Ordures! Journal d’un vidangeur
Simon Paré-Poupart raconte cet univers mal connu
On ne réalise pas assez fort comment le métier de vidangeur peut être essentiel à notre bien-être en société. Lui-même vidangeur de métier, Simon Paré-Poupart a voulu raconter, en écrivant le livre Ordures!, ce qui se trame dans l’univers mal connu de la collecte des déchets.
L’auteur a étudié en sociologie et en administration internationale. Ce qui ne l’a pas empêché de pratiquer avec passion ce métier d’éboueur depuis vingt ans. Son langage est coloré, franc et bien argumenté.
Il faut signaler ici que la collecte des déchets a beaucoup changé ces dernières années, du moins à Rimouski et dans d’autres villes, avec les camions qui ramassent mécaniquement les poubelles pour transvider leur contenu dans les bennes.
Il n’est pas question de cette évolution dans le livre. Des emplois ont été perdus…
Simon Paré-Poupart nous familiarise d’abord avec des cas réels d’hommes qui gagnent leur vie dans ce domaine.
Il reconnaît que les gars qui y travaillent ont souvent vécu des parcours difficiles. Derrière leur allure discrète, certains sont endettés, dépendants, exploités par le système. Il les décrit comme des « marginaux excentriques ».
Mais ce sont aussi des athlètes vigoureux, énergiques. Ces gars-là ont besoin de performer. Qui donc peut courir 25 km dans une journée en levant des poids continuellement ? Et ils ne reçoivent pas de médailles ni de gros salaires comme les athlètes reconnus dans le monde du sport…
La population ne les apprécie pas à leur juste valeur, explique-t-il. Les éboueurs reçoivent plus de plaintes que de remerciements. Seuls les enfants les regardent travailler avec admiration!
L’auteur brosse ensuite un tableau des avantages et contraintes du métier. Il existe une complicité entre les éboueurs, mais aussi une certaine compétition.
La température est un facteur-clé : il faut affronter le froid et les bancs de neige en hiver, les chaleurs et les mauvaises odeurs en été.
Accumulation de déchets
C’est dans sa dénonciation de l’accumulation invraisemblable de déchets dans nos villes que son discours est le plus percutant.
Saviez-vous que nous « fabriquons » environ 400 kilos de déchets par personne par année ? Sur la planète Terre, deux milliards de tonnes de déchets solides s’ajoutent annuellement à nos dépotoirs déjà bien remplis. C’est devenu un cauchemar!
Paré-Poupart croit qu’il faudrait valoriser davantage la réutilisation des métaux et du bois qui sont souvent inutilement jetés aux déchets.
Malheureusement, au dépotoir de Rimouski, il n’est pas possible de récupérer les nombreux matériaux et objets encore utiles qui y sont jetés.
Question de sécurité des lieux, sans doute… Mais il serait certainement possible de créer une zone temporaire où la récupération serait possible et bénéfique pour l’environnement.
Métier essentiel
Le noble métier de rendre les villes plus propres est essentiel! L’auteur raconte qu’en 1968, une grève des éboueurs a eu lieu à New York. On voyait des tonnes de déchets dans les rues, les rats, la puanteur… Au bout de dix jours, la Ville a cédé aux revendications.
Presqu’en même temps, une grève des employés de banque en Irlande s’est prolongée pendant six mois, « sans que l’économie en souffre »…
Pareillement, Paré-Poupart rappelle que le pasteur et militant Martin Luther King a été assassiné, à Memphis, alors que, la veille même, il avait soutenu les grévistes noirs qui travaillaient comme vidangeurs et qui souhaitaient de meilleures conditions de travail.

« Ordures! Journal d’un vidangeur », par Simon Paré-Poupart, Éditions Lux. 2024, 144 pages.
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