La Couronne réclame six ans de prison
Contre Patrick ChénardLe ministère public réclame une peine de six ans de pénitencier contre Patrick Chénard, ce massothérapeute de 31 ans, de Rimouski, reconnu coupable le 31 janvier 2022 de 17 agressions sexuelles sur 10 victimes, dont deux mineures, dans l’exercice de ses fonctions commises entre 2015 et 2018.
De son côté, l’avocate de l’accusée, maître Caroline Bérubé, estime qu’une peine de trois ans de pénitencier serait plus appropriée pour son client.
Rappelons que les gestes reprochés à Patrick Chénard sont surtout des attouchements aux parties génitales lors de massages, mais aussi une pénétration digitale et un cunnilingus sur une des victimes.
Les représentations sur sentence ont eu lieu ce vendredi matin au palais de justice de Rimouski. Elles ont débuté par la lecture d’une lettre par une des victimes dont les identités sont toutes protégées par une ordonnance de non-publication.
Des conséquences sur les victimes
« J’ai accepté de vous partager ce que les gestes de Patrick Chénard ont eu sur ma vie. J’ai eu honte d’avoir figé et d’être une victime. Je me suis sentie sale de l’avoir laissé faire et de n’avoir rien dit sur le coup. Depuis ce temps, j’ai peur d’être jugée, peur qu’on ne me croie pas. J’étais anxieuse face au processus judiciaire. Je me méfie maintenant des hommes. Je ne suis plus capable de me trouver seule avec un homme », a-t-elle mentionné.
Le procureur de la Couronne, maître Normand Morneau-Deschênes, a lu les lettres de deux autres victimes. « J’essaie d’oublier tout ça, mais je ne suis pas capable. Je ne me sens plus en sécurité. J’ai toujours peur de le croiser. Rien n’effacera le mal que tu nous as fait. Je suis incapable de me débarrasser de l’image de tes mains sur moi. J’ai du dégout pour toi. J’aurais souhaité que tu admettes tes torts. J’ai peur et j’ai mal face à ton insensibilité. Je ne souhaite à personne de vivre ça ».
« Je n’ai plus peur de toi »
Une troisième lettre a été lue par maître Morneau-Deschênes. « J’ai fait des cauchemars pendant des mois. J’ai dû prendre de la médication pour parvenir à dormir. J’ai fait des crises de panique. J’ai demandé un transfert à mon employeur de la boutique pour hommes vers la boutique pour femmes. Maintenant, je me sens libérée et fière d’avoir dénoncé mon agresseur. J’ai réussi à tourner la page parce qu’on m’a cru. Je me suis battue pour obtenir justice et justice a été rendue. Je n’ai plus peur de toi ».
Facteurs aggravants
Le Ministère public estime que le seul facteur atténuant chez l’accusé est son absence d’antécédent. « Par contre, il y a plusieurs facteurs aggravants, comme le fait que deux victimes étaient âgées de moins de 18 ans. Selon le Code criminel, les gestes commis par l’accusé ne sont pas moins graves que s’il les avait « violées », dans le vieux sens du terme. Les conséquences sont importantes pour les victimes qui sont marquées au fer rouge. Il faut lancer le message qui s’impose à la société. Il y avait une relation de confiance entre l’accusé et ses victimes. L’accusé est réfractaire à toute thérapie. Il ne règle pas sa problématique. Au contraire, il se victimise et se dit victime d’un complot », a plaidé Me Morneau-Deschênes.
Le droit de tenir un procès
En Défense, maître Bérubé rappelle au juge Jules Berthelot qu’il devra analyser la gravité objective et la gravité subjective des faits. « Une peine doit être imposée par rapport aux circonstances d’une infraction. On ne peut pas considérer comme un facteur aggravant le fait que mon client ait plaidé non coupable et demandé la tenue d’un procès. C’est son droit. Mon client a perdu son travail depuis la médiatisation du verdict. J’estime qu’une peine de trois ans se trouve dans la fourchette des peines ».
Les deux avocats ont déposé de la jurisprudence au juge pour le guider dans sa réflexion pour le prononcé de la peine.
Détention immédiate réclamée
Le ministère public demande au juge d’ordonner l’incarcération immédiate de Patrick Chénard en attendant le prononcé de la peine puisque celui-ci ne bénéficie plus de la présomption d’innocence qui avait incité le tribunal à la remettre en liberté au début des procédures judiciaires, en 2018. Le débat à ce sujet sera entendu le 24 mai par vidéoconférence. C’est également à ce moment que le juge indiquera à quel moment il fera part de sa décision concernant la sentence.
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