Tarifs douaniers contre le Canada : les démocrates à la rescousse

Au Sénat américain, les démocrates avancent sur une résolution visant à bloquer des tarifs douaniers draconiens visant le Canada, tandis que le président Donald Trump presse les législateurs républicains de continuer à soutenir son programme commercial.

Par Kelly Geraldine Malone- La Presse Canadienne

Le sénateur Tim Kaine prévoit de forcer un vote sur l’utilisation par le chef d’État de la Loi sur les pouvoirs économiques en cas d’urgence internationale (IEEPA) pour déclarer l’état d’urgence concernant le trafic de fentanyl et imposer au Canada des droits de douane dévastateurs.

« Le président a justifié l’imposition de ces droits de douane par une urgence inventée de toutes pièces », a argué le sénateur Kaine mardi.

Les données du gouvernement américain montrent que le volume de fentanyl saisi à la frontière nord est infime. Le rapport annuel d’évaluation des menaces, publié la semaine dernière,mentionne le Mexique, mais pas le Canada dans sa section sur les drogues illicites et le fentanyl.

La loi sur l’état d’urgence sur laquelle s’appuie Donald Trump pour imposer ses droits de douane comprend une disposition permettant à tout sénateur de forcer un vote pour bloquer les pouvoirs d’urgence.

Le vote permettra de déterminer si les sénateurs républicains continuent de soutenir les droits de douane imposés par M. Trump au Canada – des droits qui, selon les sondages, ne sont pas appuyés par la plupart des Américains.

Il n’est pas certain que la résolution soit présentée au Sénat mardi, car le sénateur démocrate Cory Booker a prononcé un discours marathon pour s’opposer aux mesures de l’administration Trump.

Même si elle obtient suffisamment de soutien républicain pour être adoptée au Sénat, la résolution de M. Kaine n’empêchera probablement pas la déclaration d’urgence du président, car il est peu probable qu’elle soit présentée à la Chambre des représentants.

Le premier ministre Mark Carney s’est entretenu mardi avec la présidente mexicaine, Claudia Sheinbaum, avant la date limite pour l’imposition des droits de douane.

Un communiqué du cabinet du premier ministre indique que les deux dirigeants ont eu «une discussion productive sur l’importance de renforcer davantage la relation solide en matière de commerce et d’investissement entre les deux pays au profit de leurs citoyens et citoyennes».

« Par ailleurs, le premier ministre Carney a évoqué son plan visant à lutter contre les mesures commerciales injustifiées prises à l’encontre du Canada, à protéger les travailleurs, les travailleuses et les entreprises au pays, et à bâtir l’économie du Canada, notamment en augmentant le commerce entre le Canada et le Mexique », indique le communiqué.

Des conséquences aussi sur le sol américain

La sénatrice Amy Klobuchar, co-parraine de la résolution, a affirmé que Donald Trump ne devrait pas être autorisé à abuser des pouvoirs d’urgence pour déclencher une guerre commerciale injustifiée avec le Canada.

La sénatrice du Minnesota a rapporté que les droits de douane ont porté un coup dur aux économies des États du Nord, qui entretiennent des échanges commerciaux importants avec le Canada.

«Il s’agit d’une amitié de longue date et d’une relation commerciale incroyable, qui fait partie intégrante de notre chaîne d’approvisionnement», a insisté Mme Klobuchar.

Elle a ajouté que l’accord Canada-États-Unis-Mexique, négocié sous la première administration Trump, était le cadre idéal pour les négociations commerciales.

Plus tôt ce mois-ci, le locataire de la Maison-Blanche a imposé au Canada et au Mexique des droits de douane généralisés de 25 %, ainsi qu’une taxe plus faible de 10 % sur l’énergie canadienne. Il a ensuite suspendu partiellement ces droits quelques jours plus tard. M. Trump avait alors déclaré que cette suspension durerait jusqu’au 2 avril.

Signe inquiétant pour les responsables canadiens, qui attendent avec anxiété le retour de ces droits dévastateurs mercredi, Donald Trump a écrit mardi sur les réseaux sociaux pour exhorter les républicains à voter contre la résolution.

« Le sénateur Tim Kaine, qui s’est présenté contre moi avec Hillary la malhonnête en 2016, tente de mettre fin à nos droits de douane cruciaux sur le fentanyl mortel en provenance du Canada, a déclaré M. Trump. Nous progressons pour mettre fin à cette terrible crise du fentanyl, mais les républicains du Sénat doivent voter pour le maintien de l’état d’urgence nationale afin que nous puissions achever le travail et mettre fin à ce fléau. »

Réorganiser le commerce mondial

Un responsable de la Maison-Blanche a confirmé lundi qu’aucune décision n’avait été prise quant au rétablissement éventuel de droits de douane supplémentaires sur le Canada et le Mexique.

Interrogée mardi sur les droits de douane, la porte-parole Karoline Leavitt a déclaré: « Je laisserai le président s’exprimer sur les détails des droits de douane. »

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump a secoué les marchés mondiaux avec sa guerre commerciale intermittente.

Le président américain doit présenter ses plans de réorganisation du commerce mondial par le biais de droits de douane « réciproques » mercredi à 16 h, dans la roseraie de la résidence présidentielle.

Un communiqué de presse de la Maison-Blanche a baptisé l’événement « Make America Wealthy Again » (rendre l’Amérique riche à nouveau).

M. Trump a qualifié la journée de mercredi de «Jour de la Libération» et a annoncé qu’il imposerait des droits de douane « réciproques » en augmentant les droits de douane américains pour qu’ils correspondent aux taux de taxation appliqués par d’autres pays sur les importations.

On ignore encore quelles pourraient être les conséquences de ces nouvelles taxes pour le Canada.

Mme Leavitt a précisé que le président se concentrait sur la «relance de notre économie mondiale pour s’assurer que l’Amérique redevienne  la superpuissance manufacturière du monde». Elle a ajouté que, selon elle, les droits réciproques entreraient en vigueur immédiatement.

Jeudi, M. Trump commencera également à collecter des droits de douane de 25 % sur les automobiles. Le responsable de la Maison-Blanche a déclaré que nombre de ces droits s’accumuleront si les droits de douane à l’échelle de l’économie sont rétablis.