Est-du-Québec : moins de saumons et de pêcheurs
Saison 2025 encore difficile dans plusieurs rivières
La saison de la pêche du saumon est loin d’avoir été à la hauteur des attentes dans l’Est-du-Québec. À la ZEC Saumon Rimouski, son directeur général, Jean-François Desgagnés, déplore le peu de pêcheurs qui se sont rendus à la rivière.
« Il y a une nette diminution de l’achalandage même si les conditions d’eau étaient idéales. On peut facilement parler d’une baisse d’au moins 50 %. C’est certain que la remise à l’eau obligatoire en a découragé plusieurs. C’est inquiétant puisque le financement de nos ZEC repose sur le principe d’utilisateur-payeur. Ça ne nous aide pas à remplir notre mission », estime monsieur Desgagnés.
La baisse de stock de grands saumons est la raison de l’obligation de remise à l’eau a été instaurée cette année. Le directeur de la ZEC confirme que c’est ce qu’il fallait faire, mais n’empêche que cette obligation amène inévitablement une baisse de l’achalandage.
« Les pêcheurs qui auraient souhaité garder un saumon ont tout simplement décidé d’accrocher leur canne pour la saison. »
Sur une note plus positive, Jean-François Desgagnés se réjouit de la hausse des madeleineaux qui reviennent dans la rivière, ce qui n’avait pas été constaté depuis deux ans. L’espoir est donc présent pour la saison prochaine. « Par contre, au niveau des grands saumons, c’est assez dramatique, mais on s’y attendait. C’est comme ça un peu partout. »
Quant à la montaison, on parle de 285 poissons, ce qui est une augmentation par rapport à l’an dernier où l’on avait environ 130 poissons en fin de saison.
« On peut donc s’attendre à atteindre le chiffre de 400, ce qui est déjà mieux, mais quand même en dessous de ce que nous observons habituellement, soit de 600 à 700 poissons », ajoute Jean-François Desgagnés.
Baisse en moyenne de 60 %
La Société de gestion des rivières de Gaspé confirme aussi ce que les pêcheurs ont pu observer jusqu’ici : le saumon se fait très discret cette année.
Les grands saumons sont en baisse en moyenne de 60 % comparativement à l’an dernier sur les rivières Dartmouth, York et Saint-Jean, selon le décompte de mi-saison effectué à la fin du mois de juillet. Le nombre de pêcheurs a quant à lui diminué de 45 % jusqu’ici.
« C’est certain que c’est une mauvaise année », résume Jean Roy, directeur général par intérim de l’organisation sans but lucratif.
La saison 2024 était déjà passée à l’histoire comme particulièrement mauvaise. À titre d’exemple, au chapitre des montaisons, ce sont 708 saumons adultes qui ont été comptabilisés l’an dernier sur la rivière Saint-Jean, selon le bilan annuel du ministère de la Faune. La moyenne des 5 dernières années était de 1226.

Le décompte de mi-saison est de son côté de 590 (grands saumons et madeleineaux). Il ne devrait pas significativement augmenter. Par expérience, la Société de gestion des rivières de Gaspé note qu’environ 85 % des montaisons sont déjà effectuées au moment du relevé de mi-saison. Les grands saumons sont pratiquement tous arrivés ; ne reste que quelques plus petits à remonter la rivière.
Les chiffres sont similaires ailleurs. Sur la York, seulement 785 saumons adultes ont été répertoriés l’an dernier. Il s’agissait du deuxième pire bilan en 26 ans. La moyenne des 5 dernières années était plutôt de 1823. Cette année, le décompte de mi-saison s’est arrêté à 519.
Lueur au bout du tunnel
Point positif cependant, plusieurs madeleineaux sont observés (communément appelés des grilses, de leur appellation anglophone). Ceux-ci deviennent matures sexuellement après seulement un an et représentent habituellement 25 % des montaisons.
Leur nombre est habituellement synonyme de bon augure pour l’année suivante. Fin juillet, la rivière Saint-Jean en comptait 395, la Dartmouth 309 et la York, 281.
« Ça veut dire que la famille est bien nombreuse en mer. Tous les scientifiques s’entendent pour dire que c’est un indice sur lequel on peut se fier. C’est fiable à 80 %. Le fait qu’il y ait des grilses, il y a un sentiment positif chez les pêcheurs », analyse Jean Roy.

Pour l’instant, la mauvaise saison n’est pas trop alarmante financièrement pour la Société de gestion des rivières de Gaspé, qui compte sur un chiffre d’affaires de 1,7 million dollars sur plus ou moins quatre mois. Ses revenus sont entièrement autonomes.
Heureusement, le pavillon de la rivière Saint-Jean demeure populaire et est resté plein à 100 % pendant toute la saison, ce qui permet à l’organisme de sauver la mise et de maintenir à l’emploi ses 32 salariés.
« On a maintenu tous nos employés au travail, sans couper dans les heures ni le nombre de semaines. Financièrement, on n’a pas d’inquiétude », conclut Jean Roy.
Idem à Matane
Plus à l’ouest, la Société de gestion de la rivière Matane a enregistré 1228 saumons pour son bilan de mi-saison, dont 175 grands saumons.
Le succès de pêche a été très bon du début juillet jusqu’à tout récemment, selon le guide sur la rivière Matane, Jérémi Bouffard. Malheureusement, le débit actuel rend les conditions de pêche plus difficiles.
« L’achalandage est beaucoup moindre que les dernières années. Malgré la période des vacances de la construction, le nombre de pêcheurs a été beaucoup plus faible. »
Pour lui aussi, le futur devrait cependant être prometteur. « Nous ne sommes pas à un retour à la normale, mais c’est encourageant pour les années à venir avec plus de madelineaux que la tendance des 5 dernières années. »
Avec la collaboration de Jean-Philippe Thibault