Un travailleur sylvicole se sent oublié
Par la classe politiqueMichel Arseneault gagne sa vie depuis 1987 comme travailleur sylvicole et il déplore que les conditions de travail des sylviculteurs ne se soient pas améliorées depuis toutes ces années.
En fait, elles se sont détériorées sans cesse et il est grand temps, selon lui, que le gouvernement intervienne avant que la profession ne disparaisse complètement.
Gaspésien vivant à Bonaventure, monsieurArsenault ne peut pas profiter du projet pilote sur la rémunération des travailleurs sylvicoles qui amorcera sa troisième et dernière année au printemps. Il y voit une lueur au bout du tunnel, mais encore faut-il que la grille salariale soit raisonnable.
Rémunération à forfait
Outre au Bas-Saint-Laurent, les travailleurs sylvicoles des autres régions du Québec sont toujours payés à forfait. « Les grilles de tarifs n’ont pas été majorées depuis plus de 10 ans, mais nos dépenses ont augmenté. Aucun équipement ne nous est fourni. Ça me prend deux débroussailleuses, deux scies mécaniques, un camion 4 x 4 pour me rendre en forêt. On paie notre gaz. Nous n’avons aucun avantage socialni fonds de pension. Nous travaillons entre 16 et 20 semaines par année, selon les budgets disponibles, que nous ne connaissons jamais à l’avance. Après ça on se demande pourquoi la moyenne d’âge dépasse les 50 ans et qu’il n’y a pas de relève. Ça prend de trois à cinq ans à un travailleur sylvicole pour atteindre un rendement lui permettant de gagner sa vie. Le jeune ne peut pas s’acheter tous les équipements et travailler à perte pendant un minimum de trois ans », mentionne Michel Arsenault.
Besoin de valorisation
Monsieur Arsenault fait partie d’un groupe de 480 travailleurs sylvicoles qui réclame une meilleure reconnaissance de leur travail. « Notre profession n’est pas du tout valorisée. On se sent ignorés, sans appui.
À part le député de Bonaventure, Sylvain Roy, aucun homme politique ne prend notre défense. Personne ne parle de nous, mais nous sommes en train de frapper le mur. Nous voulons seulement avoir un salaire juste et des avantages sociaux comme tout le monde. Depuis 1987, j’ai donné 55 000 $ à mon fournisseur d’équipement à même mon salaire. Les dépenses augmentent et ça ne s’améliorera pas avec la flambée du prix de l’essence. Pendant ce temps, les salaires ne suivent pas », dit-il.
Michel Arsenault estime qu’au lieu de penser à faire venir des travailleurs étrangers pour combler l’absence de relève, les entreprises et le gouvernement devraient plutôt se demander pourquoi il n’y a pas de relève.
Un projet-pilote intéressant
Le biologiste Laurent Gagné est directeur-adjoint aux ressources naturelles et à l’environnement pour le Collectif régional de développement (CRD) du Bas-Saint-Laurent qui chapeaute le projet pilote mis en place par la Table sectorielle de concertation en aménagement forestier.
Le projet a débuté en mai 2020. À la base, l’objectif était d’expérimenter d’autres formes de rémunération que forfaitaire, notamment pour attirer des jeunes, mais aussi pour garder les travailleurs expérimentés. « Pour les vétérans qui approchent de la retraite, on leur dit que nous avons encore besoin d’eux et que nous leur garantissons un salaire de base même si leur rendement commence à baisser un peu. On trouve que ce n’était pas normal que leur salaire baisse en vieillissant alors que dans n’importe quel autre domaine, c’est le contraire. Ça n’existe pas ailleurs, dans n’importe quel autre métier, des salaires qui baissent avec l’âge », précise monsieur Gagné. Les travailleurs sylvicoles effectuent des travaux de reboisement, de dégagement de plantations (éclaircies précommerciales) et d’abattage d’arbres.
Les travailleurs sylvicoles effectuent des travaux de reboisement, de dégagement de plantations (éclaircies précommerciales) et d’abattage d’arbres.