Quand les bonnes intentions ne suffisent pas
Opinion de Robel Lebel
Le monde des affaires n’a rien d’une promenade de santé. Combien de personnes honnêtes, de bonne foi, se sont retrouvées entraînées dans des aventures économiques ambitieuses, pleines de promesses, pour finalement s’y brûler les ailes ?
Opinion de Robin Lebel
Le Groupe immobilier Tanguay a déposé une poursuite civile de près de 5 M$ contre la Ville de Rimouski, la MRC de Rimouski-Neigette, 14 ex-membres du conseil d’administration de l’ex-Société de promotion économique de Rimouski (SOPER) et BDO Canada Limitée, en tant que syndic à la faillite de la SOPER.
Selon les informations dévoilées par Radio-Canada, l’entreprise allègue avoir subi un dommage de 4 950 000 $, surtout qu’elle s’est chargée de la construction de l’immeuble du Novarium, inauguré en août 2022.
Le Groupe immobilier Tanguay prétend « avoir été piégé » dans ce projet pour lequel il aurait reçu l’assurance qu’il n’y avait aucun autre risque que celui de la construction du bâtiment.
L’idée initiale de la SOPER semblait brillante, visionnaire même, et portait l’espoir de toute une région. Malheureusement, ce projet d’envergure a été confié à un homme, reconnaissons-le, sincère peut-être, mais cruellement naïf. Je m’abstiens volontairement de nommer qui que ce soit. L’enjeu ici, c’est le modèle d’affaires, plus que l’individu.
Prenons un peu de recul. Un groupe de politiciens a mis sur pied une petite structure avec un objectif clair : ouvrir un marché encore inexistant, développer un écosystème prometteur.
L’idée était si séduisante que plusieurs figures respectées de la région ont embarqué dans l’aventure, siégeant même au conseil d’administration de l’entreprise.

Devant un tel élan, une grande entreprise, solidement implantée dans la région, a investi massivement, convaincue du potentiel du projet. Des millions ont été injectés, avec espoir et confiance.
Mais rapidement, le rêve a commencé à s’effriter. Le sable s’est glissé dans l’engrenage. Le dirigeant, malgré toute sa bonne volonté, n’avait ni les compétences en gestion ni les réflexes commerciaux nécessaires. Il ne savait ni vendre, ni calculer, ni même reconnaître les signaux d’alerte.
Un paquebot avec les moyens d’une chaloupe
L’entreprise, encore inconnue du grand public, s’est alors lancée dans une quête effrénée de notoriété, multipliant les dépenses sans retour concret. Les résultats espérés ne sont jamais venus.
En revanche, les factures, elles, se sont empilées. Des sommes importantes ont été englouties. Le principal bailleur de fonds, le gouvernement, s’est retiré. Et, d’un coup, le projet s’est échoué, mis en cale sèche avant même d’avoir pris la mer.
Les premiers à sentir le vent tourner ont quitté le navire discrètement, laissant derrière eux un équipage de secours bien intentionné, mais impuissant. Le constat est cruel. On a voulu construire un paquebot avec les moyens d’une chaloupe.
Cette situation n’est pas sans rappeler l’histoire d’un ami, dans ma jeunesse, qui avait tout investi dans une bâtisse commerciale, rénové de fond en comble… pour finalement faire faillite avant même l’ouverture.
Et aujourd’hui, c’est le projet Novarium qui semble répéter les mêmes erreurs. Une nouvelle aventure, portée là encore par des gens de bonne volonté, mais qui donne l’impression que l’on a mis la charrue avant les bœufs.

Ce qu’il y a de plus désolant dans tout cela ? C’est de voir que les personnes actuellement impliquées sont des gens estimés, reconnus pour leur engagement et leur intégrité.
Et pourtant, ce sont eux qu’on voit aujourd’hui monter sur le ring, contraints de se battre pour sauver leur chemise et parfois leur réputation. Il n’y a pas de méchant dans cette histoire. Juste des rêves mal ficelés, des ambitions mal encadrées, et un optimisme qui s’est heurté à la dure réalité des chiffres.
Rêveur mal préparé
Ce feuilleton aux airs de tragédie moderne n’en finit plus de finir. Il laissera des traces durables, tant dans les finances publiques que dans les mémoires.
Et pendant ce temps, celui qu’on qualifie ici de « beau parleur » aura fait le tour du monde en première classe, sans jamais rapporter un seul sou à la collectivité. Un opportuniste plus intéressé par son confort que par le destin du projet, croyant naïvement que tout lui était dû.
Non, ce n’était pas un homme d’affaires. C’était un rêveur mal préparé, emporté par une ambition mal maîtrisée. Et malheureusement, ce sont les autres qui en paient aujourd’hui le prix.
Une triste histoire qui n’en finit plus de finir. Ce dossier laissera des traces pour longtemps pendant que le beau parleur aura fait le tour du monde en première classe sans nous rapporter le moindre sou.
Une histoire où un opportuniste n’a fait rien d’autre que se la couler douce en croyant qui tout lui tomberait du ciel. Il n’avait rien d’un homme d’affaires celui-là, c’est le moins que l’on puisse dire.