Le courriel de Gaëlle
Opinion de Carol-Ann Kack
J’étais avec ma filleule de 6 ans, la semaine dernière. Sur la table de sa cuisine, il y avait une feuille sur laquelle elle avait dessiné un papillon et une fleur. Au-dessus du dessin était écrit, en feutre vert, « Écrit à la mairesse de ta ville pour lui demander d’interdire l’utilisation des pesticides ».
Par Carol-Ann Kack
Je lui demande de quoi il s’agit. Elle m’explique qu’elle a lu un livre qui parle d’environnement, et dans lequel il y avait des actions proposées pour prendre soin de la biodiversité.
Évidemment, j’étais charmée par son intérêt à vouloir agir pour prendre soin de l’environnement. Je doutais toutefois que cette action ait un impact quelconque ou qu’elle reçoive même une réponse.
J’ai un peu honte de l’admettre, mais même si je crois à l’importance de l’implication politique, une part de moi, parfois cynique, se disait « Je ne sais pas si ça vaut la peine ».
Action toute simple
Quoiqu’il en soit, son désir de faire la différence m’a inspiré à l’accompagner dans ce projet pour poser un geste environnemental à son échelle.
Je me suis dit que ce serait un beau moment pour l’initier à la participation démocratique en posant un geste pour s’exprimer auprès des personnes élues. Ça me faisait réaliser la simplicité qu’une action pouvait prendre.
Il y avait quelques étapes à compléter pour y arriver. Gaëlle avait une action en tête, et moi, la capacité de l’aider à la concrétiser. Nous avons donc pris mon ordinateur, trouvé l’adresse courriel de la mairie, puis rédigé ensemble un petit courriel avec ses mots.
Allo monsieur le maire,
Je m’appelle Gaëlle. Je suis en première année. J’ai 6 ans et je voudrais qu’on arrête d’utiliser les insecticides sur les pelouses et les plantes comestibles. J’ai appris que c’est toxique pour la nature et pour nous. J’aimerais savoir s’il y a des solutions. Merci, Gaëlle.
Moins de 24 heures après l’envoi du courriel, une réponse est arrivée. La Ville de Rimouski nous avait répondu et nous expliquait la situation actuelle concernant l’utilisation des pesticides.

Bonjour Gaëlle,
Nous accusons réception de votre message du 3 juin dernier. Le règlement 131-2004 concernant les pesticides ne permet pas, depuis janvier 2005, l’épandage de pesticides de synthèse, soit les pesticides dits « chimiques ». La Ville de Rimouski est pionnière en la matière, car en 2005, peu de villes, sinon aucune, ne réglementait aussi sévèrement sur l’usage des pesticides.
Les compagnies d’entretien de gazon sont bien au courant du règlement et doivent épandre seulement les produits permis. La Ville de Rimouski effectue des patrouilles de surveillance de ces entreprises et prend des échantillons des produits épandus sur les pelouses.

Nous envoyons ensuite ces échantillons dans un laboratoire pour les analyser et si une entreprise épand un ou des produits interdits, la Ville donne une contravention, qui se chiffre tout de même à 1 500 $ pour une première infraction.
Le règlement permet l’épandage de pesticides à faible impact, soit ceux qui ont peu ou pas d’impact sur l’environnement, mis à part l’insecte, la « mauvaise herbe » ou le champignon visé. À titre d’exemple, ce peut être du sel, du liquide à vaisselle combiné à de l’eau, une solution de fer dilué dans l’eau et quelques autres. Ces pesticides sont peu toxiques. Nous vous souhaitons une excellente journée.
Se laisser surprendre
Avec une intention de départ et un geste tout simple, Gaëlle venait de prendre part à la politique municipale. Nous avons donc appris quelles étaient les règles de la ville au sujet des pesticides.
Nous avons appris qu’ils étaient déjà interdits depuis 2005 et comment la ville faisait respecter ces règles et quelles étaient les conséquences possibles pour les personnes qui y contreviennent.
Notre préoccupation a été entendue et nous avons eu accès à des réponses.
Peu importe la municipalité où nous résidons, il y a des actions simples que nous pouvons poser pour prendre part à la vie politique. Cela ne se résume pas à voter aux élections. C’est aussi possible, comme Gaëlle, de le faire simplement en partageant nos inquiétudes et nos aspirations.