Surtaxes de Trump : coup de hache pour Cedrico
Droits de douane totaux atteignent désormais 45 %
Les nouvelles surtaxes américaines de 10 % plongent l’entreprise du sciage bas-laurentienne dans l’incertitude, alors que les droits de douane totaux atteignent désormais 45 %.
Dans la cour des usines de Bois d’œuvre Cedrico de Price et de Causapscal, les billots s’accumulent. Depuis l’annonce de la nouvelle hausse tarifaire américaine sur le bois d’œuvre, le produit trouve moins preneur.
Pour cette entreprise forestière bas-laurentienne en activité depuis près de 50 ans, c’est un véritable coup de hache dans le maintien et le développement de ses activités commerciales.
Depuis le 14 octobre, la Maison-Blanche a imposé des droits de douane additionnels de 10 % sur le bois d’œuvre canadien, portant précisément le total des tarifs à 45,16 % à la frontière américaine.
Un fardeau considérable pour Cedrico, dont 70 % du bois transformé est habituellement vendu aux États-Unis.
En entrevue avec Le Soir, le président et directeur général de Bois d’œuvre Cedrico, Denis Bérubé, affiche un mélange de résignation et d’inquiétude.
Cinquième guerre du bois d’œuvre
Ce conflit commercial, que l’industrie appelle « Lumber 5 », remonte à 2017. Il s’inscrit dans une longue série de différends commerciaux entre le Canada et les États-Unis, la première remontant aux années 1980.
L’industrie américaine du sciage accuse régulièrement les producteurs canadiens de faire du dumping et de bénéficier de subventions gouvernementales qu’elle qualifie d’injustes.
« Les Américains ont fait une plainte comme quoi les Canadiens font du dumping et ils disent qu’on est subventionné pour notre bois », raconte monsieur Bérubé.

Jusqu’en août, Cedrico payait une taxe de 15 % basée sur les données de 2022, une année où les prix du bois avaient grimpé en flèche en raison de la pandémie de COVID-19. Mais, lorsque les autorités américaines ont examiné les chiffres de 2023, année où les prix ont considérablement baissé, elles ont conclu que le dumping canadien s’était intensifié. La taxe a alors bondi à 35 %.
Compétitivité anéantie
Ces tarifs cumulatifs placent l’entreprise dans une position intenable face aux producteurs européens, qui jouissent désormais d’un avantage concurrentiel majeur. Lorsque la taxe était de 27 % lors du conflit précédent, en 2005, les scieurs européens avaient commencé à prendre graduellement des parts du marché nord-américain.
« Les industriels européens n’ont pas eu la taxe de 35 % qu’on avait, souligne l’homme d’affaires. Donc, ça leur fait de la place pour rentrer sur le marché américain. Ils ont un avantage sur les scieurs québécois et canadiens de 35 % ! » Même avec la nouvelle taxe de 10 % qui s’applique aussi aux Européens depuis le 14 octobre, leur avantage demeure substantiel, déplore Denis Bérubé.
Interrogé pour savoir si son entreprise est capable de soutenir une telle pression tarifaire, l’industriel fournit une réponse catégorique : « Non. »

De plus, il observe un ralentissement de la construction aux États-Unis, un affaiblissement de la demande pour le bois canadien et la difficulté à évaluer l’ampleur de la pénétration européenne dans le marché américain.
« On est dans l’inconnu, lâche le chef d’entreprise. Puis, si la construction n’est pas plus forte qu’actuellement, il faudrait que les prix augmentent considérablement pour combler une taxe de 45 %. Donc, on s’attend à avoir des périodes qui ne seront pas faciles dans les prochains mois. »

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