La désinformation, un virus très toxique
Chronique de Johanne Fournier
La dernière élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a encore une fois fait la démonstration d’une certaine banalisation du mensonge, des contre-vérités et de la propagation des fausses nouvelles.
Des rumeurs, des histoires fictives et des informations manipulées ou sorties de leur contexte sont présentées comme des faits.
Chacun peut interpréter ces « fausses vérités » à sa manière. Si certains croient que nous sommes entrés dans l’ère de la post-vérité, peut-on encore sauver la vérité et la véracité des faits?
Comme bobard, pensons au président Trump qui, lors d’un débat en pleine campagne électorale, a affirmé que les immigrants haïtiens vivant à Springfield, capitale de l’Illinois, mangeaient des chiens et des chats. Bien sûr, cette information est fausse, en plus d’être raciste.
Certains de ses partisans ont même reconnu que le candidat racontait n’importe quoi. Mais, ce qui est le plus déconcertant, c’est que Donald Trump a quand même été élu.
Or, le multimilliardaire utilise-t-il les mensonges pour attirer l’attention?
Rappelez-vous aussi combien son équipe avait largement surestimé la foule présente à sa cérémonie d’investiture, allant jusqu’à dire qu’il faisait soleil, alors qu’en réalité, il pleuvait et que la foule n’était pas nombreuse. Voilà autant d’exemples qui nous conduisent dans cette ère de post-vérité.
Rôle des réseaux sociaux
Je parle du président américain, mais le phénomène est tout aussi et simplement observable en parcourant notre fil d’actualité sur les réseaux sociaux, alors que le moindre quidam peut affirmer des choses sans mentionner la source.
« Je dis ce que je pense et j’ai raison. » Facebook, X et autres réseaux sociaux sont truffés de mensonges, de fausses nouvelles, de théories du complot.

Ces publications s’élèvent au même rang que les nouvelles vérifiées et validées, comme celles que vous pouvez lire dans votre hebdomadaire Le Soir.
Les fausses nouvelles côtoient aussi les publications de scientifiques qui publient les résultats de leurs recherches avec beaucoup de rigueur et qui s’inscrivent dans le consensus scientifique.
Freud avait-il raison?
Pourquoi les mensonges sous toutes leurs formes sont-ils devenus plus attrayants que la vérité? Comment arrive-t-on à tolérer ces faussetés sans qu’elles ne soient réprimées? C’est aussi ça, la démocratie. Est-ce que Freud avait raison?
« Les foules n’ont jamais soif de vérité, elles réclament des illusions auxquelles elles ne peuvent renoncer, a écrit le célèbre psychanalyste en 1921. Chez elles, l’irréalité prend toujours le pas sur la réalité ».
N’est-ce pas ce qui décrit l’opposition entre mensonge et vérité dans l’espace public? Or, est-il encore possible de sauver la vérité?
La question demeure entière, alors que nous sommes dans une période où la vérité de chacun prime et où les balivernes sont trop souvent plus importantes que la vérité.
Algorithmes et chambres d’écho
La désinformation est exacerbée par les réseaux sociaux qui, par leurs algorithmes, nous emprisonnent dans une bulle de filtre ou dans une chambre d’écho. Regardez des vidéos de chats et votre fil d’actualité ne vous proposera que des vidéos de chats.
Ce n’est pas très dangereux. Mais, si vous êtes enclins à adhérer aux théories du complot et que vous ne voyez plus ce qui contredit ces hypothèses, il devient dangereux de tomber dans la radicalisation.
Sans tomber dans des croyances farfelues, il existe aussi actuellement un fort mouvement qui remet en cause les autorités et les institutions. Certains se mettent à douter de tout. Mais, loin de moi l’idée d’associer le doute aux conspirationnistes.
Il est toujours sain de développer son esprit critique par rapport à ce que nous lisons, voyons et entendons. Prenons 30 secondes avant d’y croire.
Pendant la pandémie, la professeure de l’Université de Sherbrooke, Marie-Ève Carignan, s’est penchée sur la situation de plusieurs personnes qui se faisaient traiter de complotistes.
« On s’est rendu compte que la confiance envers nos institutions au Canada est plus forte que dans plusieurs autres pays », a souligné la cotitulaire et directrice du Pôle médias et de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent.
Selon elle, plusieurs personnes ont été affublées du titre de complotiste, notamment parce qu’elles résistaient aux consignes sanitaires.
« Il y a un contexte culturel ou des raisons personnelles qui peuvent faire en sorte qu’une personne soit contre la vaccination, a-t-elle affirmé dans un panel organisé par le Festival international du journalisme de Carleton-sur-Mer, qui s’est tenu du 16 au 18 mai.
L’indépendance journalistique
Là où certaines personnes avaient tort, pendant la pandémie, c’était lorsqu’elles disaient que les médias étaient à la solde des gouvernements ou que les journalistes étaient payés par l’État pour relayer l’information provenant de la Santé publique, alors que le monde était en pleine crise sanitaire.
Les journalistes professionnels bénéficient d’une indépendance journalistique. Jamais ils n’acceptent d’obéir à quelconque directive.