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Lettre ouverte

La performance des médecins doit compter

Lettre ouverte de Pierre Blain, directeur général de Les Usagers de la santé du Québec

Depuis plusieurs semaines, les Québécois sont témoins d’un bras de fer entre le gouvernement et les fédérations de médecins. Le premier ministre François Legault a haussé le ton, allant jusqu’à brandir la menace d’une loi spéciale.

Lettre ouverte de Pierre Blain, directeur général de Les Usagers de la santé du Québec (LUSQ)

Derrière ce conflit, qui paralysera une partie de l’enseignement médical et inquiète les patients, il y a une question simple, mais essentielle : les médecins doivent-ils être redevables de leur performance pour une part de leur rémunération?

Pour Les Usagers de la santé du Québec (LUSQ), la réponse est claire : oui.

Comme l’a reconnu le premier ministre François Legault, les Québécois sont moins bien pris en charge qu’ailleurs au pays, malgré un nombre élevé de médecins.

Trop de familles cherchent encore un médecin de famille. Trop de patients doivent attendre des mois avant d’obtenir un rendez-vous ou un suivi.

Dans ce contexte, il est légitime que la rémunération des médecins soit liée, en partie, à des indicateurs qui mesurent leur véritable contribution à l’accessibilité et à la qualité des soins. Les Québécois ont droit à des résultats concrets, pas seulement à des promesses.

Cette logique de responsabilité n’est pas nouvelle. Partout dans le réseau, les travailleurs de la santé sont soumis à des obligations de résultats.

Règle d’équité

Les gestionnaires doivent rendre des comptes, les infirmières et préposés doivent répondre à des standards élevés, et même les établissements sont évalués. Pourquoi les médecins échapperaient-ils à cette règle d’équité?

Comme tous les autres acteurs du système, ils doivent participer à l’effort collectif d’amélioration du réseau. En aucun cas cela ne remet en question leur indépendance professionnelle. Et, évidemment, on doit leur fournir les moyens de performer.

Au moment des débats entourant le projet de loi 15, LUSQ avait déjà dénoncé l’illusion que les sondages de satisfaction puissent suffire à évaluer la performance. Être satisfait d’un service reçu n’équivaut pas à avoir accès aux soins dont on a besoin.

La véritable performance se mesure à la porte d’entrée du système : la possibilité d’obtenir un médecin de famille, de recevoir des soins à domicile, de ne pas passer des heures à l’urgence.

Le directeur général de Les Usagers de la santé du Québec, Pierre Blain. (Photo courtoisie)

C’est sur ces éléments tangibles que les indicateurs doivent être construits, et c’est à l’égard de ces résultats que les médecins devraient être redevables.

Nous savons qu’une entente négociée vaut toujours mieux qu’une confrontation.

Mais lorsque des moyens de pression mettent en péril la formation de 2000 étudiants en médecine et fragilisent encore davantage la confiance des usagers envers le réseau, il devient nécessaire d’envisager tous les recours.

Ces moyens de pression ne peuvent pas se faire au détriment de la santé publique et de la relève médicale. Si la négociation échoue, une loi spéciale pourra alors s’imposer comme l’ultime outil pour protéger les patients et assurer la continuité des services.

Au bout du compte, cette crise doit nous rappeler une évidence : la performance n’est pas une menace pour les médecins, mais une promesse pour les patients.

Les Québécois veulent un système de santé où les responsabilités sont partagées équitablement et où chacun, du ministre au médecin en passant par le préposé, contribue à l’amélioration des soins.

Il est temps de remettre les usagers au centre de l’équation, car c’est à eux que le réseau appartient.

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