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Nouvelle de 19 h

Harcèlement dénoncé

Michel Dubé (Photo: journallesoir.ca, Véronique Bossé)

Une résidente de Rimouski, qui est inscrite au programme de solidarité sociale, vit un cauchemar depuis qu’elle a effectué un démarrage d’entreprise en juin pour laquelle le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale lui a demandé de fournir son inventaire d’achat, sous peine de perdre ses revenus de solidarité sociale.

Depuis juin, ce sont 400 feuilles qu’elle a dû faire parvenir au ministère, dans un court délai et sans assistance.

Elle leur a expliqué : « J’avais une occasion de faire des ventes à la fin juin et je leur ai demandé comment je devais déclarer ces revenus-là éventuellement. »

Fournir l’inventaire

C’est à ce moment que le ministère lui pose des questions sur son inventaire et les achats qu’elle a fait dans le cadre de son démarrage d’entreprise.

« Au téléphone on m’a demandé quand j’avais commencé à faire mes achats, j’ai dit que c’était en novembre 2021. Ils m’ont ensuite demandé quand j’avais commencé à vendre. J’ai répondu au mois de mai. C’est là qu’ils m’ont dit que je devrais remplir des évaluations des revenus et des biens d’un travailleur autonome chaque mois, pour les mois où j’ai commencé à vendre. Lors du premier téléphone, je ne sais pas si on m’a parlé du fait que je devrais fournir tout ce que j’avais acheté. On m’a dit que j’aurais ces formulaires-là à remplir. C’est quand j’ai reçu les formulaires que j’ai vu qu’il y avait une ligne « inventaire au début de la période. »

« J’ai appelé, j’ai posé des questions sur l’inventaire. Je leur ai dit que j’avais commencé à faire mes achats en novembre 2021 et là ils m’ont dit : il faut que tu nous produises le montant de ton inventaire. Je leur ai dit : réalisez-vous que ça représente 200 factures ? »

Non seulement il a fallu qu’elle leur fasse parvenir les 200 factures en question, mais en plus, cela devait être fait pour le 11 juillet. Un délai jusqu’au 20 juillet lui a été accordé par la suite.

Un projet fondé sur de bonnes intentions

« J’ai voulu développer un projet qui peut respecter mes limitations physiques, que je peux faire à mon rythme et le travail manuel, ça fait du bien. Je l’ai fait pour m’aider, pour qu’éventuellement je puisse avoir un revenu d’appoint. J’ai donc fait les démarches avec l’aide sociale pour les aviser qu’à la fin juin, j’avais l’occasion de vendre des produits que j’avais faits. »

C’est alors qu’elle a téléphoné au ministère et qu’elle a reçu par la suite les lettres lui demandant tous les documents.

Un processus déshumanisant

« J’étais complètement dépassé lorsque c’est arrivé, j’ai tenté de les appeler pour demander si je dois vraiment remplir les documents, sachant que j’ai au-dessus de 200 factures depuis novembre 2021. Ça n’a rien changé. »

Il s’agit d’une soixante d’heure que la dame a dû consacrer au document, en un mois et demi, sans compter les achats qu’elle a dû effectuer pour répondre à la demande du ministère : des cartouches d’encres, du papier et ainsi de suite.

Tout ce travail a été effectué pour des ventes qui lui ont rapporté au final 52.10 $ en ventes brutes.

Lorsque questionné à savoir si elle compte poursuivre son démarrage d’entreprise. La dame a la gorge nouée et répond avec difficulté : « Je ne le sais plus. Pour tous les problèmes que ça m’a causés, je n’ai plus aucun plaisir à faire ce projet. »

Ainsi, ce dossier a causé un lourd fardeau au bien-être de la dame.

De grosses failles dans le système

Le coordonnateur d’Action populaire Rimouski-Neigette, Michel Dubé, est venu en aide à la dame au mieux de ses moyens. Comme elle, il est abasourdi par ce qui lui a été demandé et dénote de grandes failles dans le système.

« Elle n’a pas d’agente attitrée, il faut qu’elle téléphone au centre d’appel. Ensuite, le centre d’appel relègue son téléphone parce qu’ils ne sont pas capables de répondre. Avant, les gens avaient un agent attitré. C’était possible de le rencontrer et de lui parler. Si ce genre de rencontre existait encore, elle avait pu se présenter devant l’agente, lui expliquer qu’elle a 50 $ de vente et que ç’a n’a pas de sens de lui demander tout ça, mais ce n’est pas ça. C’est quelqu’un de Thetford Mines qui lui envoie une lettre et la personne n’est même pas au courant du dossier », déplore monsieur Dubé.

Complexe et sans aide

Ainsi, la dame a dû naviguer dans une tonne de paperasse, remplir des documents qu’elle ne comprenait pas toujours, en sachant qu’elle devait les fournir rapidement, au risque de perdre ses revenus de solidarité sociale. En effet, les lettres qu’elle a reçues stipulent : « Le fait de ne pas fournir les documents demandés pourrait entrainer le refus de votre demande, la diminution ou l’annulation de vos prestations. »

Notons que ces prestations proviennent de l’aide de dernier recours. Le manque d’accompagnement de la part du ministère dans cette affaire, ainsi que sa complexité a d’autant plus pesé sur la dame.

« Ce qu’il faut retenir dans ça, c’est que la demande démontre l’ampleur de l’administration de ce ministère-là. C’est le troisième plus gros ministère au gouvernement du Québec et je pense qu’il y aurait un ménage à faire dans ça », estime Michel Dubé.

Il invite tout ceux et celles qui vivent une situation similaire à le contacter chez Action populaire.

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