« Sit-in » à l’urgence: des infirmières surchargées se livrent
Des patients en soins palliatifs décèdent dans les couloirsAlors que le « sit-in » se poursuit aux urgences de l’Hôpital régional de Rimouski, des infirmières ont bien voulu, sous le couvert de l’anonymat, nous donner le pouls d’un milieu de travail « surchargé » et « inadéquat à la sécurité des usagers ». Leur récit fait état des conséquences d’un taux d’occupation moyen des civières qui atteint 200%. Refusant de se mettre au travail depuis lundi matin, elles nous dressent un portrait inquiétant de la situation.
« Les corridors sont pleins. Il y a des gens qui sont couchés entre les salles de réanimation. Pour être capable d’aller à la toilette, il faut passer entre deux civières », raconte une infirmière.
Présentement, 24 patients en attente d’un lit à l’étage reposent sur des civières aux urgences du centre hospitalier, alors que l’hôpital peut normalement en accueillir 12.
« Souvent, ce sont des personnes âgées. Déjà qu’elles sont en pertes d’autonomie, là on les place dans le corridor, où elles ne sont pas en mesure de recevoir les soins que nécessite leur condition respective. Ces gens restent couchés dans leur civière pendant 24 à 48 heures, parfois même plus longtemps. »
Fin de vie dans les corridors de l’urgence
Révélation des plus choquantes; des patients en soins palliatifs se retrouvent même dans les corridors, selon ce que rapporte une autre infirmière.
« En fin de semaine, on a eu un patient en soins palliatifs qui est resté deux jours sur une civière à l’urgence, avec une famille qui veillait autour. Ce patient-là est mort entre la toilette et la salle d’attente. Les gens passaient à côté de lui et il était décédé. (…) Ce n’est pas la première fois que ça arrive. Ces gens ont été des citoyens actifs, qui ont payé des impôts toute leur vie pour finir morts dans un couloir à côté de la salle d’attente. C’est inhumain. »
Une autre anecdote concernant les mesures protocolaires soulève des questions sur la sécurité à l’urgence de Rimouski.
« Dernièrement, une infirmière s’occupait d’un patient en neutropénie, donc ses globules blancs étaient très bas. Juste à côté, on avait un patient atteint de la COVID, traité par la même infirmière. Je peux bien croire qu’on s’habille en conséquence pour éviter de propager le virus, mais c’est impossible d’être complètement stérilisé dans ces conditions-là. »
En attente d’une réponse
Les syndiqués ont comparu cet après-midi devant le Tribunal administratif du Travail (TA). En attente d’une décision, les infirmiers et infirmières réitèrent que la qualité des soins est au centre des revendications.
« Deux ailes ont été fermées récemment au foyer pour des rénovations et là ils parlent de fermer des lits en chirurgie. On est surchargés et on ne peut plus donner des soins de qualité à nos patients dans de telles conditions. On ne grossit pas l’urgence, on n’augmente pas les ratios ni le personnel, donc on a de plus en plus de pression et ce matin, on s’est dit: c’est assez! »
« Beaucoup de gestionnaires nous appuient dans nos revendications, dont le nôtre, mais ils ont les mains liées. C’est certain qu’on avoir des représailles d’avoir fait le sit-in, mais on est rendu là », ajoute une des infirmières.