Nouvelle de 18 h > Spéculation et surenchère
Nouvelle de 18 h

Spéculation et surenchère

« Depuis deux ans, pour se loger, c’est le Far West »
Il faut y mettre les heures en recherches, si l’on veut se trouver un logement décent. (Photo: courtoisie)

Un homme de Rimouski apporte un témoignage qu’on pourrait qualifier de troublant à propos de ce que vivent des personnes à faible revenu et vulnérables par rapport à la recherche d’un logement décent.

C’est le premier chapitre d’une nouvelle série de reportages que prévoit réaliser le Journal Le Soir au cours des prochaines semaines au sujet de la crise du logement, de l’habitation et de l’économie.

Dans un état de santé précaire, notre témoin, un homme d’une quarantaine d’années que l’on prénommera Luc pour les besoins de la cause puisqu’il préfère ne pas être identifié, a dû faire le choix d’habiter en logement plutôt que de posséder une maison. Celle-ci exigerait trop d’entretien pour son état de santé.

Marché fou

Il aurait toutefois pu se procurer un condominium, si le marché immobilier n’était pas devenu aussi fou en raison de la pandémie. Bref, qu’il se tourne d’un côté ou de l’autre, la situation actuelle fait qu’il doit se contenter d’un logement en décrépitude, du genre que « les travaux ne sont pas faits, mais le loyer n’est pas cher. »

Puisqu’il aimerait améliorer son sort et se reloger, Luc est devenu un observateur attentif du marché immobilier et du marché locatif. « C’est à la fois le « bordel » et le « Far West »! Pour ma part, j’habite présentement dans le district Sacré-Cœur, près de l’église, dans un « quatre et demi » qu’on pourrait pratiquement qualifier de minable, à 600 $ par mois, non chauffé, non éclairé. Il n’y a pour ainsi dire pas d’insonorisation. C’est vieux. Ça date de 1970 environ. C’est censé être un édifice non-fumeur, mais ça fume partout. Le chauffage est désuet et gronde, c’est l’enfer. J’ai eu des infiltrations d’eau. L’édifice en général est en mauvais état », résume-t-il.

35% et plus de hausse

« Depuis le début de la crise sanitaire, les prix ont explosé. J’ai vu des logements qui étaient dans les 650 $ – 680 $ par mois, ni chauffé ni éclairé, monter à jusqu’à 900 $. En quatre mois, le loyer d’un quatre et demi en particulier a augmenté de 500 $ sans aucun changement. J’ai vu un cinq et demi qui se louait 1 000 $ est qui se loue maintenant 1 500 $. C’est vraiment fou. C’est le Far West! Sur des groupes Facebook, quelqu’un qui annonce un quatre et demi a rapidement 25-30 messages. Des gens surenchérissent sur le prix demandé pour être certains d’obtenir le logement convoité. Les gens sont quasiment en train de s’entretuer, dans un sens. J’ai vu des deux et demi pour étudiants à 750 $ par mois. C’est plus cher que l’hypothèque de la maison jumelée que je possédais à Sacré-Cœur il y a deux ans et demi », résume-t-il.

Mieux à Québec

On a souvent comparé les loyers à Rimouski à ceux de Québec, puisque ce sont deux villes étudiantes, notamment.

« Je remarque qu’on est sensiblement dans les mêmes prix aujourd’hui, mais peut-être même 100$ en moyenne moins cher qu’à Rimouski si on choisit un secteur moyen de Québec. Ce n’est pas plus cher, c’est un mythe. Même que j’ai vu de beaux logements bien rénovés et il y a plus de choix présentement, à Québec. La qualité moyenne est plus élevée à Québec qu’à Rimouski. Tu peux trouver un beau quatre et demi à Québec pour 900 $, mais à Rimouski, tu peux tomber sur un taudis, à ce prix-là. Pour vous donner une idée, dans le secteur de la rue Monseigneur Langis, à Rimouski, c’est à peu près ce qu’on paye », fait remarquer notre interlocuteur.

Condominiums

Du côté des condominiums, des trois et demi situés dans deux édifices différents de Rimouski pour lesquels on demandait 125 000 $ il y a deux ans sont maintenant inscrits à 190 000 $ sur le réseau Centris.

« J’ai vu une maison mobile à vendre dans le secteur de la rivière Hâtée pour laquelle on demandait 190 000 $. Je trouve ça un peu excessif, tout comme les conditions que l’on voit parfois sur les annonces de logement à louer, maintenant que les propriétaires peuvent choisir leur clientèle. J’en ai même vu un interdire de fumer à l’extérieur du bâtiment et un autre interdire les hamsters. On peut se demander, parfois, si on aura le droit de respirer dans son « maudit» logement! J’ai 43 ans et depuis que j’ai l’âge de voler de mes propres ailes, je n’ai jamais vu rien de tel. Les gens sont découragés. On se dit carrément « dans la rue » ou on annonce « je cherche n’importe quoi pour me loger », », constate l’homme.

Spéculation

Et de plus, ce qui n’a rien pour arranger les choses, notre enquêteur amateur a découvert que des gens d’affaires de Rimouski s’adonneraient à la spéculation.

« On achète un petit condo à 140 000 $ et on le loue à 1 000 $ par mois sur RBNB. Ça fait des logements qui ne sont pas occupés. Ma travailleuse sociale me dit souvent, pour me consoler : « Si tu savais combien il y a de gens qui sont encore plus dans la m… que toi. » Je commence à la croire sérieusement. Elle m’a dit qu’il y avait une vingtaine de familles qui vivent dans des motels, présentement, parce qu’elles n’ont pas de place à Rimouski. J’ai appris qu’une dame doit payer 900 $ par mois de loyer sur un revenu de 1 200 $ », raconte aussi notre témoin.

On peut en apprendre davantage sur les droits des locataires ici. On pourra aussi en apprendre davantage sur l’éthique en matière de courtage immobilier, notamment, auprès de l’association provinciale des courtiers.

Également, voici une page Facebook de recherche de logements recommandée par Luc.

Facebook Twitter Reddit