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Nouvelle de 17 h

Une histoire de terrain et de paysage embarrasse la conseillère du Bic

La valeur d’un site convoité et controversé vient de monter en flèche!
Le fameux terrain dont il est beaucoup question depuis un mois et, à droite, la conseillère du Bic, Virginie Proulx. (Photos: photomontage, Pierre Michaud-journallesoir.ca et archives)

La conseillère du district 11, Virginie Proulx, se retrouve au centre d’une embarrassante histoire de terrain convoité et de vue sur les îles du Bic, le quartier rimouskois qu’elle représente et qu’elle habite.

Il aura fallu un certain temps et bien des énergies au journal le soir pour démêler cette histoire inusitée qui implique beaucoup de gens depuis plusieurs semaines, dont la conseillère Proulx, son conjoint, les propriétaires du terrain situé en face de la propriété de madame Proulx (celle-ci étant située au 263, chemin Sainte-Cécile-du-Bic), des membres du Comité du patrimoine culturel et naturel du Bic, le conseiller du district Terrasse Arthur-Buies, Karol Francis, et le maire, Marc Parent.

Le fameux terrain n’était pas considéré comme construisible depuis 2016, selon les règles d’urbanisme de la Ville, mais le conseil municipal vient d’adopter un règlement qui permet une exception pour la construction d’une résidence unifamiliale sur ce terrain et l’intègre dans la Zone H-3027. Le projet de règlement a d’abord été déposé le 12 juin.

Accès à l’information

Entre cette date et l’assemblée du conseil municipal du 5 juillet, une demande d’accès à l’information déposée par le journal a permis de constater que la Ville a reçu quelque 30 messages de la part de résidents et d’organisations du Bic s’opposant à ce règlement. Des questions d’infrastructures et de patrimoine ont été soulevées pour expliquer ces oppositions.

L’action, par sa soudaineté et son ampleur, a semblé concertée et jouer en faveur de la famille de madame Proulx afin qu’elle n’ait pas de nouvelle construction devant sa maison et continue de profiter de la vue sur un décor splendide, avouons-le. Une situation qui a même incité le maire Marc Parent à demander publiquement à madame Proulx, en assemblée, si elle était derrière ce mouvement d’opposition, ce qu’elle a nié à ce moment et nie toujours en entrevue au journal. Par ailleurs, ajoutons que nulle part, la vue sur le paysage n’est un droit acquis.

Échange

Avant de donner la parole à celle-ci, prenons d’abord connaissance d’un échange entre le maire, Marc Parent, et la présidente du Comité du patrimoine culturel et naturel du Bic, Linda Lavoie, survenu lors de l’assemblée ordinaire du conseil municipal du 5 juillet. Cet échange aidera nos lecteurs à mieux comprendre le contexte de l’affaire.

« En 2016, vous étiez ouverts (NDLR : à l’idée de construire éventuellement sur ce terrain) et maintenant, en 2021, maintenant qu’on a prévu et inséré des mécanismes pour qu’il y ait une bonne intégration, vous êtres contre. Il y a une levée de bouclier de la part de votre comité », a dit monsieur Parent.

« Une maison, même avec un style ancien, c’est sûr et certain que ça reproduirait le style du secteur, mais on sait fort bien qu’une maison construite avec des matériaux d’aujourd’hui ne pourra pas respecter le fait qu’on est dans un secteur où il y a une authenticité qu’on ne retrouve pas ailleurs », a mentionné madame Lavoie.

Totalement qui?

Monsieur Parent a eu l’air de plus en plus suspicieux. « Vous dites dans votre communication que le Comité est totalement en désaccord. Le Comité du patrimoine a combien de membres? »

« Je parle du conseil d’administration, je peux vous les nommer. Mais on a des membres de Sept-Iles, de Sherbrooke… il y a des gens qui sont membres et n’habitent pas chez nous. Il y a des Rimouskois… On a aussi des gens même des États-Unis. On a ouvert notre membership; il n’y a pas que des Bicois… », a répondu la présidente du Comité.

« C’est intéressant, ce que vous dites, mais comment pouvez-vous dire, alors, que le Comité est unanimement en désaccord? », a lancé monsieur Parent.

« Je parlais bien des membres du c.a. », a ajouté Linda Lavoie.

Et le 263?

Le maire a poursuivi : « Lorsque vous dites (dans les commentaires contre le projet) : « Chacune des résidences de ce secteur fait d’ailleurs l’objet d’une valeur patrimoniale exceptionnelle ou supérieure… » Chacune des résidences, dites-vous… Que faites-vous du 263, la résidence de madame Proulx? »

« On ne parlait que des maisons dont nous faisons la mention. Ce sont ces maisons qui sont l’ensemble dont on parle, monsieur Parent; un ensemble exceptionnel… », a pu faire valoir Linda Lavoie avant que la discussion ne devienne inaudible et qu’on finisse par entendre le maire mentionner : « Et comment caractérisez-vous la résidence de madame Proulx, quant à son intégration, dans ce secteur là? C’est une belle réussite, non?», d’insister monsieur Parent.

Pas dans cette direction

« Je ne veux pas aller là, monsieur Parent. On parle des maisons ancestrales qui datent des années 1800 et font partie d’un ensemble architectural unique; c’est de cela qu’on vous parle », a répliqué madame Lavoie.

« Je ne veux pas m’en mêler »

Interrogée au lendemain de cette assemblée du 5 juillet, madame Proulx n’a pas voulu faire de commentaires officiels sur ce dossier, reconnaissant ainsi qu’elle est personnellement touchée par la proximité de sa résidence et celle du terrain en question.

Elle accepte cependant de réaffirmer que « ce sont des citoyens préoccupés par le patrimoine qui ont décidé d’envoyer des lettres à la Ville et quand le maire laisse entendre que c’est moi qui ai mobilisé ces gens, c’est tout à fait faux. »

« Non, je ne veux pas m’en mêler », a affirmé de nouveau madame Proulx devant notre insistance, alors que nous lui demandions si elle ou sa famille avaient eu ou avaient toujours un ou des projets pour ce terrain.

Son conjoint

Toutefois, si on en revient aux documents épluchés par le journal, on remarque que le conjoint de madame Proulx, Olivier Groulx, fait partie des citoyens qui ont écrit au conseil.

Le 30 juin, monsieur Groulx demandait alors par écrit à la Ville « d’annuler le projet de modification réglementaire. » Il invoquait parmi les raisons mentionnées que la « modification réglementaire pourrait avoir pour effet d’augmenter substantiellement la valeur de revente du terrain en question (le terrain a été payé 16 000 $ par madame Therriault en 2002 et l’évaluation municipale de 2021 est de 19 300 $). » Il défendait aussi dans cette longue communication « cet espace naturel non constructible, composant un paysage exceptionnel donnant vue sur les îles du Bic », relevait « un impact majeur sur un paysage bicois villageois unique » et la valeur patrimoniale de certaines résidences du secteur.

Monsieur Groulx a également déploré dans son message que sa conjointe conseillère avait été mise de côté par les autres membres conseil depuis plus d’un an, puisqu’elle n’est plus acceptée dans les réunions en comité plénier.

Le conseiller

Le conseiller Karol Francis a fait comme la conseillère Proulx et n’a pas voulu se mêler de la décision du conseil sur le fameux terrain. Qu’a-t-il à y voir? « Simplement que comme promoteur, c’est un terrain qui pourrait m’intéresser, mais parmi d’autres », répond monsieur Francis, qui jure n’avoir aucun projet relativement à ce terrain en particulier.

Le maire

L’auteur de ces lignes a rappelé monsieur Parent cette semaine, après avoir pris connaissance des détails du dossier, lui demandant s’il croyait toujours à une intervention télécommandée.

« En 2016, deux membres du Comité du patrimoine culturel et naturel du Bic nous disent qu’ils ne s’objectent pas fermement à ce qu’il y ait un permis de construction émis, mais souhaitent que la Ville soit vigilante dans le type de construction. Cinq ans plus tard, alors que la Ville prend les moyens légaux pour s’assurer de protéger le patrimoine bâti, c’est une véritable levée de boucliers. On nous dit soudain « non, non, non », pétition et compagnie… »

« Ce sont plus que des connaissances de madame Proulx (qui sont intervenus), ce sont des alliés; Linda Lavoie et Jean Munro, ce sont des gens qui sont près de Virginie et de son organisation (politique?) », croit monsieur Parent. Car rappelons que madame Proulx est candidate à la mairie, aux élections de novembre 2021.

À gauche, le fameux terrain qui devient accessible à la construction et à droite, la résidence familiale de madame Proulx. (Photo: journallesoir.ca, Pierre Michaud)

Toute une différence de valeur!

C’est clair selon monsieur Parent qu’avec la modification réglementaire, le terrain prend de la valeur et devient moins abordable pour ceux qui auraient voulu l’acquérir sans construire

« Maintenant, il y a toute une différence entre acheter un terrain sur lequel on ne peut rien faire et un terrain avec vue sur le fleuve, sur lequel on peut construire une maison. Officiellement, madame Proulx s’est retirée des discussions concernant la prise de décision du conseil. Ça, je peux le confirmer. Mais je ne peux pas savoir si elle a fait d’autres démarches à l’extérieur. Je lui ai demandée si elle était intervenue, parce que je trouve particulière et soudaine toute cette levée de boucliers. La réaction des personnes concernées a beaucoup changé entre 2016 et 2021 et on peut se demander pourquoi », lance le maire Parent.

Le maire de Rimouski, Marc Parent. (Photo: capture d’écran-Zoom)

Offre de 19 000 $

Par ailleurs, le journal ayant appris qu’une offre d’achat de 19 000 $ aurait été déposée auprès des propriétaires dudit terrain, un appel à été logé à Roseline Thériault et Normand Saint-Pierre qui refusent de confirmer cette information.

« Nous risquons d’entrer en conflit d’intérêt. Nous ne répondons pas aux journalistes. Si vous voulez des détails, allez voir dans les dossiers de la Ville de Rimouski : tout est conforme », a tranché monsieur Saint-Pierre.

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