Le manque de « gardes-chasse » menace la faune
Plus que 325 agents au Québec, alors qu’il en faudrait le double
En plus des restrictions à l’embauche, Québec sacrifie une des deux cohortes de formation de 32 futurs agents en 2026. On ne compte plus que 325 agents, alors qu’il en faudrait le double pour assurer une protection efficace de la faune, et répondre rapidement aux plaintes du public.

Et éviter de « vider » des districts en mobilisant les agents à des opérations anti-braconnage, laissant personne dans les bureaux pour répondre aux dénonciations.
En 2018, le Québec comptait quelque 500 à 600 agents, de six à huit par bureau, à l’année.
« Avec les coupes budgétaires pour éponger le déficit du gouvernement, la fermeture dans le temps de quelque 40 des 68 bureaux, les départs à la retraite et volontaires, c’est de plus en plus difficile de faire notre travail. J’espère que l’autre cohorte ne sera pas éliminée », commente le président du Syndicat des agents de protection de la faune, Martin Perreault.
« Faune en péril »
Les effectifs fondent dans plusieurs régions. Sur la Côte-Nord, de 28 agents en 2013, ils étaient 18 en 2022. En Gaspésie, le bureau de Chandler pourrait compter qu’un seul agent. Le syndicat évoque une possible fermeture complète d’ici un an. À Matagami, dans le Nord-du-Québec, le bureau devrait fermer d’ici janvier 2026.

« Depuis l’annonce, les signalements ont diminué de 30 % dans cette région. La relocalisation de services, comme de Saint-Jérôme vers Saint-Eustache, allonge les temps de déplacements », déplore la Fédération québécoise des chasseurs et des pêcheurs, qui estime que « la faune est en péril et la baisse des effectifs est inquiétante ».
Schefferville et l’île aux cerfs, Anticosti, n’ont plus d’agents.
Trop loin pour arriver à temps
Sur la Basse-Côte-Nord, en début d’année, une plainte en lien avec des caribous forestiers a été portée.
« Les agents les plus proches étaient à Baie-Comeau et à Forestville, de sept à huit heures de route, trop loin pour arriver à temps », tranche Martin Perreault.
Les heures supplémentaires auraient pu aider la cause. « Faut oublier ça. Si une plainte nécessite du surtemps, la demande doit être autorisée par le directeur adjoint, le directeur général et le sous-ministre. Les délais sont trop longs et le temps supplémentaire est coupé au maximun ».

Le ministère affirme qu’un district peut aller prêter main forte.
« Chandler est dans le district de la Gaspésie, qui inclut Chaudière-Appalaches et le Bas-Saint-Laurent. Un agent de Laurier-Station, dans Lotbinière, va aller couvrir une plainte à Chandler ? Voyons donc. Pour répondre aux plaintes, ça prend des agents là où ça se passe », déplore monsieur Perreault.
Ministre qui agit
Année après année, dénonciation après dénonciation, le bateau des agents de protection de la faune ne cesse de couler.
« Ça va nous prendre un ministre, qui va agir en conséquence. On n’a pas de monde pour intervenir et même, on nous demande de ne pas intervenir, comme pour la chasse de nuit de l’orignal dans la réserve Matane, où des chasseurs autochtones sont soupçonnés. Le ministre de la Faune a déclaré que ce n’était pas vrai ce que j’ai dit, mais on m’a ensuite demandé une copie des directives. Voyons, il me traite de menteur et je vais l’aider », ironise le président.

Les « gardes-chasse » composent avec une convention de travail échue depuis avril 2023.
« Là on négocie jusqu’en 2028 », précise Martin Perreault, satisfait de cette prolongation de deux ans. « Quand on signait pour trois ans, on commençait à renégocier le lendemain. Ça n’avait pas d’allure ». Il rencontre le nouveau sous-ministre de la faune bientôt. « Pour savoir où on s’en va ».