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Nouvelle de 18 h

Le crabe à meilleur prix pour les gens d’ici? C’est possible!

Une politique de souveraineté alimentaire pourrait l’encourager
Une présentation concoctée par la Poissonnerie Gagnon de Rimouski pour donner l’eau à la bouche aux amateurs de crabe. (Photo: Facebook-Poissonnerie Gagnon)

La récente hausse des prix du crabe a fait réagir bon nombre de consommateurs qui se posent la question : pourrait-on avoir des prix préférentiels pour les citoyens des régions où les fruits de mer sont pêchés?

Vérification faite, c’est possible, mais à condition d’avoir en place un gouvernement qui aurait la volonté politique de favoriser l’autonomie alimentaire québécoise par différents moyens.

Depuis deux semaines, les consommateurs se sont plaints que les prix du crabe ont augmenté de 30%, tant pour le crabe vivant que pour le crabe cuit, les prix demandés se situant autour de 12 $ la livre pour le crabe vivant et de 25 $ pour le crabe cuit. La hausse de la demande internationale et la baisse des quotas de pêche seraient responsables de cette augmentation des prix.

À l’heure actuelle, le Québec dépend des autres marchés pour 55 % de son alimentation, selon l’Union des producteurs agricoles, surtout dans les fruits et légumes, mais plusieurs observateurs estiment qu’on pourrait se rapprocher des 100% à condition que les Québécois changent un peu leurs habitudes.

En 2013, le gouvernement péquiste de Pauline Marois adoptait une politique de souveraineté alimentaire qui visait à ce que 50% des aliments mangés au Québec soient Québécois. On visait aussi à assurer à l’ensemble des Québécois un approvisionnement en aliments de qualité, à juste prix et bons pour leur santé.

Dans l’ADN

« Depuis l’époque de Jean Garon (premier gouvernement péquiste en 1976, le père de la protection du territoire agricole)), le Parti Québécois a toujours fait la promotion de l’autonomie alimentaire. C’est dans notre ADN : monsieur Garon prônait l’autosuffisance alimentaire. Après, il y a eu un long passage des libéraux. Après, quand François Gendron est arrivé, il a demandé que l’on établisse une politique de souveraineté alimentaire, mais quand les libéraux ont repris le pouvoir, ils étaient allergiques au mot « souveraineté » et ils l’ont retiré, tout en laissant tomber un peu les objectifs de cette politique », rappelle monsieur LeBel.

Il faut rappeler ici que monsieur LeBel a été élu à titre de représentant du PQ à deux reprises avant de devoir siéger comme indépendant depuis janvier, parce qu’il fait face à la justice présentement.

Mouvement intéressant

« Le gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) semble vouloir revenir sur des concepts d’autonomie. Il y a un mouvement intéressant actuellement, qui fait parler de lui. Il regroupe des cuisiniers, des scientifiques, des centres de recherche, des gesn de l’UQAR à Rimouski, des Gaspésiens, et des gens de la Côte-Nord, qui s’appelle « Manger notre Saint-Laurent » (https://www.facebook.com/MangerNotreStLaurent/ . Ce groupe a fait un travail très intéressant de sensibilisation pour atteindre son objectif : faire connaître davantage les produits qui sont dans le Saint-Laurent et appartiennent aux Québécois; faire en sorte que plus de gens mangent des produits du Saint-Laurent », renchérit monsieur LeBel.

Travail remarquable

« Ce groupe a rencontré tous les députés et a présenté se objectifs. C’est vraiment bien pensé, son affaire. Ce n’est pas juste une intervention sur le web, c’est un programme complet qui a été proposé au gouvernement. Le groupe a rencontré le ministre responsable des pêches et lui a expliqué ses buts. Ce qui se passe aujourd’hui, avec la hausse des prix du crabe à cause des exportations, va à l’encontre de ce que ce groupe propose. On ne peut pas manger ce qui vient du Saint-Laurent, si ça coûte plus cher à manger. Toutefois, je crois que la plupart des députés qui ont eu droit à une présentation de Manger notre Saint-Laurent l’ont accueillie de manière très favorable », estime le député LeBel.

Au bout d’une certaine politique sur la souveraineté alimentaire, il pourrait arriver qu’un gouvernement doté d’une forte volonté politique établisse un système de prix préférentiels pour certains produits, dont ceux de la mer.

Possible

« La souveraineté alimentaire fait toujours partie des priorités du PQ et on devrait en discuter au prochain congrès. Je crois qu’en concluant une entente avec l’industrie des pêches et en trouvant des mécanismes qui permettraient d’indemniser les pêcheurs, on pourrait en arriver à avoir un quota de produits de la mer qui serait réservé aux Québécois et avec des prix spéciaux pour eux. Aujourd’hui, c’est vraiment dommage que des familles à revenu modeste ne puissent pas se payer du crabe. Moi, je trouve que tout ça est faisable », soutient monsieur LeBel.

Harold LeBel (Photo: capture d’écran-Vidéo Assemblée nationale)

« On est du Bas du Fleuve, on est de la Gaspésie, la pêche se fait devant chez nous. Le fleuve est plein de richesses. Pourquoi ne serions-nous pas capables de favoriser la consommation de ses produits? », se demande-t-il enfin.

Histoire de profits

La fondatrice de l’étiquette La Fourchette bleue, qui connaît beaucoup de succès, et directrice du site muséal et centre d’interprétation Exploramer de Sainte-Anne-des-Monts, Sandra Gauthier, présente l’autre côté de la médaille. Elle n’est pas vraiment d’accord.

« Nous ne faisons pas partie du mouvement Manger notre Saint-Laurent mais nous y collaborons à l’occasion. Votre question n’a pas de bonne réponse. Dans le sens où si on décide de faire des prix préférentiels aux gens d’ici, quelqu’un, quelque part, dans la chaîne, devra réduire son taux de profitabilité. Seraient-ce les pêcheurs? Les usines? Les poissonniers? À moins que le gouvernement ne subventionne la différence. Sinon, je ne vois pas comment ça pourrait se faire et je n’y crois pas vraiment », déclare madame Gauthier.

Sandra Gauthier (Photo: Facebook-Sandra Gauthier)

Haut de gamme

À défaut de rêver à cette possibilité, cette dernière souligne qu’on peut cependant être fier de la qualité de nos produits, qui est sans doute une des raisons qui font en sorte qu’ils sont autant en demande au niveau international.

« On se rend compte aujourd’hui avec des exemples comme celui-là, de la qualité et de la notoriété de nos produits. Les produits du Saint-Laurent sont haut de gamme. Ce sont des produits sauvages pêchés dans des eaux de très, très, grande qualité. Cela vaut un prix qu’ailleurs dans le monde on semble prêt à payer. C’est bon pour l’industrie, clairement. Aussi, nous, les Québécois, sommes habitués de payer peu cher les produits marins d’ailleurs, parce qu’ils sont bas de gamme. Entre la crevette du Mékong (Viet Nam) et la crevette du Saint-Laurent, selon moi, le choix est facile à faire. La qualité de l’eau, ne serait-ce que ça, est incomparable. Les fleuves d’Asie sont hyper pollués et hyper dégueulasses. Si nos produits sont si exportés, c’est parce qu’on reconnaît leur qualité à l’extérieur de chez nous. On ne connaît pas la valeur de nos produits », fait remarquer Sandra Gauthier.

« Je n’y crois pas également, parce que je me demande si on est rendu à faire financer la consommation de produits haut de gamme par le gouvernement », conclut-elle.

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