Peut-être encore plus de détresse après la crise
La crise du coronavirus a un effet direct sur le moral de la population, mais ses impacts sur la détresse psychologique sont plus souvent attribuables à des phénomènes déjà existants, mais qui ont pris de l’ampleur en raison de la crise.
C’est ce que constate le directeur général du Centre de prévention du suicide et d’intervention de crise du Bas-Saint-Laurent, Louis-Marie-Bédard, dans une entrevue exclusive au journal le soir. À savoir si la crise entraîne plus de détresse dans la population en général, sa réponse est « oui… et non ». Il s’explique.
Stress
« Le confinement et le déconfinement sont des facteurs qui ont apporté du stress dans la population, mais de là à dire que ça a généré plus de détresse, je dirais davantage que la crise a accentué des problèmes déjà présents. On s’attend à une hausse significative des demandes d’aide plus dans quelques semaines et dans quelques mois. C’est ce que prévoient l’ensemble des centres de crise », mentionne monsieur Bédard.
« Au plan des appels téléphoniques, les hausses sont variables. Variables selon les jours. Il n’y a pas de schéma identique chaque semaine. Il y a des jours où on double le volume de nos appels téléphoniques, d’autres pratiquement pas. On parle de 44 interventions téléphoniques par jour en moyenne. Il faut savoir qu’une intervention, ce n’est pas qu’un appel d’une personne en détresse, cela peut être un proche qui veut aider quelqu’un de son entourage », précise aussi Louis-Marie Bédard.
Effet tsunami
« Si on parle vraiment du centre de crise, dans un épisode majeur qu’on vit tous ensemble, comme la COVID-19, c’est souvent quelques mois après la situation de crise que ça devient plus critique. On peut parler d’un effet tsunami. Il y a le retrait des eaux mais il y a ce qui vient par la suite », commente monsieur Bédard.
« Nous sommes dans la période critique. Les gens sont concentrés sur la lutte contre la crise mais avec le temps et la durée de la crise, on va commencer à voir, normalement et malheureusement, des interventions plus corsées à faire. Nous n’avons pas la science infuse. On ne peut pas réagir sur-le-champ, on peut regarder ce qui s’est déjà produit dans le passé, comme lors des crises du virus Ebola et de la grippe H1N1 », affirme-t-il.
Un fonds d’urgence a été débloqué pour aider le Centre à supporter les dépenses reliées à l’application de ses 44 mesures sanitaires. Aussi, le Centre est aussi en campagne de levée de fonds auprès des entreprises.
Appui des entreprises
« Celles-ci répondent de façon extraordinaire. Si la tendance se maintient on ira chercher 50 000 $ en levée de fonds grâce è des chaînes téléphoniques. Cette campagne permet de faire la promotion de nos services pour les gens qui travaillent au sein de ces entreprises. Sensibiliser les employeurs est une très bonne façon de sensibiliser la population en général. On a pu augmenter nos sentinelles », rappelle monsieur Bédard.
« C’est un partenariat gagnant-gagnant. Pour un employeur, en ce moment, c’est très difficile de maintenir le cap parce qu’ils doivent faire face aux enjeux de leur entreprise mais aussi aux enjeux de personnel, des employés qui peuvent vivre différents problèmes. Je dois le dire : je tombe en bas de ma chaise de voir à quel point on nous appuie dans cette période de crise », conclut-il.