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Un roman refait surface après 160 ans

Portant sur l’ermite de l’île Saint-Barnabé, Toussaint Cartier 
Le roman Toussaint Cartier ou l’ermite de l’île Saint-Barnabé, publié d’après un manuscrit qui a été écrit il y a plus de 150 ans. (Crédit Photo : Johanne Fournier)

Un manuscrit vieux de près de 160 ans vient d’être publié pour la première fois. Le roman Toussaint Cartier ou l’ermite de l’île Saint-Barnabé, écrit en 1867 par Louis-Édouard Bois, sort de l’ombre grâce au travail minutieux du professeur Claude La Charité de l’Université du Québec à Rimouski.

Cette œuvre inédite, demeurée manuscrite pendant plus d’un siècle et demi, bénéficie aujourd’hui d’une édition critique publiée dans la collection L’archive littéraire au Québec des Presses de l’Université Laval.

Le titulaire de la Chaire de recherche du Canada en histoire littéraire, création et patrimoine imprimé a consacré des mois de recherche à ce projet d’envergure. Le travail d’édition critique de Claude La Charité permet de contextualiser cette œuvre dans l’histoire littéraire québécoise et de la rendre accessible aux lecteurs contemporains.

Le professeur Claude La Charité lors du lancement du livre de Louis-Édouard Bois. (Crédit photo : Johanne Fournier)

Le lancement officiel s’est déroulé le 28 juin à la Maison Lamontagne de Rimouski, en présence d’un public passionné. L’île Saint-Barnabé garde précieusement les secrets de cet homme qui a marqué l’imaginaire collectif du Bas-Saint-Laurent. Toussaint Cartier, ce mystérieux ermite qui a choisi la solitude absolue de 1728 à 1767, refait donc surface grâce à la publication du livre de l’abbé Bois et grâce aux recherches du professeur Claude La Charité.

Mystère éclaircit

Pendant des siècles, l’histoire de cet homme solitaire a alimenté romans, légendes et même inspiré la microbrasserie Le Bien Le Malt de Rimouski. Mais, qui était vraiment Toussaint Cartier? Après avoir épluché pas moins de 20 000 pages d’archives bretonnes, le chercheur rimouskois a percé une partie du mystère.

La vérité est à la fois plus simple et plus touchante que la légende: Toussaint Cartier était un pêcheur de morue ordinaire, originaire de Saint-Quay, près de Saint-Brieuc, en Bretagne. Un homme marqué par la tragédie, puisque ses parents et plusieurs de ses frères et sœurs meurent alors qu’il est encore jeune, qui trouve refuge dans la solitude de l’île Saint-Barnabé.

Nom trompeur

Contrairement à ce qu’avance l’abbé Bois dans son roman, notre ermite n’était pas le descendant du célèbre explorateur Jacques Cartier. Son père, qui portait le même nom, était lui aussi un simple pêcheur breton.

« C’est sans doute de là que vient la confusion », explique le professeur de lettres, qui a patiemment démêlé le vrai du faux dans cette histoire vieille de près de trois siècles.

L’installation de Toussaint Cartier sur l’île Saint-Barnabé en 1728 ne relevait probablement pas uniquement d’une quête spirituelle. À 35 ans, déjà affaibli par des problèmes de santé qui l’avaient forcé à abandonner des expéditions de pêche, il obtient l’autorisation du seigneur René Lepage de s’établir sur l’île.

« Le seigneur Lepage avait vraisemblablement confié à Toussaint la tâche de s’occuper d’une pêche à la fascine », suggère l’universitaire. Une mission parfaite pour cet ancien marin qui connaissait les caprices de la mer et les secrets de la pêche.

Trois versions, trois époques

L’histoire de Toussaint Cartier a été réinventée selon les besoins de chaque époque. En 1769, Frances Brooke en fait un veuf inconsolable attendant la mort pour retrouver sa bien-aimée naufragée.

Près de 100 ans plus tard, Louis-Édouard Bois le transforme en modèle de piété catholique. Cette version de l’ecclésiastique n’était probablement pas innocente puisque, à cette époque, Rimouski briguait le statut de siège épiscopal. Puis, en 1978, Jacques Poulin offre une interprétation plus moderne: celle d’un homme simplement séduit par la beauté mystérieuse de l’île.

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