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Finance, économie et investissement

Les causes de l’inflation et ses conséquences sur votre vie

Le gestionnaire de patrimoine Benoit Arsenault, Équipe René Gagnon, explique les causes de la hausse de l’inflation et ses concéquences.

Cette troisième chronique porte sur un sujet hautement médiatisé au cours des 15 derniers mois. Il s’agit de la hausse de l’inflation et de l’intervention des banques centrales pour tenter de reprendre le contrôle de la situation avec leur outil de prédilection, le taux directeur.

L’objectif des hausses de taux d’intérêt est de faire ralentir l’économie, et ainsi de freiner la demande. Lorsque les taux d’intérêt augmentent, le coût d’emprunt devient plus élevé. Par exemple, pour l’achat d’une propriété, il y a une différence majeure sur le paiement mensuel lorsque le taux d’emprunt est de 2 %, comparativement à 5 %.

Pour un prêt hypothécaire de 400 000 $ à un taux d’intérêt de 2 %, le versement mensuel est de 1  694 $ tandis qu’avec un taux d’intérêt de 5 %, le versement mensuel est de 2 326 $, soit une différence de plus de 632 $ (+37 %). Avec des paiements hypothécaires et de prêt automobile aux taux d’intérêt que nous connaissons aujourd’hui, le revenu destiné aux autres dépenses de consommation se fait plus rare.

Les citoyens réfléchissent donc davantage avant de faire un achat important. C’est pourquoi un environnement de hausse des taux d’intérêt est souvent précurseur d’une récession : l’économie est en perte de vitesse. Les hausses de taux d’intérêt ont donc un effet direct sur nos vies. Il faut se préparer en conséquence.

Il importe de revenir en arrière afin de comprendre les raisons qui ont mené à une telle inflation. Les sondages effectués auprès de la population révèlent que, selon la croyance générale, l’inflation élevée est principalement due à la guerre en Ukraine, commencée en février 2022.

Nous sommes d’avis que ce n’est qu’une partie de la réponse. L’inflation qui s’est installée en 2022 remonte à la conjoncture créée par la pandémie de la COVID-19. Les anomalies qui sont apparues pendant la pandémie sont à la base de la hausse importante de l’inflation que nous connaissons aujourd’hui. Parmi ces anomalies, on note :

  • des milliards de dollars injectés dans l’économie par les gouvernements pour s’assurer que les ménages et les entreprises puissent passer à travers la pandémie;
  • des difficultés importantes dans la chaîne d’approvisionnement mondiale;
  • la fermeture de l’économie chinoise;
  • une demande des consommateurs dépassant largement l’offre disponible;
  • la politique monétaire extrêmement souple des différents banquiers centraux (taux d’intérêt historiquement bas);
  • la guerre en Ukraine.

Pour nous, l’inflation s’explique principalement par les conditions monétaires extrêmement souples de la dernière décennie et l’intervention rapide des gouvernements face à la pandémie de COVID-19 et à la guerre en Ukraine. Les forces inflationnistes ont effectué leur travail et les pays du G7 ont été surpris par une montée importante de l’inflation.

Il faut revenir 40 ans en arrière pour voir des chiffres d’inflation aussi élevés. Certains d’entre vous se rappelleront les années 1980, quand le chômage et l’inflation faisaient rage. À cette époque, les taux d’intérêt sur le marché hypothécaire frôlaient les 20 %. En 2022, l’inflation a atteint 9,1 % aux États-Unis et 8,1 % au Canada. De nombreux autres pays ont dépassé les 10 % d’inflation au cours des derniers mois.

Les instances gouvernementales et les banques centrales ont scandé haut et fort que cette inflation était transitoire et qu’elle allait diminuer assez rapidement. Cette opinion a amené les grands décideurs à ne pas réagir promptement pour freiner l’inflation. En effet, les banques centrales ont sous-estimé l’effet domino que l’inflation peut engendrer et l’évidence de celle-ci.

Ainsi, les hausses de prix se sont généralisées dans bon nombre de secteurs d’activité. Nous l’avons vécu, par exemple, avec les prix de l’énergie (pétrole et gaz naturel), des matériaux, de l’immobilier et de l’alimentation.

Les entreprises ont vu le coût de leurs intrants augmenter. Afin de garder des marges de profit similaires, elles n’ont eu d’autre choix que d’augmenter le prix de vente de leurs produits. Notons également que l’inflation est toujours une bonne raison pour monter les prix, même lorsque ce n’est pas nécessairement justifié. C’est la réalité dans laquelle nous sommes.

Que s’est-il passé ensuite?

Après avoir réalisé que l’inflation allait malheureusement être plus persistante qu’anticipée, les banques centrales nord-américaines se sont lancées dans un cycle de hausses du taux directeur inégalé auparavant, soit la cadence la plus rapide depuis 1980. Au Canada, le tout a débuté au printemps 2022 pour se poursuivre jusqu’en janvier 2023. Ce sont des hausses répétées du taux directeur de 425 points de pourcentage qui font qu’on se retrouve aujourd’hui avec un taux directeur de 4,50 %. Au début de mai, nos voisins du Sud ont encore monté leur taux directeur de 0,25 % pour le porter à 5,25 %. 

Selon les banques centrales, les hausses de taux d’intérêt ralentiraient l’inflation pour ensuite la faire diminuer et espérer qu’elle atteigne la cible à long terme de 2 %. Avec l’année en cours, nous sommes en mesure de voir l’inflation se stabiliser et tendre tranquillement vers la cible, quoiqu’à un rythme nettement plus lent que souhaité. Il reste encore beaucoup de chemin à faire avant de retrouver ledit 2 %.

En effet, il est beaucoup plus long de faire passer une inflation de 5 % à 3 % plutôt que de 8 % à 6 %. Lorsqu’un cycle de hausses de taux d’intérêt prend forme, c’est seulement 12 à 24 mois suivant les premières hausses que le plein effet est ressenti. Nous sommes actuellement dans cette fenêtre et les données économiques démontrent un certain ralentissement de la consommation, et la confiance des ménages semble s’effriter. L’incidence de la remontée rapide des taux d’intérêt sur l’activité économique pourrait être retardée au Canada, mais plus encore aux États-Unis.

Pour le moment, la banque centrale canadienne semble avoir décrété une pause quant aux hausses du taux directeur. Elle souhaite surveiller l’évolution de l’économie dans un environnement de taux plus élevés et, bien sûr, voir quelles en seront les conséquences sur l’inflation.

Qu’est-ce qui nous attend?

Nous sommes d’avis que les taux d’intérêt continueront d’exercer une pression sur l’activité économique au Canada. Pour les prochains mois, il sera intéressant de suivre les différentes données économiques. Est-ce que la hausse des taux aura l’effet espéré par les banques centrales et ralentira suffisamment l’économie pour voir l’inflation poursuivre sa course vers les 2 %?

Sera-t-il nécessaire d’aller en récession pour voir l’inflation fléchir davantage? Il faudra surveiller le marché de l’emploi, actuellement bien tendu. Selon nous, la contraction de l’activité économique devrait exercer une pression à la hausse sur le taux de chômage en 2024, freinant du même coup la croissance des salaires.

Le taux de chômage étant actuellement très bas, la pénurie de main-d’œuvre frappe tous les secteurs d’activité, et les employés sont en position de force pour leurs demandes salariales. De ce fait, les salaires sont en hausse de 5 %, dans la dernière année.

Si le marché du travail est fort et que le chômage reste bas, serait-il possible de voir l’inflation rester à des niveaux plus élevés et inciter les banques centrales à en faire plus en matière de taux d’intérêt? Le temps nous le dira, mais c’est un scénario possible. Certains économistes sont d’avis que nous pourrions naviguer de 3 à 4 ans avec une inflation de l’ordre de 3 % à 5 %, à moins qu’une récession mondiale frappe. D’ailleurs, un resserrement monétaire additionnel important demeure le plus grand risque pour l’économie mondiale. 

Une chose est certaine : la lutte contre l’inflation n’est pas terminée. La patience est de mise avant de voir l’inflation de retour à sa cible de 2 %. Nous vous conseillons d’adapter votre budget selon la réalité des taux d’intérêt d’aujourd’hui. L’économie nord-américaine est à la recherche d’un nouvel équilibre entre le marché du travail, l’inflation et les taux d’intérêt.

Nous sommes peut-être au début d’une période où le taux de chômage restera bas en raison de la pénurie de main-d’œuvre et où l’inflation et les taux d’intérêt seront plus élevés que dans la dernière décennie. Ce n’est pas parce que nous avons récemment vécu avec des taux d’intérêt qui frôlaient le 0 % qu’il faut nécessairement s’attendre à ce qu’un tel scénario puisse se reproduire dans un futur rapproché.

Le resserrement quantitatif que nous vivons actuellement est bien différent de l’assouplissement quantitatif qui l’a précédé. Restons informés sur les prochaines données économiques, car une tendance se dessinera peut-être au cours des prochains mois.

Benoit Arsenault, B. Com., CIM

Gestionnaire de patrimoine, Équipe René Gagnon

Pour consulter d’autres chroniques financières, consultez la section finance, économie et investissement de Journal Le Soir.

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