Où étaient les femmes?
Opinion de Carol-Ann Kack
Je ne sais pas ce que vous avez pensé de la dernière campagne électorale fédérale, mais pour ma part, je l’ai trouvée d’une platitude affligeante.
Par Carol-Ann Kack
Avec tout le respect que je dois à celles et ceux qui ont le courage de se présenter en politique, le contexte actuel a rendu le spectacle particulièrement terne. Qui, parmi les candidats au poste de premier ministre, aurait réellement les épaules pour tenir tête à Donald Trump?
Selon de nombreux analystes, c’est la question qui préoccupait le plus les électeurs canadiens. À tel point que le taux de participation a atteint son plus haut niveau depuis 1993.
En regardant les débats des chefs, j’ai été frappée, une fois de plus, par l’absence totale de femmes. Une scène que nous avons déjà vue trop souvent. Imaginez un instant un débat des chefs composé uniquement de femmes. Trouvez-vous cela étrange?
Si oui, posez-vous la question : pourquoi ne le serait-ce pas tout autant lorsque seuls des hommes occupent l’espace politique? Il n’y a rien de « normal » à ce que la moitié de la population soit ainsi écartée des lieux de pouvoir. Et pourtant, à force de voir ces images, on finit par s’y habituer.
Moins de candidatures féminines?
Au Québec, la proportion de femmes candidates est en recul : 43% en 2019, 41% en 2021, et seulement 37,9% en 2025. Une bien mince consolation : alors que les femmes représentent à peine 20% des élu·es au parlement canadien, elles forment 30% de la députation fédérale québécoise.
Depuis la décriminalisation de l’avortement en 1988, pas moins de cinquante projets de loi ont été déposés par des députés conservateurs visant à restreindre ce droit.
Le plus récent date de 2023, et 100% des élu·es conservateurs l’ont appuyé. Les mouvements dits « pro-vie » ou « anti-choix » prennent de l’ampleur, y compris au Québec. Le recul des droits des femmes aux États-Unis donne sans aucun doute de l’élan à ces groupes.
Dans ce contexte, la baisse de la représentation féminine lors de la dernière élection m’inquiète profondément. Où étaient les femmes?
Place difficile à prendre
À ce jour, aucune femme n’a été élue première ministre du Canada, à l’exception de Kim Campbell, qui n’a occupé le poste que quelques mois. Le Canada n’occupe que le 70e rang dans le classement mondial de l’Union interparlementaire sur la représentation des femmes. Au Québec, la seule cheffe de gouvernement que nous ayons connue, Pauline Marois, a été victime d’une tentative d’attentat le soir même de son élection. Ce n’est pas anodin. La place des femmes en politique est difficile à prendre, mais aussi à conserver.
Au cours des dernières années, des efforts importants ont été faits par la société civile et les partis politiques pour mieux rejoindre les femmes et les encourager à s’engager en politique. Certaines ont brisé le plafond de verre et ouvert la voie : Pauline Marois, Françoise David, Manon Massé, Dominique Anglade.
Record en 2022
Au scrutin provincial de 2022, un record a été atteint avec 43,2% de candidatures féminines, chiffre dont je faisais moi-même partie. C’est encourageant, mais peut-on parler de mission accomplie? J’aimerais pouvoir le dire, mais je crains que non.
Les vents politiques venus des États-Unis et les menaces qu’ils font peser sur nos droits nous rappellent que rien n’est jamais acquis. Simone de Beauvoir l’écrivait avec lucidité :
« Rien n’est jamais définitivement acquis. Il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Votre vie durant, vous devrez rester vigilantes. »
Alors, restons-le.
