Leur mère expulsée d’une maison des aînés : une famille en colère
Lettre ouverte de Danielle Dufresne, fille de Réjeanne DéryBravo! Ils ont réussi. Notre mère de 90 ans, résidente depuis 15 ans à la Maison des aînés de Grande-Vallée où elle a été admise après un AVC qui l’a laissée avec une hémiparésie, vient de se faire jeter dehors de sa maison.
Vous avez bien lu, c’est fait jeter dehors de sa maison! Tout a commencé il y a un peu plus de deux ans. La direction générale a changé et pandémie oblige des règles plus strictes ont été mises en place pour éviter les catastrophes provoquées par la COVID-19.
Ces règles n’ont jamais été assouplies et notre mère qui a besoin de soins particuliers a vu, peu à peu, ses services diminués et offerts dans des cases horaires très strictes qui ne correspondaient pas à ses besoins.
L’attitude du personnel de cette maison des aînés, qui, il faut le dire, avait toujours été cordiale, bienveillante et attentive est devenue encadrée, calculée, froide.
Notre mère, âgée et malade a commencé à être traitée comme un cas lourd, un cas, on le sait maintenant, dont il fallait se départir. Nous avons reçu de la direction une première lettre qui énumérait des propos et des comportements soi-disant inappropriés de la part de notre mère, mais aussi de nous ses enfants.
Si on faisait un commentaire sur le manque d’empathie vis-à-vis cette dame âgée et malade, on disait que nous provoquions de la discorde.
L’omerta s’installe
Notre mère craignait de se plaindre, car elle savait bien que tout serait pire si elle osait demander. L’omerta s’installe. L’ambiance s’est dégradée.
Notre mère est devenue plus triste, renfermée, solitaire, une colère sourde prenait sa place en son cœur. Elle pleurait beaucoup, souvent. On l’obligeait à faire des selles au moment qui leur convenait.
Elle voulait se faire mettre au lit pendant la journée pour reposer ses bras ou jambes endoloris on reportait à plus tard.
On la levait le matin au moment qui leur convenait. Il était devenu évident que la Maison des aînés de Grande Vallée était devenue un centre de fonctionnaire et ne lui fournissait plus les soins adaptés à sa condition.
Soins, faut-il le préciser, qui sont payés et largement subventionnés. Le quotidien est devenu de plus en plus difficile. Sa capacité cognitive diminuait.
Une lettre inacceptable
Une deuxième lettre est arrivée. Une lettre totalement inacceptable où on la soupçonne de demander au personnel de poser sur elle des gestes sexuels, ou on lui dit qu’elle est vulgaire et autres injures.
Je rappelle que nous parlons ici d’une femme malade, confuse, âgée de 90 ans et semi-paralysée. On lui prête des intentions malveillantes. Sur le même ton, on nous annonce que notre mère devra quitter sa maison et son petit studio où elle habite depuis 15 ans.
La Maison des aînés de Grande-Vallée ne veut plus s’en occuper. Un cas trop lourd disent-ils même s’ils reçoivent des subventions pour la charge de travail soi-disant supplémentaire.
On a accepté qu’elle parte, car étant donné cette dégradation de services, on se disait qu’elle serait mieux ailleurs. Nous avons de bonne foi entrepris les démarches pour son déplacement. Elle a été inscrite sur la liste pour terminer ses jours dans un CHSLD de la région.
Une crise le 20 juin
Le 20 juin 2023, notre mère a comme on dit – péter les plombs – elle a eu une crise nerveuse ou de panique. Elle a été amenée au CSLC de Grande-Vallée. Au moment où les intervenants du CLSC pensent pouvoir la retourner dans la Maison pour la nuit, une consigne a été donnée de ne pas la laisser entrer!
La direction de la Maison des aînés a refusé que notre mère réintègre sa chambre dans sa maison où elle habite depuis plus de 15 ans.
La direction de la Maison des aînés de Grande-Vallée lui ferme la porte et l’abandonne aux mains du CLSC pour lui trouver un endroit ou vivre temporairement, dans l’attente de son installation définitive qui est en cours de processus.
Trimballée d’un hôpital à un autre
Connaissant les délais, notre mère sera donc trimballée d’un hôpital à un autre pendant des jours et peut-être des semaines, voire des mois.
Avec tous les risques de contamination que cela implique, d’inconfort d’impatience et d’insécurité. Pourquoi? Parce que la Maison des aînés de Grande-Vallée lui ferme la porte au nez et refuse de la reprendre jusqu’à son transfert. Ils la trouvent trop difficile à gérer !
Ce sont des professionnels payés pour s’occuper de notre mère.
Mais en réalité, la directrice actuelle et son CA consentant veulent récupérer une chambre et faire entrer des cas qu’ils qualifient de légers. Un tsunami de colère est monté du cœur au sang. Nous, ses six enfants, dénonçons fortement cette attitude inhumaine, grossière.
Une histoire de maltraitance peu banale pour une femme de 90 ans à qui on refuse un toit sécuritaire. À qui on refuse des soins adaptés à sa condition. Une mère de famille exemplaire et une épouse généreuse qui est traitée comme une moins que rien au sein de notre système de santé!
Comment ce système peut-il autant déraper ? Comment se fait-il qu’un conseil d’administration d’un établissement de santé entérine semblable comportement de la direction générale? Les autres résidents subissent-ils un sort semblable? La question se pose.
Nous sommes scandalisés par un tel manque de compassion, de bienveillance, d’empathie et de compréhension des besoins d’une personne âgée et de plus en plus faible.
Un scénario d’horreur
Ce scénario d’horreur qu’elle doit subir nous lève le cœur. C’est avec les larmes aux yeux et le cœur en miettes que nous dénonçons une telle maltraitance et réclamons des soins de fin de vie digne dans un environnement sain et attentif pour notre mère. Que ces dernières années ne soient pas entachées de pleurs, de cris et de désespoir.
Que cette condition inhumaine soit fortement dénoncée et que cette Maison des aînés de Grande-Vallée soit sanctionnée. Comment notre mère pourra- t-elle mourir dans la dignité si la fin de sa vie est un cauchemar? La honte doit planer sur cette Maison.
Danielle Dufresne, fille de Réjeanne Déry et solidairement tous les frères et sœurs Alain, Sylvain, Chantal, Carole, Stéphane Dufresne
CC:
- Christian Dubé, ministre de la santé du Québec
- Sonia Bélanger, ministre responsable des Aînés et ministre déléguée à la Santé
- Stéphane Sainte-Croix, député de Gaspé à l’Assemblée nationale du Québec
- Diane Lebouthillier, députée de Gaspésie-Les Îles de la Madeleine à la Chambre des Communes
- Noël Richard, maire de Grande-Vallée
- Martin Pelletier, président-directeur-général du CISSS de Gaspésie
- Caroline Plourde, commissariat aux plaintes et à la qualité des services
- Yamama Tamin, directrice qualité, évaluation, performance et éthique au CISSS de Gaspésie
- Nelson Fournier, président du conseil d’administration de la Maison des aînés de Grande-Vallée
- Marie-Claude Minville, directrice générale de la Maison des aînés de Grande-Vallée