Dix facteurs qui affectent l’abordabilité des logements
Même si le revenu net moyen des locataires augmente plus rapidement que les loyers et que ceux-ci augmentent moins vite au Québec qu’au Canada, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) estime que des solutions existent pour améliorer l’abordabilité des logements.
« Depuis des mois, des groupes d’activistes et des élus résument les enjeux d’abordabilité du logement à l’unique paramètre des loyers qu’il faudrait, selon eux, contrôler davantage. Ce raisonnement simpliste démontre leur déconnexion avec les réalités de l’habitation. Quant à l’observation du taux du budget des locataires consacré au loyer, cet indicateur ne suffit plus pour mesurer à lui seul l’abordabilité. Pour sa part, le taux d’inflation en général constitue une référence trompeuse avec laquelle comparer l’évolution des loyers », commente le directeur des affaires publiques de la CORPIQ, Hans Brouillette.
Plus de services
Selon la CORPIQ, de plus en plus de loyers incluent des services ou des électroménagers que les locataires payaient autrefois séparément. Il y a également des records de construction de logements locatifs depuis quelques années et leurs loyers sont plus chers. Ceci accroît le loyer moyen.
La CORPIQ invite les autorités publiques à s’intéresser davantage aux coûts d’habitation, lesquels conditionnent les prix et contribuent à la rareté. « Cela permettrait de déterminer si les contraintes réglementaires qu’elles imposent et les réalités du marché sont en adéquation avec la capacité de payer des ménages locataires, surtout ceux à faible revenu », précise M. Brouillette.
Voici dix facteurs qui affectent le coût d’habitation, donc l’abordabilité, selon la CORPIQ :
- Choisir une habitation convenant à ses besoins et à ses moyens
Les Canadiens et les Québécois arrivent au 2e rang des pays industrialisés quant au nombre de pièces par personne dans leur habitation, tout juste derrière les Pays-Bas. Aussi, le Québec est la seule province où une majorité de locataires préfèrent vivre seuls (51 % selon le Recensement 2016).
- Améliorer l’efficacité énergétique
Trois locataires sur quatre paient leur consommation d’énergie directement au fournisseur. Le propriétaire ne réalise donc aucun gain en améliorant l’efficacité énergétique du logement. En écourtant la période d’amortissement (fiscalité, indexation de loyer) pour ce type de travaux, les propriétaires, les locataires et les gouvernements y trouveraient leur compte. Par ailleurs, les locataires ont profité de la faible progression du prix de l’électricité et du gaz naturel.
- Se montrer flexible quant au lieu d’habitation
Comme pour les propriétaires qui doivent s’éloigner en banlieue pour acheter une propriété moins chère, les locataires qui veulent freiner leurs dépenses de loyer gagneraient à se montrer flexibles en acceptant de changer d’arrondissement ou de ville. Le prix des immeubles, en forte hausse depuis vingt ans, se reflète dans l’hypothèque et les comptes de taxes. Il devient impossible de maintenir bas les loyers dans les secteurs prisés.
- Encourager la rénovation pour réduire les sinistres
Les critères de fixation de loyer du gouvernement du Québec découragent les travaux de rénovation préventifs, alors que la moyenne d’âge des immeubles locatifs est de 50 ans. Les sinistres sont donc plus fréquents. Leurs coûts sont ensuite transférés dans les primes d’assurance, puis dans les loyers où ces primes représentent désormais plus de 5 % (40 $ sur un loyer de 800 $).
- Contenir l’inflation des taxes municipales
Bien qu’elles affirment hausser leurs comptes de taxes au rythme de l’inflation, la réalité est que les villes se comparent au taux d’inflation anticipé, et non au taux réel. Depuis une douzaine d’années à Montréal, les taxes ont progressé presque deux fois plus vite que le coût de la vie. Les taxes municipales et scolaire représentent en moyenne 15 % du loyer, donc 120 $ sur un loyer de 800 $.
- Assouplir la réglementation municipale pour favoriser la densification
La densification résidentielle permet de réduire le coût d’habitation. Toutefois, les nombreux règlements d’urbanisme, plus contraignants dans certaines villes, contribuent à gonfler le prix de vente ou le loyer des immeubles neufs. Aussi, lorsqu’elles limitent les possibilités d’ajouter des logements dans des immeubles ou sur des terrains déjà construits, les villes accentuent la rareté et affectent les coûts.
- Compenser les exigences réglementaires en matière de sécurité des bâtiments
La sécurité incendie, les inspections obligatoires, les normes d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite, les exigences en matière de conduites de plomb, le désamiantage, etc. sont des mesures qui se justifient, mais elles contribuent à une croissance incessante des coûts d’habitation. Le gouvernement du Québec, les villes et les locataires doivent s’attendre à ce qu’ils soient transférés à ces derniers. Il y aurait lieu de compenser les ménages à faible revenu pour cette inflation.
- Assouplir la loi sur la main-d’œuvre dans la construction (loi R-20)
Un locataire paie dans son loyer beaucoup plus cher pour les rénovations dans son logement que ce qu’il en coûte pour des travaux identiques aux propriétaires occupants d’une maison. En effet, le propriétaire d’un logement locatif doit payer des coûts de main-d’œuvre totalisant environ 82 $ en moyenne, basée la convention collective. Pour sa propre maison, le propriétaire peut faire appel à un entrepreneur général embauchant des travailleurs pour beaucoup moins cher.
- Les effets de la pandémie
Pour plusieurs raisons, la pandémie a accéléré la croissance des prix de la propriété, provoquant un repli vers le marché locatif, ce qui fait grimper à leur tour les loyers.
- Le REM, le tramway et les autres projets
Les projets structurants de transports comme le Réseau électrique métropolitain (REM) ou le tramway redynamiseront les régions urbaines. Tout comme lorsqu’une entreprise de grande taille s’installe dans un quartier, ces changements s’accompagnent inévitablement d’une hausse des coûts et des prix en habitation.
« La CORPIQ espère que les autorités s’intéresseront davantage à ces enjeux, car lorsque les taux d’intérêt remonteront significativement, une crise financière majeure affligera les propriétaires et conséquemment leurs locataires », lance M. Brouillette.