Dans les geôles de Poutine

En Russie, la répression des citoyens qui s’opposent au régime du président Vladimir Poutine s’avère terrifiante. Alyosha Deminn, qui a vécu personnellement un enfer de 120 jours, présente un témoignage atroce et bouleversant dans le livre « Dans les geôles de Poutine ».

Celle-ci s’est fait capturer par la police russe, le 23 janvier 2021, lors d’une manifestation contre l’emprisonnement de l’opposant politique Alexeï Navalny.

À travers la Russie, 3000 manifestants avaient été arrêtés ce jour-là.

Comme c’était la deuxième fois qu’Alyosha Deminn se faisait prendre dans une manif, la dictature russe n’a pas hésité à la punir sévèrement. Après un procès bidon, en mars, elle a été amenée en prison. Elle avait alors 34 ans.

Cette prison, à Biriouliovo, au sud de Moscou, se trouve dans un bâtiment très standard. On la surnomme le Zagon, qui signifie l’enclos à bétail.

Aucun droit n’est respecté dans ce lieu : pas de visiteurs, pas de soins de santé. L’auteure raconte tout ce qu’elle a enduré : mains attachées avec du fil barbelé, nourriture infecte, punaises, coups de bâton au quotidien, seau d’excréments lancé sur son matelas…

Dans sa petite cellule de cinq mètres carrés, sans chauffage, c’est continuellement soit la lumière, soit l’obscurité, 24 heures par jour.

Elle décrit ses bourreaux comme des monstres capables de faire le mal sans aucun remords.

Alyosha Deminn a vécu la peur, la solitude, l’ennui, la rage. Elle a entendu les cris et les souffrances des autres détenus. Elle a même sombré dans le délire et le désespoir.

Lorsque Alyosha Deminn est sortie de prison, mal-en-point, des gens ont réussi à la conduire en Allemagne, où elle s’est fait soigner.

Dénoncer le régime Poutine

Elle tenait ensuite à raconter son supplice dans un livre, et surtout, à dénoncer le régime épouvantable que Poutine a élaboré au fil des ans.

Vladimir Poutine, explique-t-elle, a quand même été apprécié dans les années 1990 parce qu’il avait réussi à mettre fin au drame économique survenu lors du délabrement de l’URSS.

Mais en devenant de plus en plus autoritaire et intransigeant, Poutine a pris le contrôle total sur le destin russe. Ses méthodes ressemblent à celles dénoncées par Alex Soljenitsyne, dans L’Archipel du Goulag, durant l’ère soviétique.

Remettre en question les décisions et politiques de Poutine est dangereux. Les gens peuvent être mis sur écoute, perdre leur emploi, recevoir des menaces, être détenus pour un rien.

Avec son entourage, Poutine se débarrasse de tous ceux qui le critiquent, il intimide les journalistes, il empêche les candidats sérieux de se présenter. Il fait passer les opposants pour des fous obsédés qu’il faut réprimer.

Poutine prétend défendre la « grandeur de la Russie » contre la décadence de l’Occident, accusé de mœurs corrompues, de propagande homosexuelle et d’une attitude anti-religieuse.

La propagande du régime Poutine s’étend autant dans les écoles que dans les médias et la littérature.

Guerre en Ukraine

Selon l’auteure, un tiers des citoyens apprécie encore Poutine (les admirateurs), un tiers s’y oppose (les impuissants) et un tiers est déconnecté de la politique (les ignorants).

En février 2022, après le déclenchement de la guerre en Ukraine, il y aurait eu plus de 20 000 arrestations en Russie. Même s’habiller avec des vêtements jaune et bleu, les couleurs de l’Ukraine, pouvait attirer des ennuis.

Alyosha Deminn déplore finalement que les opposants politiques russes ne soient plus autorisés à se rendre en Europe, contrairement aux réfugiés ukrainiens. Tous sont pourtant en faveur de la liberté et de la démocratie.

Dans les geôles de Poutine, par Alyosha Deminn, Albin Michel, 2023, 192 pages.

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