170 M$ qui militent en faveur de Costco à Rimouski
Les fuites commerciales vers des marchés extérieurs sont évaluées à 170 M$, à Rimouski, ce qui milite en faveur de l’implantation du géant du commerce au détail Costco, chez-nous, dans la Cité des Achats ou ailleurs.
C’est ce qui ressort notamment d’une entrevue exclusive accordée par le président et directeur général de la Société de promotion économique de Rimouski (SOPER), Martin Beaulieu, avec le journal le soir, à ce sujet.
D’entrée de jeu, précisons que les fonctions de monsieur Beaulieu l’empêchent de se prononcer pour ou contre la venue de Costco. Mais soucieux de donner l’heure juste sur le projet de Costco à Rimouski, le journal a ouvert la porte à monsieur Beaulieu afin d’obtenir les informations économiques et techniques objectives qui permettront à ses lecteurs de se faire une idée plus claire des enjeux liés à ce projet.
Un reportage à propos de Costco a suscité beaucoup de réactions hier, sur la page Facebook du journal le soir. On y précisait qu’un démarcheur est dans le dossier pour assister Costco jusqu’à la fin d’octobre et que le contexte est peut-être moins favorable à la construction d’un commerce de la chaîne, à Rimouski.
« Je comprends que ce projet peut susciter des débats, mais ma position est fort simple et se résume ainsi: Costco représente un projet important pour l’avenir du pôle commercial qu’est Rimouski », dit monsieur Beaulieu. L’investissement de Costco serait de l’ordre de quelque 50 M$ si on regarde les coûts de son implantation à Lévis.
Apport économique de l’extérieur
« Je pense que c’est important de dire pourquoi Rimouski est sur le radar de Costco depuis plusieurs années. C’est pour notre offre commerciale diversifiée et la taille de l’offre commerciale qu’on a, à Rimouski. Si on regarde les statistiques (pré-COVID-19), sur 1,3 milliard$ des achats effectués à Rimouski annuellement, moins de la moitié provient des Rimouskois. La différence, on parle de plus de 600 M$, est consommée par des gens qui proviennent de l’extérieur de Rimouski », précise monsieur Beaulieu.
Fuite
« De ces données, on est capable d’estimer ce qu’on vend et ce que les gens achètent. On se rend compte que sur la somme de 1,3 milliard$, on accuse une fuite commerciale d’environ 170 M$. Ce qui veut dire que dans notre liste d’épicerie, on se rend compte qu’il y a pour 170 M$ de besoins qui ne sont pas vendus à Rimouski. Dans ce contexte, les consommateurs ont trois options : -faire comme nos parents, se passer du produit recherché ou prendre un produit de remplacement; -acheter sur Internet; – aller le chercher ailleurs. »
Déjà clients de Costco
« C’est très difficile de savoir lequel des trois permet de répondre aux besoins, par ordre d’importance. Ce qu’on peut cependnant retenir pour un projet comme Costco –pour lequel je ne suis ni pour, ni contre, ni la SOPER- c’est qu’il est clair que nous devrions soutenir un projet qui est légitime, légal et qui répond aux normes de zonage de la Ville. Pour nous, il y a déjà une fuite commerciale vers les magasins Costco installés ailleurs. Nous n’avons pas les chiffres exacts ,mais on peut penser que les dépenses déjà engagées par des gens de l’Est du Québec dans un commerce Costco sont de l’ordre de plusieurs dizaines de millions de dollars », ajoute Martin Beaulieu.
Attirer plus de gens
« En bref, Costco s’accapare déjà une partie des 170 M$ de fuites commerciales. Alors nous, le pari qu’on fait, c’est que cette fuite pourrait être colmatée et que cet argent pourrait demeurer à Rimouski. Si on est capable de le faire et d’attirer plus de gens, on va travailler dans une logique où les gens vont acheter chez Costco, mais aussi aller au restaurant ou faire le plein d’essence et se rendre dans d’autres commerces. Parce que je rappelle que plus de la moitié des achats effectués à Rimouski sont faits par des gens de Matane, Gaspé ou d’ailleurs, des visiteurs qui viennent installer leur enfant pour les études ou des touristes. »
L’intervention de la SOPER se fait donc dans cette perspective. « On vend déjà beaucoup de voitures, de vélos, de skis et de vêtements. Il y a beaucoup de gens qui proviennent de l’extérieur. »
Connaissance pointue du marché
Élément spécifique à Costco, sa formule de recrutement des membres lui permet d’avoir une connaissance pointue du marché, ce qui lui procure un avantage concurrentiel et lui permet de prendre une décision sur-le-champ lorsqu’elle doit le faire.
« Costco, par sa structure de membres, a une connaissance très fine du marché. Elle peut même dire de façon très claire combien elle a vendu de gallons d’huile d’olive dans votre rue! C’est dans ce contexte que Costco prend ses décisions. On sait actuellement que la COVID-19 a donné un élan au marché de l’alimentation. Est-ce que ça se maintient ou pas dans le temps? Je ne le sais pas, mais Costco pourrait le savoir. C’est un élément fort qui permet à Costco de prendre ses décisions. La chaîne optimise les trois magasins de Québec et équilibre ça avec le volume d’affaires qui provient de l’Est du Québec. On va arriver à un point, un moment donné, où les magasins Costco de la région de Québec seront tellement occupés et que le volume d’affaires de l’Est du Québec sera assez important pour construire un nouveau magasin à Rimouski », commente Martin Beaulieu.
Pas de favoritisme
Le maire de Rimouski, Marc Parent, a déjà mentionné que Costco ne mériterait pas de traitement de faveur de la Ville, point sur lequel insiste aussi monsieur Beaulieu :
« Nous accompagnerons Costco selon les mêmes conditions que n’importe quelle autre entreprise intéressée à venir à Rimouski. Il n’y a ni cachettes, ni secret là-dedans. Lorsque nous collaborons à un projet, nous le faisons en tenant compte de trois points : la qualité du promoteur, la base du marché et la base du financement. Si une entreprise qui répond à ces critères, opère dans la légalité et démontre qu’elle est viable, on n’a pas de raisons de l’empêcher de venir s’implanter à Rimouski, dans n’importe quel secteur d’activité. Tout en respectant les dispositions réglementaires de la Ville, il va de soi. »
« La décision de venir ou pas à Rimouski est entièrement entre les mains de l’équipe de direction de Costco, qui a tous les outils pour le faire », note-t-il également.
Chasseurs de sites
L’occasion est aussi belle pour préciser ce qu’entendait le chroniqueur municipal de CFYX, Michel Turcotte, par « lobbyiste », lorsqu’il a parlé de Costco en ondes, hier.
« Nous n’avons jamais travaillé avec des lobbyistes, mais des entreprises de la taille de Costco font régulièrement appel à des « sites locators », des courtiers qui ont des mandats de grandes chaînes qui veulent s’établir dans des villes en particulier, avec des cahiers de charge particuliers. Il arrive qu’on nous contacte et que nous ne sachions pas exactement de quelle entreprise il s’agit. C’est variable, ce qu’on nous demande comme information, mais c’est courant que des courtiers soient rattachés au dossier. »