Rimouski collabore pour contrer l’itinérance
Avec le temps froid, la demande risque d’augmenter
Le fondateur et directeur général d’En tout C.A.S., Luc Jobin, salue l’étroite collaboration entre les différents organismes de Rimouski dans le dossier de l’itinérance. Selon lui, le modèle rimouskois permet de trouver rapidement des solutions pour aider les personnes sans abri.
Il cite entre autres l’ouverture du premier centre d’hébergement d’urgence pour les itinérants, le « 95 », à la mi-septembre, sur la rue de l’Évêché Ouest.
Depuis la COVID, le phénomène de l’itinérance a pris de l’ampleur partout en Occident. Autrefois moins visibles, les citoyens côtoient maintenant les itinérants tous les jours.
La pénurie de logements, la flambée des prix, la hausse constante du coût de la vie et les salaires qui ne suivent pas forcent de plus en plus de personnes à vivre dans la rue.
« On a l’image du gars qui se promène avec son panier d’épicerie, mais ça a complètement changé. Au 95, on peut héberger des gens qui travaillent, mais qui n’ont pas d’appartement, des jeunes, des couples. On a maintenant des personnes de 60 ans et plus qui viennent ici. On ne se doutait pas de ça », indique monsieur Jobin.
Depuis l’ouverture du refuge au 95 de la rue Évêché Ouest, de 4 à 10 personnes y séjournent chaque jour pour prendre un repas chaud et passer la nuit.
Contrairement à d’autres centres d’hébergement au Québec, le 95 accepte les personnes intoxiquées par la drogue ou l’alcool, mais interdit la consommation sur place.
Itinérance cachée
Avec le temps froid, la demande risque d’augmenter. Il demeure toutefois très difficile d’avoir un portrait juste de la situation de l’itinérance.
« Ça varie beaucoup. Il y a des gens qui veulent vivre à leur façon, sans aide de personne. Des gens en migration qui s’arrêtent ici en route vers un grand centre. D’autres qui campent dans leur auto ou sur un terrain privé, que les propriétaires tolèrent », raconte Luc Jobin.

Il y a aussi une itinérance cachée, difficile à mesurer. Des gens qui se tournent vers la famille ou des amis pour trouver un toit. Un dénombrement en avril 2024 a recensé une centaine d’itinérants au Bas-Saint-Laurent. Les données du second dénombrement, tenu le printemps dernier, n’ont pas encore été publiées.
Pour le moment, Rimouski évite les problèmes liés à la consommation de drogues dures, comme la xylazine, surnommée la « drogue du zombie » .
« La situation n’est pas rose, mais on s’en sort moins mal qu’ailleurs », soutient monsieur Jobin.
Établir un lien pour déceler les problèmes
Luc Jobin œuvre dans le milieu communautaire depuis 30 ans, alors qu’il était travailleur de rue à Trois-Rivières. Enseignant au Cégep de Rimouski, il a fondé l’organisme En tout C.A.S. à son retour à Rimouski. Pour lui, aider les autres va de soi.
« Créer des contacts, c’est l’humain qui est intéressant. C’est un engagement indéfectible envers ma communauté. » Il cite à ce chapitre l’intellectuel américain Noam Chomsky : penser globalement, agir localement.
Trois travailleurs de rue sont actuellement employés de l’organisme, mais il en faudrait plus. « Le travail de rue, c’est de faire des petits gestes ordinaires que trop peu de gens se donnent la peine de faire. C’est d’entrer en contact avec les gens. Les problèmes, il y en a plein. Le travailleur de rue, c’est un accompagnateur qui dirige vers les services qui existent », stipule monsieur Jobin.

En tout C.A.S. réalise plus de 1 500 interventions par année, principalement auprès des jeunes. L’objectif est de déceler les problèmes avant d’en arriver à l’itinérance.
Dans le dossier de l’itinérance à Rimouski, Luc Jobin salue l’étroite collaboration entre les autorités municipales, le CISSS et les organismes communautaires ce qui permet de voir venir les coups.
« La ville, la santé publique, les policiers et les pompiers. On se parle tout ce monde là. On a développé des alliances, ce qui a permis entre autres la création du 95. La tolérance et l’ouverture des citoyens, face aux gens qui se retrouvent, à la rue, font toute la différence. »

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