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Des commissions scolaires dénoncent la loi 40 d’une même voix

Les présidents de commissions scolaires craignent une baisse de la qualité de l’éducation en région,. entre autres. (Photo: Unsplash photos)

Les présidentes et présidents des commissions scolaires du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine dénoncent le projet de loi 40.

« L’abolition des élus scolaires est la première étape vers une centralisation entre les mains du ministre de l’Éducation. Avec le projet de loi no 40, nous passerons de 600 élus de partout au Québec à un seul ministre à Québec. Il n’y aura plus de politiciens scolaires pour défendre, face au gouvernement, les intérêts et les besoins des régions », indique un communiqué sous forme de lettre au ministre, reçu ce matin.

« Dorénavant, à quelle porte les citoyens cogneront-ils pour contester une décision, pour se faire entendre et se faire représenter ? Le ministre l’a dit clairement, il ne veut plus de contre-pouvoir en région. Il ne veut pas d’élus scolaires dans ses pattes. Il veut tout décider, centraliser et fusionner. Lorsque on analyse à fond ce projet de loi, on constate que le ministre de l’Éducation s’approprie plusieurs nouveaux pouvoirs, dont ceux d’autoriser les travaux de construction ou de rénovations majeures, d’exiger que les centres de services scolaires concluent des fusions de ressources et de services », ajoutent les signataires.

« Seul le ministre pourra élaborer des politiques, ce qui constitue la plus grande centralisation de l’histoire du ministère de l’Éducation. Les régions, les écoles, les petites écoles : toutes y perdront un pouvoir décisionnel. Gaspé ou Témiscouata-sur-le-Lac, c’est loin de Québec lorsque viendra le temps de prendre des décisions ! Imaginez une politique de maintien ou de fermeture d’école décidée à Québec ! Les réalités des régions sont bien loin des bureaux des fonctionnaires du ministère de l’Éducation à Québec. »

Ce qu’ils font

« La centralisation entre les mains du ministre n’est pas la voie à suivre pour les réseaux publics, nous l’avons vu dans la santé. On a connu les ratés de la réforme Barrette, on en subit encore les conséquences, et on ne veut pas vivre la même situation en éducation avec la réforme Roberge ! »

« Une centralisation abusive qui va tuer l’équité L’éducation est un service de proximité et la gestion doit se faire le plus près possible de la population, tout en ayant une vue d’ensemble afin d’assurer l’équité dans les services pour l’ensemble de leurs écoles. C’est ce que font actuellement les élus scolaires au sein de leur conseil des commissaires. »

En étant près de leur population, en participant aux projets menés par les communautés de leur territoire et en représentant leurs citoyens, les commissaires prennent des décisions pour répondre aux besoins de la population de leur territoire, en assurant la distribution équitable des ressources et des services. « Cette équité sera mise en péril si tout est décidé à Québec ! »

Pour les présidents des commissions scolaires, c’est « Un net recul pour la démocratie Le gouvernement se base sur le faible taux de participation aux élections scolaires pour justifier ce brassage de structures et fait miroiter plusieurs arguments : moins de bureaucratie, plus de services, des économies, etc. »

Et la démocratie municipale?

« Or, ceux-ci ne passent pas l’épreuve des faits. Des maires et conseillers sont élus par acclamation et dans d’autres cas, les taux de participation sont faibles. Est-ce qu’on remet en question la démocratie municipale pour autant ? Des organisations vouées à la promotion de la participation citoyenne comme Élections Québec et l’Institut du Nouveau Monde sont venues dire en commission parlementaire qu’il faut travailler à augmenter le taux de participation plutôt que d’abolir une démocratie. »

« Les commissions scolaires ont proposé des moyens. En Ontario, par exemple, les élections municipales et scolaires simultanées font grimper le taux de participation à plus de 40%. De plus, Élections Québec étudie actuellement le vote électronique, à la suite d’un mandat donné par l’Assemblée nationale en juin 2018. Le Nouveau-Brunswick avait aboli les conseils scolaires en 1996 et les a remis en place en 2001. »

« Et c’est maintenant au tour de l’Île-du-Prince-Édouard de revenir sur sa décision d’abolir les commissions scolaires en 2015. Le gouvernement affirme vouloir redonner une voix aux collectivités dans la prise de décisions concernant le système public d’éducation. Des voix commencent à s’élever en Nouvelle-Écosse à la suite de l’abolition des commissions scolaires anglophones. Avions-nous vraiment besoin de répéter les erreurs commises par d’autres provinces ?

Un projet anticonstitutionnel

Les présidents de l’Est considèrent que e projet de loi no 40 traite inégalement les francophones et les anglophones, car seuls ces derniers pourront élire démocratiquement leurs représentants scolaires. Ce projet est également anticonstitutionnel, car il bafoue le principe « pas de taxation sans représentation », un principe inscrit dans la constitution canadienne voulant que seulement les représentants élus démocratiquement peuvent légalement imposer des taxes.

« Avec ce projet de loi, les élus sont abolis, mais les taxes demeurent ! Une structure de gouvernance inefficace qui mènera au chaos Différents groupes d’intérêts seront appelés à siéger au niveau du conseil d’administration du centre de services scolaire. La présidence et la vice-présidence de ce nouveau conseil seront assumées par des parents issus du comité de parents qui est un comité consultatif de la commission scolaire. Il y a là un conflit de rôle assuré pour les parents et de potentiels conflits d’intérêts pour les membres du personnel. »

« Ces changements entraîneront une perte de stabilité dans le réseau et dans les écoles avec, en trame de fond, la négociation et le renouvellement des conventions collectives. Un beau gâchis en perspective qui nous éloigne du bien des enfants ! Une perte de temps, d’énergie et d’argent Le gouvernement prétend qu’abolir les élections scolaires fera économiser 45 M$ sur 4 ans et que cet argent sera réinvesti en services aux élèves. »

« Ce montant ne tient pas compte des coûts liés à la transformation des commissions scolaires en centres de services (implantation, formation, changement de noms et de logos, etc.) ainsi qu’à l’ajout de ressources nécessaires au Ministère pour assumer les nouveaux pouvoirs centralisés. La dernière réforme de structure lors des fusions des commissions scolaires en 1998 a coûté 40 millions de dollars au gouvernement alors qu’il avait annoncé des économies de 100 millions de dollars. Sachant cela, il est difficile de croire qu’il y aura des économies. Tout indique que cette réforme entraînera plutôt des coûts supplémentaires. Plus de bureaucratie dans les écoles On ne peut prétendre que ce projet de loi réduira la bureaucratie. »

« L’essentiel de la bureaucratie en éducation découle des nombreuses redditions de comptes demandées par le ministère de l’Éducation aux commissions scolaires et aux établissements. Aucune modification n’est apportée à ce chapitre. Il y aura en fait plus de bureaucratie, car certaines redditions de comptes seront transférées aux écoles. De plus, les établissements scolaires n’auront pas plus d’autonomie. »

« De nombreuses directives viendront directement des fonctionnaires à Québec. Les directeurs et directrices d’école verront donc leurs tâches administratives augmenter au détriment de leur rôle de leader pédagogique, les rendant moins disponibles pour leur personnel et les élèves. »

Les demandes

« La réforme Roberge ne règlera rien en éducation car elle ne met absolument pas l’élève au cœur de l’action et des priorités. Elle plongera nos écoles, nos centres de formation professionnelle et d’éducation des adultes dans un débat de structures inutile, au détriment de la nécessaire mobilisation de tous les acteurs du réseau pour favoriser la réussite des élèves. »

« Il y a actuellement dans notre réseau des problématiques beaucoup plus préoccupantes auxquelles il nous faut tous ensemble nous attarder : la persévérance scolaire, la pénurie de main-d’œuvre et la valorisation de notre personnel, la mixité sociale et scolaire dans nos écoles, les besoins en infrastructures, la décroissance des clientèles en région, pour ne nommer que ceux-là. »

« C’est pourquoi nous dénonçons l’inacceptable manque d’écoute du ministre et de son gouvernement qui a refusé de mettre de côté son projet de loi et de tenir une vaste consultation sur les véritables enjeux et défis du réseau public d’éducation. Nos élèves méritaient qu’on prenne le temps nécessaire pour mener à bien ce grand débat de société », affirment enfin les signataires suivants:

Jean Couture, président de la Commission scolaire René-Lévesque

Francine Cyr, présidente de la Commission scolaire des Îles

Céline Lefrançois, présidente de la Commission scolaire des Monts-et-Marées

Guilmont Pelletier, président de la Commission scolaire du Fleuve-et-des-Lacs

Jean-Pierre Pigeon, président de la Commission scolaire des Chic-Chocs

Gaston Rioux, président de la Commission scolaire des Phares

Edith Samson, présidente de la Commission scolaire de Kamouraska-Rivière-du-Loup

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