Actualités > Société > La misère continue d’augmenter
Société

La misère continue d’augmenter

Maintenant plus de 8 000 personnes démunies dans Rimouski-Neigette
Luc Jobin et Michel Dubé (Photo: Journallesoir.ca)

La misère continue d’augmenter dans la MRC Rimouski-Neigette et les ressources continuent à manquer.

C’est ce qui ressort notamment d’entrevues réalisées cette semaine par le Journal Le Soir, alors que se tient aujourd’hui une manifestation pour la justice sociale.

« Je travaille à Rimouski depuis maintenant huit ans. Nous vivons présentement la situation sociale la plus critique que j’aie vue. Je n’ai jamais vu autant de monde « crever de faim » et se retrouver dans la rue. Depuis quelques mois et même pendant la dernière année, la statistique qui nous touchait directement indiquait qu’il y avait environ 10% de la population de la MRC en situation de pauvreté, avec 6 200 personnes. Nous venons de prendre connaissance des statistiques les plus fraîches à ce sujet. On parle maintenant de 13,3% de la population, soit quelque 8 000 personnes », confie Michel Dubé, coordonnateur d’Action Populaire Rimouski-Neigette.

Dispute pour de la nourriture

« Tout le monde connaît le Frigo Riki situé au marché public, où les citoyens déposent des aliments pour les moins bien nantis. Ces derniers jours, les gens s’arrachent littéralement les denrées. On ne peut pas se tromper : c’est le signe qu’il y a des gens qui crèvent de faim! Je vois venir un autre enjeu avec les denrées alimentaires. Les gens vont cesser de les partager parce que les aliments sont de plus en chers », estime-t-il.

Luc Jobin, directeur de l’organisme En Tout CAS, renchérit : « On voit une tendance lourde qui a commencé avant la pandémie. Il y a plusieurs années, ce qu’on avait, c’était de l’itinérance saisonnière. Il y avait des gens qui faisaient un peu le tour, par exemple des festivals en Gaspésie, et qui demeuraient quelques temps à Rimouski. On leur demandait d’où ils venaient : Sherbrooke, Aylmer, etc, et ils ne demeuraient pas longtemps. Aujourd’hui on a des gens qui viennent d’un peu partout. Ils se retrouvent à Rimouski sans même y avoir une connaissance. Il y a des gens qu’on ne connaît pas, même des anglophones, qu’on se demande pourquoi ils se retrouvent ici. »

Dans des tentes

« La crise du logement n’aide pas. Rimouski est vue comme une ville transitoire, mais parfois des itinérants y restent parce que c’est une belle ville, propre, prospère, conviviale, où les gens sont bien éduqués. Dans nos concertations les plus fréquentes, on a une entreprise de surplus de l’armée qui nous propose des tarifs préférentiels pour des bottes, des sacs de couchage et même pour des tentes. Oui, oui! On ne le voit peut-être pas, mais il y a bien des gens qui couchent dans des tentes, actuellement, à Rimouski. Si vous allez dans certains coins de la ville, derrière des commerces, vous verrez que les itinérants sont mieux organisés qu’avant. Ils « grapillent » à droite et à gauche autant qu’ils le peuvent, pour survivre », fait remarquer monsieur Jobin.

On a vu récemment, au comptoir alimentaire Moisson Rimouski-Neigette, 10 nouvelles demandes être déposées en une seule demi-journée, des demandes qui continuent d’être en croissance. Les besoins augmentent, mais pas les rentrées de denrées et d’argent.

« Les gens ordinaires ne peuvent plus contribuer, parce que leur pouvoir d’achat s’est effrité. Le monde « ordinaire », il y en a de moins en moins. Les écarts s’agrandissent », note Luc Jobin.

Moins de personnes assistées sociales

Une statistique qui pourrait sembler rassurante ne l’est vraiment pas, en réalité.

« Il y a moins de personnes bénéficiant de l’aide sociale, parce qu’elles se retrouvent sur des programmes de pension de vieillesse. Ce qui veut dire qu’il y a de plus en plus de détresse chez les personnes âgées. Le nombre de personnes sur l’aide sociale baisse, mais la pauvreté augmente. Ce sont souvent des personnes âgées qui souffrent », croit Michel Dubé.

Personnel

En parallèle avec l’augmentation des besoins, la crise de la main-d’œuvre fait en sorte que des non seulement des organismes n’arrivent pas à répondre à la demande en fournissant plus de services, mais ils perdent en plus du personnel, ce qui cause plutôt des réductions de services.

Des organismes communautaires se voient obligés d’offrir des salaires à 21 $ l’heure et plus pour être concurrentiels.

Solidarité communautaire

« Nous aurons besoin de beaucoup de solidarité dans les prochains mois. La solidarité sociale ne doit pas se traduire seulement par les actions des groupes communautaires, mais par les actions de toute la communauté. La solidarité est une question de communauté », affirme monsieur Jobin.

« Il faut voir venir parce que tôt ou tard, ça va arriver. On est dans une situation économique et sociale qui favorise la misère. »

Village

« On dénote une tendance. La situation dans certaines villes du Québec comparables à Rimouski a de quoi nous inquiéter. Granby a dû défaire un campement d’itinérants récemment et Chicoutimi vient de le faire il y a quelques jours. Ce sont des villes qui nous ressemblent. Ici, on ne vit pas ça… encore. Est-ce que ça s’en vient ici? Ici, ce n’est pas encore dramatique, mais ce n’est pas parce que ce n’est pas encore dramatique qu’il ne faut pas lever le drapeau. Il faut voir venir parce que tôt ou tard, ça va arriver. On est dans une situation économique et sociale qui favorise la misère. La polarisation est forte d’un côté comme de l’autre et quand on est dans les pôles, il y a moins de monde au centre. Moins il y a de monde au centre, moins on est solidaire. Espérons que notre cri d’alarme sera entendu », remarque Luc Jobin.

Rimouski 2030

La campagne électorale et la prochaine consultation Rimouski 2030 s’avèrent des occasions de prendre le plancher pour les intervenants afin d’obtenir plus d’équité sociale.

Facebook Twitter Reddit