« Marto et ses Ti-pauvres » : collecte menacée pour des mots
« Rapport de domination » et « stigmates » selon les signataires d'une lettreAvec neuf autres signataires du Bas-Saint-Laurent, l’organisme Action populaire Rimouski-Neigette pourrait faire dérailler la collecte de Noël « Marto et ses Ti-pauvres », qui amasse jusqu’à 200 000 $ en denrées par année, puisque des mots dans son appellation officielle s’avéreraient blessant
s et contribueraient à véhiculer des préjugés envers les personnes moins nanties.
Initiée en 2002 dans la région de Québec par l’animateur radiophonique Martin Castonguay, alias Marto Napoli, la campagne s’adresse aux enfants défavorisés pour leur procurer des friandises, des vêtements et des jouets remis à de nombreux organismes de charité.
Or, des membres du Comité de lutte contre les préjugés du Bas-Saint-Laurent, dont fait partie Action populaire Rimouski-Neigette, invitent monsieur Castonguay à changer le nom de sa collecte dans une lettre envoyée en septembre dernier et rendue publique sur Facebook.
Selon ce comité, le déterminant « ses » n’est pas adéquat lorsqu’il est question d’individus « avec qui nous avons aucun lien de parenté ou de proximité ». Il s’agirait d’un « rapport de domination ».
Le préfixe « Ti » est considéré réducteur dans le langage québécois, alors que le mot « Pauvres » ne respecterait pas la dignité des personnes démunies et serait porteur de « beaucoup de stigmates ».
Discussion constructive
« L’événement organisé par Marto Napoli est très positif, mais on a envoyé une lettre privée à Marto Napoli lui suggérant qu’on ait une discussion constructive pour revoir le nom. C’est l’évolution des mots. Pour les gens qui reçoivent des dons, c’est extrêmement difficile pour eux de vivre les situations qu’ils vivent dans la vie. Je pense qu’on pourrait sensibiliser la population à la réalité des préjugés liés à la pauvreté », croit le coordonnateur d’Action populaire Rimouski-Neigette, Michel Dubé.
Il donne l’exemple d’un autre événement en Mauricie, « Le Noël du pauvre », qui après 65 années de collecte, a changé l’appellation de son événement pour « Le Noël du coeur ».
« À l’ancien bâtiment de Moisson Rimouski-Neigette, les personnes devaient aussi faire la file dehors dans un lieu achalandé. C’était facile de stigmatiser les personnes qui recevaient des denrées à l’extérieur. Le déménagement devenait nécessaire pour s’assurer de protéger leur intégrité » soutient Michel Dubé.
Parmi les 10 signataires, trois sont des employés du Centre intégré de santé et de services sociaux du Bas-Saint-Laurent.
Motivation retrouvée
S’il affirmait sur sa page Faceboon qu’il arrêterait la collecte, « parce qu’on a changé le nom des Indians, on a changé le nom des Red Skins et là, on veut changer le nom de Marto et ses Ti-Pauvres », Martin Castonguay a affirmé vendredi, à Radio-Canada, être motivé par la marée de sympathies reçue sur les réseaux sociaux.
« Le vent a tourné. Et si on faisait la plus grosse collecte du siècle? Hier, je t’aurais dit non. Là, j’y pense beaucoup », a-t-il affirmé.