de la Neufve-France)

De nombreux récits, mythes, et légendes marquent la riche histoire de la plus grande île du Saint-Laurent, Anticosti, mais de savoir que l’île a failli passer aux mains d’Ottawa est un chapitre encore peu connu.

Ce 23 avril 2024, marquera le 50e anniversaire de l’achat de l’île par le gouvernement du Québec.

Dans cette nuit historique de 1974, l’ancien premier ministre Robert Bourassa, prenait la décision de renverser le désir du gouvernement fédéral, d’en faire un grand parc, ce qui aurait changé totalement le destin de l’île.

« La nuit où Québec a empêché Ottawa d’acheter l’île d’Anticosti. De nouvelles informations témoignent du bras de fer entre Jean Chrétien et Robert Bourassa en 1974, avec Pierre Elliott Trudeau et Paul Desmarais comme acteurs centraux », titrait Alec Castonguay, dans l’Actualité d’octobre 2019.

Des informations rapportées par Marie Grégoire et Pierre Gince, dans le livre « Robert Bourassa et nous — 45 regards sur l’homme et son héritage politique (Éditions de l’Homme).

Leur ouvrage contient un passage de cette saga, racontée par Jean Chrétien lui-même.

« Le bon coup de Bourassa »

L’auteur et journaliste Mathieu-Robert Sauvé, fait état de cette histoire dans son ouvrage : « Anticosti, 450 millions d’années de vie », édité quelques semaines après la reconnaissance de l’île au patrimoine mondial de l’UNESCO, dans le chapitre : « Le bon coup de Bourassa ».

L’auteur Mathieu-Robert Sauvé (Photo courtoisie)

En entrevue cette semaine à « Rendez-Vous Nature », Mathieu-Robert Sauvé relate qu’Ottawa a passé a à un cheveu qu’Ottawa mette la main sur Anticosti. C’est sur les berges de la rivière Jupiter que tout a commencé au début des années 1970.

Anticosti appartenait alors à la Consolidated Bathurst, du président de Power Corporation, Paul Desmarais.

Ce dernier confie à l’ex-ministre responsable des parcs nationaux et ancien premier ministre du Canada, Jean Chrétien, de son désir de se départir d’Anticosti. Le politicien manifeste un intérêt certain.

Deux ans plus tard, prévenu par Jean Chrétien de l’achat imminent d’Anticosti par Ottawa, en pleine nuit, Robert Bourassa fait exproprier l’île. Des négociations s’en suivent entre Québec et Ottawa.

L’affaire est conclue pour près de 22 M$.

Guy Chevrette se souvient!

Le 23 avril 1974, il y a 50 ans, Anticosti devenait la propriété de tous les Québécois.

Le Roi de France concéda d’abord Anticosti à l’explorateur Louis Joliet en 1680. Puis l’île a connu une succession de propriétaires jusqu’au plus connu, Henri Menier, en 1895, qui en fait son domaine privé de chasse et de pêche.

La papetière Consolidated Bathurst achète l’île en 1932, puis la vend in extremis au Gouvernement du Québec le 23 avril 1974.

Le péquiste René Lévesque prend le pouvoir en 1976 et en 1982, il nomme Guy Chevrette ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et lui confie Anticosti, qui entre 1974 et 1982, est sur pause. Québec vient d’abolir, 1978, quelque 1 200 clubs privés de chasse et de pêche. 

Tout est à faire

En entrevue à « Rendez-Vous Nature », Guy Chevrette se remémore son arrivée sur l’île où tout est à faire. Même que le seul village, Port-Menier, n’est pas encore une municipalité, et le sera en 1982. Le premier conseil municipal est assermenté le 31 janvier 1984.

Guy Chevrette divise le territoire faunique de l’Est de l’île, pour y loger des pourvoyeurs. Dans l’Ouest, à 30 minutes de Port-Menier, la pourvoirie du Lac Geneviève est fondée en 1982 et appartient à des membres résidents de Port-Menier.

Le saumon évolue dans les plus belles rivières salmonicoles au monde, dont la Jupiter. Guy Chevrette est inquiet du trop grand nombre de prises au quotidien, et par saison.

Il instaure les étiquettes bleues au permis de pêche, qui limitent les captures. Le souci de préserver le territoire, conduit à la création du Parc national d’Anticosti, de 600 km2, qui devient une pouponnière de cerfs qui alimentent ensuite les territoires limitrophes. 

L’ex-ministre du Parti Québécois, Guy Chevrette (Photo courtoisie)

En 1980 surgit l’idée d’aménager de vastes « exclos » de 5 à 30 km2, pour créer des réserves de nourriture pour les cervidés, qui pendant la repousse sont exclus de ces grands parcs clôturés.

Création de la SÉPAQ

En 1984, le ministre-péquiste Guy Chevrette, pilote la création de la Société des établissements de plein air du Québec, qui devient officiellement la SÉPAQ en mars 1985, qui gère et développe les deux tiers des activités de chasse, de pêche et de villégiature sur Anticosti.

Notons que SÉPAQ-Anticosti fournit de l’emploi à 200 personnes, accueille 3 850 chasseurs de cerfs, 1 500 villégiateurs-pêcheurs. Difficile de faire mieux.

Preuve qu’Anticosti est entre de très bonnes mains. À sa création en 1985, SÉPAQ-Anticosti accueillait 1 600 visiteurs de toute nature; chasseurs, pêcheurs et amateurs de plein air.

Cet été, SÉPAQ-Anticosti va tenir différentes activités pour commémorer ce 50e anniversaire historique.

On peut entendre ou réentendre ces entrevues en cliquant sur les liens ci-dessus.

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