Itinérance : un occupant du Parc de la gare raconte son histoire
Anthony s'est installé avec sa tente dans les derniers joursVous l’aurez peut-être remarqué, surtout si votre train de vie quotidien vous a mené dans les environs du parc de la Gare entre les rues de l’Évêché et St-Jean Baptiste. L’itinérance existe bel et bien à Rimouski, exacerbée chaque jour par une crise du logement qui s’enlise. Se retrouvant à la rue à l’âge de 27 ans, Anthony a l’amabilité de nous raconter son histoire.
Le jeune homme habite une tente installée sous le couvert d’un kiosque du Parc de la gare depuis maintenant presqu’une semaine. Son voisin, un homme d’un certain âge, étendu à même le bois humide du petit pavillon, enroulé dans un simple sac de couchage alors que l’été fait place à l’automne.
À quelques pas de l’abri d’Anthony, une femme séjourne au Parc depuis maintenant deux mois. Une sorte de communauté s’est formée entre les kiosques du marché public.
Les occupants s’entraident et s’échangent des biens. Ils discutent pour tuer l’ennui, mais leur sort reste le même. Ils n’ont pas un endroit sûr qu’ils peuvent appeler leur chez-soi.
C’est un conflit familial qui a entraîné Anthony dans la rue, une situation dans laquelle il ne s’attendait jamais à se retrouver. Il connaît les ressources disponibles, mais mentionne que ses tentatives n’ont pas porté fruits auprès d’elles.
« Je n’ai pas cherché à me ramasser ici. Plusieurs de mes amis ne me croient pas quand je dis que je suis en situation d’itinérance. On n’est pas habitués à ça à Rimouski. On me répète qu’il existe des organismes comme l’Auberge du cœur Le Transit, mais quand les organismes sont pleins et qu’ils ne veulent rien savoir de toi parce que tu fumes du pot, même si c’est légal, tu ne peux pas faire de miracle. Je ne dérange personne », plaide-t-il.
La coordonnatrice de l’Auberge du cœur Le Transit précise que la décision de refuser à quelqu’un l’hébergement est basée sur une convergence de facteurs, mais que la consommation de drogues à l’intérieur des portes de l’établissement est prohibée.
Un ami fidèle
Malgré tout, Anthony peut compter sur la précieuse aide de son ami du même nom.
« Anthony vient me porter à manger, à boire, il m’habille, c’est vraiment un bon chum. Juste le fait de pouvoir compter sur un ami comme lui, ça fait chaud au cœur. C’est plus gratifiant pour moi de le voir arriver le matin avec de la nourriture que de recevoir de l’argent. »
C’est d’ailleurs avec lui qu’Anthony se cherche activement un logement abordable, une denrée rare à Rimouski alors que le taux d’inoccupation stagne autour de 0,4% et qu’il manque environ 2000 logements pour retrouver l’équilibre.
« Quand j’ai commencé à vivre en appartement à 17 ans, je payais 325$ pour un 3 1/2 chauffé-éclairé à Mont-Joli. Aujourd’hui, c’est au moins le double. On s’entend qu’avec 620$ d’aide sociale, tu ne vas pas ch*er loin et les épiceries sont maigres. Les logements ne sont tout simplement plus abordables et tu dois être vite sur le piton si t’es chanceux et que tu en trouves un, parce qu’ils partent tellement vite que les gens ne visitent presque même plus », déplore Anthony.
Le jeune homme assure que les policiers qui passent par le Parc de la gare respectent les occupants et se préoccupent de leur état. Il remarque toutefois que les passants semblent souvent inquiets à la vue du camp de fortune et que plusieurs l’évite en faisant de grands détours.
L’itinérance n’est pas coutume dans le paysage rimouskois, mais force est d’admettre qu’elle se répand de plus en plus en raisons des conditions économiques pénibles des dernières années.