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Lettre ouverte

Quand le sport amène tristesse et anxiété

Lettre ouverte de Jonathan Proulx de Saint-Narcisse
L’équipe de volleyball féminine de l’Est-du-Québec aux Jeux du Québec 2023 à Rimouski. (Photo journallesoir.ca- Alain Tremblay)

Le sport. J’ai pleuré à la suite d’une discussion avec ma fille. Ma belle grande ado de 15 ans, le cœur grand comme l’univers, mais tellement sensible. Pendant trois jours, elle a tenté de défendre une place dans une équipe sportive.

Malheureusement pendant ces trois jours, elle a désespéré, s’est découragée et s’est épuisée. Pourquoi ? Parce qu’on lui dit que si elle est sélectionnée dans une équipe, elle recevra un courriel.

Si elle n’est pas prise, elle doit venir défendre sa place de nouveau le lendemain pour une équipe moins forte. Et ainsi de suite.

Pendant trois jours, elle a attendu et espéré le courriel du lendemain. Pendant trois jours, elle s’est inquiétée, a tenté de performer à nouveau le soir jusqu’à tard, avec le stress et la fatigue qui s’installent à chaque fois…

Elle n’écoute plus en classe, car elle contacte ses parents pour savoir s’ils ont eu le fameux courriel. Elle contacte ses amies, anciennes coéquipières, pour savoir si elles ont été prises. Elle a bâillé de s’être couchée tard pour revenir le soir en pleurs.

Pourquoi faire subir cela à nos ados ?

Pourquoi leur faire vivre un sentiment d’infériorité, d’incompétence, de comparaison face aux autres sélectionnées qui sont « meilleures » ? Meilleures que quoi, au fond ?

Toi, tu crois gagner tous les matchs parce que tu penses avoir fait la meilleure sélection ? Avons-nous oublié la base du jeu, d’un sport ? J’ai vu ma fille sortir fière de sa performance, avec de la magie dans les yeux un soir, et le lendemain attendre ce fameux courriel en vain.

Elle devait recommencer le processus à nouveau…

Avec de moins bons joueurs

Refaire pour une troisième fois les exercices pour revenir à la maison, cette fois-ci en pleurs, en espérant ne pas être sélectionnée parmi les dernières.

Pourquoi pleurer par peur d’être dans un groupe, une équipe de moins bons joueurs ? Parce que c’est ça qui est enseigné. Parce que oui, la façon de faire démontre que si tu n’es pas un, tu es deux, et si tu n’es pas deux, tu seras peut-être trois, et ainsi de suite.

J’ai pleuré. J’étais dévastée de voir ma fille si motivée de retourner à l’école pour faire le sport qu’elle aime, mais tellement triste et fatiguée qu’elle n’était même pas capable de manger, à attendre ce courriel encore une fois.

(Photo journallesoir.ca- Alain Tremblay)

Pourquoi ne pas encourager l’esprit d’équipe, la persévérance… Pourquoi prôner la performance, la grandeur, la vitesse ?

Il y a 24 ans, j’étais sélectionné pour les Jeux du Québec, non pas pour mon talent, ni pour ma grandeur. J’ai été sélectionné pour mon esprit sportif, ma persévérance à vouloir m’améliorer.

Même si j’écris ces mots, tout le monde oublie une chose… Les ados ne veulent que s’amuser.

L’estime de nos jeunes

Chacun d’eux mérite de célébrer une victoire, même s’il n’a pas marqué le but ou le point gagnant. Chacun d’eux mérite les encouragements positifs des entraîneurs et la confiance. Chaque enfant mérite de jouer et surtout, de le faire dans un système qui les élève et non qui les rabaisse.

Je n’accepterai plus jamais de voir ma fille pleurer par peur de ne pas être dans une équipe, de perdre des amis, des coéquipières. Je n’accepterai plus un système qui brise l’estime de nos jeunes.

Aujourd’hui, j’ai compris l’importance du jeu, encore plus au féminin.

(Photo journallesoir.ca- Alain Tremblay)

C’est très difficile de faire bouger nos ados, nos filles particulièrement, mais c’est facile de les démotiver, de les décourager… de les abandonner.

Ce n’est pas contre les écoles ou les programmes sportifs. Quand le temps d’entraînement dans les gymnases dictent le nombre d’équipes possibles, c’est bien malheureux.

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