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Nouvelle de 19 h

Caroline Jacques perpétue le souvenir de la baleine de Montréal

Caroline Jacques au travail sur la toile, afin d’immortaliser le parcours de la baleine à bosse. (Photo: courtoisie)

Une artiste bien connue de Saint-Fabien, Caroline Jacques, souhaite rendre hommage à la baleine à bosse retrouvée morte dans le fleuve, hier, près de Montréal.

L’animal marin a suscité une grande curiosité dans la région métropolitaine, dans la semaine précédant son décès, attribué aujourd’hui à une collision avec un navire. La baleine a été retrouvée morte dans le secteur de Varennes. La baleine, visiblement perdue car elle aurait dû se retrouver dans l’estuaire du Saint-Laurent, a émerveillé bien des Montréalais avec quelques acrobaties pendant son « séjour » dans l’Ouest du Québec.

Celle qui est aussi auteure et blogueuse est la Récipiendaire 2019 du prix Robert Bateman de la Fédération Canadienne de la faune. Elle prépare une toile et a rédigé un texte pour rendre hommage à la baleine disparue, qu’elle considère être un symbole de courage pour les Québécois aux prises avec la crise du coronavirus. Son message va plus loin que la défense de l’environnement.

Un périple mémorable

Voici l’essentiel du texte rédigé par madame Jacques :

« Pendant que collectivement, nous vivions une pandémie mondiale. Pendant qu’à Montréal le nombre de cas, le nombre de morts augmentait plus rapidement qu’ailleurs au pays. Pendant que dans nos CHSLD (centres d’hébergement et de soins de longue durée), ceux qui ont bâti ce pays, mourraient en masse. Pendant qu’on laissait stationner, les véhicules d’Urgel-Bourgie devant les portes de ces centres, dans lesquels les familles ne pouvaient plus entrer pour dire Adieu à leurs proches. »

L’oeuvre complétée. (Photo: courtoisie)

Régions entre-déchirées

« Pendant que les employés des services essentiels s’épuisaient, que notre économie s’écroulait, que les enfants, les adolescents ne pouvaient retourner à l’école, revoir leurs amis, leurs enseignants. Pendant que les régions s’entre-déchiraient lorsqu’il était question de lever les barrages.  Que la crainte d’un virus invisible, transporté par les humains, nous rendaient craintif. Pendant qu’on craignait l’autre, ce visiteur de la ville qui potentiellement ramènerait chez nous le virus que nous avions sue bloquer. Pendant que les citadins, se sentaient frustrés qu’on soit ainsi protectionniste de nos régions. »

« Pendant qu’ils revendiquaient leur droit d’aller, se ressourcer dans la nature. Pendant qu’une canicule étouffante transformait littéralement les logements et les rues asphaltées, en four crématoire, dans les villes de la province. Pendant ces événements qui affectaient nos morales, qui jouaient sur nos nerfs, toi, tu remontais le fleuve. Tu quittais ta famille, tes amis, tes proches, tu défonçais tous les barrages, les frontières que ton espèce n’avait jamais traversées. »

Mission

« Toi, empreinte d’une mission, tu n’écoutas que ton cœur. Sur 450 km, sans flâner, tu remontas le courant. Seul, tu t’éloignais de plus en plus de ce que tu connaissais, de ceux que tu aimais. Au cours de ton périple, tu croisas des créatures plutôt effrayantes, de grosses bestioles en fer, bruyantes, que nous appelons paquebots. Mais ta mission était encrée dans ton âme et malgré la peur, courageuse, tu as poursuivi ta route. Il fallait être forte pour nager pendant cinq jours à contre-courant pour atteindre ton objectif. »

« Le 25 mai on t’a vue à St-Irénée, puis le lendemain, tu étais déjà à Québec, à 100 km de là. Vigoureuse, tu avançais rapidement vers ton objectif. Fin mai, pendant la fin de semaine, tu arrivas à Montréal, près de L’île Sainte-Hélène, près de la ronde. Et tel un feu d’artifice, accompagné de symphonie époustouflante, tu nous éclaboussas de ta grandeur et de ta majesté. Tu t’es offerte en spectacle pendant de nombreuses heures, pendant une semaine. Grâce à toi, les Montréalais ont eu un bouffé d’air frais de ce fleuve salin, qui a le pouvoir magique de rafraîchir nos âmes, de balayer tous les tracas. »

Réglée comme une horloge

« Ils étaient nombreux à aller te voir, jour après jour, sans parler de ceux qui ont suivi ton périple, tes représentations burlesques sur les médias sociaux. Tu étais presque réglée comme une horloge, au pied du quai de l’horloge, tu dansais. Alors que les bars, les salles de représentation, alors que la musique et la danse étaient sur pause dans tout le pays, toi, tu dansais, tu chantais, tu étais à toi seul un cirque et ces acrobates, remplissant nos cœurs d’un baume de bonheur vibrant, vivant. »

« Tu as effacé les frontières, tu as amené la mer en ville et la ville en région. Tu nous as réunifiés, rappelant à chacun de nous que ce fleuve nous uni, que ce fleuve a autrefois conduit les colons vers le cœur de cette terre, pour créer cette nation qu’est la nôtre. Tu es l’aure du St-Laurent, jeune mégaptère. Tu es une icône, comme un remède à nos malheurs. »

Un vaccin naturel

« Un vaccin au cœur de cette pandémie, une brise fraîche nous rappelant que nous sommes le peuple de Magtogoek et que nous ne faisons qu’un avec lui. Que nous devons prendre soin de ce fleuve, en amont comme en aval, car tout du long, il porte la vie. Tu es partie au terme de ta mission, comme tu étais venue. Mais jamais tu ne quitteras ce lieu sacré dans nos cœurs, jamais ton message ne s’effacera. »

« Merci à toi, pour ta grande générosité, pour ces messages essentiels que tu portais, pour cet amour offert inconditionnellement. »

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