Le Comité du patrimoine du Bic présente sa version
(NDLR)-Le Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic tient à faire connaître sa version des événements à la suite de l’article titré « Une histoire de terrain et de paysage embarrasse la conseillère du Bic » diffusé dans nos pages le 22 juillet dernier.
–Ce communiqué vise à rectifier certaines allégations, mais aussi, plus largement, à expliquer le processus ayant mené à notre prise de position.
D’entrée de jeu, il faut se rappeler que le Comité s’intéresse à ce secteur depuis plus de cinq ans puisque lors d’une assemblée publique de consultation tenue le 4 avril 2016, Jean Munro et Linda Lavoie, du Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic, participaient à cette consultation publique. Nos interventions ont permis de sensibiliser les membres du conseil municipal de l’époque, sous la gouverne du maire Éric Forest, quant à l’importance de protéger les éléments du patrimoine bâti concentrés dans le secteur visé par le projet de règlement.
La procédure a alors été interrompue avec la résolution 2016-11-951, souhaitant qu’une réflexion globale soit amorcée sur le patrimoine bâti du village et sur la meilleure façon d’en assurer la pérennité. Le maire (Éric) Forest avait d’ailleurs remercié les citoyens pour leurs interventions, celles-ci venant à ses yeux confirmer l’importance de telles consultations.
Cinq ans plus tard
C’est le même cas qui a refait surface récemment dans l’actualité municipale et qui préoccupe de nouveau les membres du conseil d’administration du Comité. Après avoir pris connaissance de l’avis public paru le 16 juin dernier dans L’Avantage sous le titre : « Consultation écrite sur le projet de règlement modifiant le règlement 782-2013 sur l’application et l’administration des règlements d’urbanisme afin d’ajouter une exception aux conditions de délivrance d’un permis de construction dans la zone H-3027 », nous avons transmis, afin de favoriser une prise en charge collective du patrimoine,une Infolettre aux quelque 300 membres et amis de notre organisme afin de les informer de la problématique et les inviter à se manifester dans le cadre de cette consultation écrite. Une quarantaine de personnes environ auraient manifesté leur opposition à ce projet de règlement.
De plus, la création d’une pétition par une autre citoyenne, une initiative indépendante du Comité, vient s’ajouter à ce mouvement qui illustre bien un attachement fort et largement répandu dans la communauté envers le charme pittoresque de ce secteur. Si cet attachement est loin d’être nouveau, la récurrence, pour une deuxième fois, d’une telle procédure a certainement fait naître une prise de conscience collective de la fragilité de cet environnement – que plusieurs prenaient pour acquis – et assurément susciter cette fois une plus grande participation citoyenne.
Valeur patrimoniale unique
Globalement, nous considérons que le projet de règlement adopté en séance extraordinaire le jeudi 15 juillet dernier met en péril la valeur d’ensemble exceptionnelle du secteur concerné regroupant cinq maisons ancestrales datant de la première moitié du 19e siècle et deux bâtiments de ferme d’une grande authenticité et cohérence présentant un fort intérêt du point de vue du patrimoine bâti.
Le tout témoigne du passé rural et agricole du secteur, et offre une porte d’entrée au cachet remarquable et unique pour la Ville de Rimouski.
La Société rimouskoise du patrimoine (SRP) a d’ailleurs attribué aux dites résidences des valeurs « exceptionnelle » et « supérieure ». Rappelons que les « doyennes » de ce secteur sont non seulement les plus anciens bâtiments du Bic, mais aussi parmi les plus vieux de tout Rimouski. Et que les très rares édifices de Rimouski qui sont plus anciens que ces résidences sont tous déjà protégés par « classement » ou par « citation » en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel du Québec.
Aussi, bien que lors de la consultation publique en 2016, Jean Munro et Linda Lavoie souhaitaient alors l’adoption d’un PIIA afin que l’arrivée éventuelle d’un nouveau bâtiment s’intègre le plus adéquatement possible au secteur, qu’il soit permis aux membres du Comité de réclamer, en 2021, la préservation de ce joyau architectural et historique exceptionnel pour la Ville de Rimouski, secteur Le Bic, puisque notre appréciation de ce secteur unique a évolué au cours des cinq dernières années, et que nous jugeons davantage pertinent d’éviter de rompre de manière irrémédiable l’harmonie architecturale ainsi que l’intégrité de ce secteur, avec l’ajout d’une nouvelle construction, quelle qu’elle soit.
Un premier pas
En 2016, le maire Forest avait mis fin à une demande similaire pour ce terrain en soulignant qu’il était nécessaire de réfléchir à la protection du patrimoine du village du Bic dans sa globalité.
L’adoption du PIIA pour le noyau villageois du Bic en 2020 est un pas en ce sens. Toutefois, ledit PIIA ayant été voulu très souple afin de favoriser une meilleure acceptabilité sociale, nous constatons, qu’il ne détient pas l’outillage adéquat permettant de protéger efficacement la qualité architecturale et visuelle de ce secteur, dont la valeur d’ensemble est remarquable et unique sur le plan patrimonial.
La rue de Sainte-Cécile-du-Bic étant couverte presque entièrement par ce PIIA, le secteur au cœur de la réflexion actuelle s’y trouve inclus « par défaut », bien qu’une réflexion spécifique sur ce petit « hameau », distinct du noyau villageois par ses caractéristiques architecturales, urbanistiques et historiques n’ait pas été faite, révélant ainsi un aspect qui n’a malheureusement pas été pris en compte par cette nouvelle règlementation.
La simple possibilité de soustraire ce secteur du PIIA et de plutôt l’intégrer au Site patrimonial du Havre du Bic, en ce qu’il combine les volets patrimoine bâti, naturel et paysager pourrait correspondre davantage à la nature même de ce secteur.
Le patrimoine, une notion en constante évolution
Si le concept de patrimoine réfère généralement à des biens ou des lieux qui ont peu ou pas changé au fil des ans, il en va tout autrement de la façon d’évaluer ceux-ci. Les changements apportés à la Loi sur le patrimoine culturel en 2011 et 2021 forcent les acteurs du milieu du patrimoine, où qu’ils soient au Québec, à adapter leurs pratiques et prises de positions.
Le patrimoine immatériel et les paysages patrimoniaux sont aujourd’hui davantage reconnus. Dans le domaine du patrimoine immobilier, la tendance n’est plus à regarder uniquement les bâtiments seuls, qui sont « isolées », mais bien à considérer davantage la relation qu’ils entretiennent avec leur environnement et ainsi protéger un « écosystème patrimonial » plutôt qu’un édifice seul.
À l’avant-garde
À titre d’exemple, la démarche actuelle de la Ville de Rimouski en vue de protéger la Maison mère des Sœurs du Saint-Rosaire se fait d’ailleurs selon cette vision. Le Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic se devait, dans le même esprit, d’actualiser sa démarche dans le dossier du hameau de l’Ouest de la rue de Sainte-Cécile-du-Bic et entend rester à l’avant-garde de la mise en valeur du patrimoine, en phase avec les pratiques les plus actuelles dans ce domaine.
Considérations environnementales
Enfin, des aspects liés aux dimensions environnementales devaient être considérés puisque le projet de règlement adopté vise à permettre dans la zone H-3027 (secteur Le Bic) une exception aux conditions de délivrance d’un permis permettant la construction d’une habitation unifamiliale, et ce, même si les services d’aqueduc et d’égout ne sont pas établis dans la rue en bordure du terrain où l’habitation est projetée.
L’adoption de ce règlement a pour conséquence qu’un terrain non constructible, car ne possédant pas la dimension minimale requise afin d’accueillir un puits et les installations septiques en vertu de la législation applicable deviendrait constructible. À noter qu’un ruisseau est répertorié sur ledit terrain. Aussi, une portion du terrain visé est située dans une zone de contrainte (risque d’érosion) selon le schéma d’aménagement de la MRC de Rimouski-Neigette.
Soulignons, à cet égard, que c’est seulement, lors de la séance du Conseil municipal du 5 juillet dernier que les citoyens ont su, par une question posée au maire, (le dossier n’apparaissant pas à l’ordre du jour), que le terrain était sujet à des droits acquis, élément dont il n’aurait pas été question en 2016 et qui ajoute à la complexité du dossier.
Feuille de route
Depuis maintenant un quart de siècle, le Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic réfléchit et se positionne sur les enjeux de patrimoine du territoire bicois, contre « vents et marées », à distance des pressions politiques ou populaires, et en favorisant la participation citoyenne, autant que possible.
Rappelons d’ailleurs, le dossier relativement récent du redécoupage des districts électoraux proposé par la Ville de Rimouski, pour lequel nous avons mobilisé des centaines de citoyens et citoyennes, franchit les multiples étapes menant à la Commission de la représentation électorale (CRE), qui a reconnu clairement la légitimité de cette démarche citoyenne en rendant une décision en notre faveur sur les bases, entre autres, de l’atteinte à notre sentiment d’appartenance ainsi qu’au respect et à la préservation de l’identité villageoise et patrimoniale du Bic.
Pas de politique
En regard d’insinuations propagées au cours des derniers jours, nous désirons mentionner que les membres du conseil d’administration du Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic ne font aucunement partie, ni de près, ni de loin de l’organisation politique de madame Virginie Proulx, candidate à la mairie 2021, ni de qui que ce soit d’autres. Seules les valeurs ayant présidées à la fondation de ce Comité, les réflexions d’autres acteurs du milieu du patrimoine au Québec et les réflexions collectives du reste de la communauté guident nos prises de position.
Lors de la fusion Bic-Rimouski en 2009, le maire Éric Forest avait vendu l’idée que le patrimoine et le charme unique du Bic serait un « plus » pour Rimouski et notre Comité est toujours ardemment motivé à faire en sorte que la petite communauté du Bic demeure « ce plus » pour la grande communauté rimouskoise.