Entrevue exclusive : le député Roy veut tourner la page
Il entreprend une nouvelle façon de faireLe député de Bonaventure, Sylvain Roy, dont l’annonce du départ du Parti Québécois a fait des vagues, il y a cinq jours, tourne résolument la page sur son association avec le PQ, tout en étant animé de bonnes intentions.
La semaine dernière, Sylvain Roy a confirmé qu’un différend avec le chef Paul Saint-Pierre Plamondon l’avait amené à prendre la décision de quitter le navire péquiste. En entrevue exclusive avec le journal le soir, cet après-midi, monsieur Roy se veut limpide dans ses positions.
« La poussière retombe et il est temps que tout ça arrête. Certains ont commencé à jouer dans la vase. Des informations confidentielles du caucus ont été dévoilées, mais de mon côté, ça ne me tente vraiment pas de briser la confidentialité et de jouer ce jeu-là. Je n’ai pas besoin d’en rajouter, car je préfère tourner la page. Ce que je veux faire maintenant, c’est de l’entrepreneuriat politique. J’ai plus le goût de parler de ça », confie monsieur Roy.
« Ma réflexion a évolué »
« Ma réflexion a évolué », répond Sylvain Roy, lorsqu’on lui demande ce que signifie son expression « entrepreneuriat politique ».
« Quand je suis parti d’ici vendredi dernier, j’étais un politicien qui étouffait un peu sa formation de sociologue et qui était dans sa ligne de parti. Je reviens aujourd’hui à l’Assemblée nationale en tant que sociologue. J’ai décidé d’avoir une approche, de faire des interventions et d’évaluer les enjeux sociaux en fonction de ma formation et non pas en fonction de participer à des « scrums » médiatiques, d’avoir recours à des lignes de communication ou d’avoir à défendre des intérêts de parti », répond spontanément monsieur Roy.
Stratégie clientéliste
« Je veux donc, à travers ma nouvelle expérience de député, essayer de décrypter la réalité sociale et proposer des solutions réalistes. Proposer des axes de développement, de nouvelles stratégies en fonction des changements sociaux. Je vais éviter de passer par tous les filtres, tous les cadres, toutes les analyses partisanes qui viennent aseptiser les stratégies qui devraient être déployées. Prenons la langue : on en a fait un événement plus médiatique que de conviction. L’enjeu est beaucoup plus complexe. J’ai voté contre une stratégie clientéliste. J’aurais aimé qu’on ait plus d’ambition », affirme-t-il également.
« Ce n’est pas à coups d’environnements coercitifs et d’interdictions qu’on va élever la langue française; c’est par l’enseignement. Avec des stratégies pédagogiques plus intéressantes pour l’apprentissage du français, on règlerait le problème, mais tout en incluant l’anglais dans le parcours scolaire. Bien des jeunes ont recours à l’anglais parce qu’ils ne maîtrisent pas le français », constate le député de Bonaventure.
Pour le comté
« Je continue d’être un député actif au niveau national. Je veux aussi continuer d’être un député extrêmement combatif pour ses concitoyens. Je travaille particulièrement sur mon dossier numéro un : une zone d’innovation en composantes de maisons. C’est un projet dans lequel on implique le CÉREX, des enseignants de l’Université du Québec à Rimouski, des industriels de la région, et qui nécessite des discussions avec le ministre des Forêts. Le site où on érigera le projet sera déterminé selon l’intérêt des promoteurs qui se manifesteront. Ce sera un projet régionaliste d’innovation, avec une préoccupation d’accès à la propriété pour les jeunes. En ayant recours à des composantes préfabriquées, on réduirait le coût d’accès à la propriété. Un des objectifs est aussi de valoriser le bois, alors je vais me concentrer là-dessus », promet Sylvain Roy.
On peut prendre connaissance d’une vidéo réalisée par monsieur Roy et diffusée sur sa page Facebook, hier, en cliquant sur ce lien.
Avenir du Parti Québécois
Par ailleurs, le journal rapportait la semaine dernière que pour certains observateurs, le départ de monsieur Roy apparaît comme un autre coup dur pouvant même menacer l’existence du Parti Québécois. Le président du comité exécutif de l’Association du PQ de Rimouski, Alain Dion, soutient ne pas être inquiet. De plus, celui-ci et monsieur Roy s’apprécient mutuellement.
« Je ne connais pas les raisons qui ont poussé Sylvain à prendre sa décision, mais je le respecte et je veux lui rendre hommage. Lui et moi nous connaissons bien puisque nous avons été collègues en enseignement au collégial. Sylvain a notamment travaillé très fort pour faire avancer, comme député, la question du financement des cégeps en région. C’est quelqu’un que j’apprécie énormément, alors, je suis déçu qu’il ait quitté le parti. J’ai l’impression qu’il veut se destiner à autre chose après son mandat. Je respecte son intégrité. C’est quelqu’un qui a des positions claires et affirmées. J’ai toujours apprécié les gens qui se tiennent debout », commente Alain Dion.
« Ceci étant dit, je continue de croire en l’avenir du Parti Québécois. C’est sûr que c’est difficile de faire notre place, notamment parce qu’une partie du terrain est occupée par la CAQ sur le plan de l’identité. Ils ont travaillé un peu sur la langue française, mais je pense qu’ils ne sont pas allés assez loin. Ce qu’il faut continuer de marteler pour le PQ et ce que nous sommes toujours les seuls à faire, c’est de réaffirmer l’urgence de faire l’indépendance. »
En faveur de l’indépendance
« On le voit, toujours et encore, dans plein de dossiers, notamment avec la crise sanitaire pour la gestion des frontières, pour la relance économique; le devoir de faire respecter la langue française à la fois au Canada et dans nos institutions. Il y a toujours plein de raisons qui militent en faveur de l’indépendance et il faut maintenir ce message. Il y a un congrès qui s’en vient à l’automne. On travaille dessus. On débat de certaines propositions entre nous. À Rimouski, on a pris position sur la question du télétravail. Des travailleurs sont complètement bafoués aujourd’hui même. Alors que des syndiqués sont en moyen de pression, des enseignants sont obligés de pratiquer l’apprentissage à distance. On met en place de nouveaux briseurs de grève malgré eux et il y a en plus toute la question des travailleurs autonomes. Je pense que le PQ a historiquement un préjugé favorable aux travailleurs et qu’il faut ramener ça aussi », fait valoir monsieur Dion.
Celui-ci conclut en réitérant sa confiance envers Paul Saint-Pierre Plamondon : « On travaille fort et on va continuer de valoriser les orientations du parti. Le nouveau chef, à mon avis, travaille très bien. On subit une lourde perte avec le départ de Sylvain, mais je dois dire que je ne ressens pas d’animosité au sein des députés du parti et des députés devenus indépendants parmi le groupe de la région. »